(ECLIPSE) Tel le Phoenix... (PV Elisha)

Le printemps se voulait ensoleillé et la chaleur particulièrement précoce en ce mois d’avril avancé. Un jeans noir de jais et un chandail rouge foncé aux manches mi-longues couvraient Symphony. Elle déambulait d’une démarche nonchalante dans les rues de Manhattan. Le soleil faisait briller sa longue chevelure d’ébène et se reflétait dans ses iris couleur de ciel. Un léger sourire se dessinait sur ses lèvres rosées. La journée s’annonçait belle. L’air chaud embaumait les rues de Manhattan d’un parfum léger, un brin fruité. Furtivement, la belle brune entra dans un café et en ressortit, quelques minutes plus tard avec une brioche à la main. L’odeur de la cannelle chaude remplissait la jeune femme d’un bonheur qui n’avait pas de prix.

C’est en marchant, la tête haute et le regard fier que Sky se mis à réfléchir. Elle savourait déjà les premières essences de sa vengeance avec gourmandise. Il était si facile d’être libre. N’être contrainte d’aucune loi et d’aucune morale avait ses bons côté. Maintenant qu’elle était transformée, elle avait réussi à faire souffrir son grand amour sans en éprouver de peine. En fait, elle ressentait plus une certaine satisfaction devant ce qu’elle considérait comme étant une réussite. Peut-être arriverait-elle même à le tuer un jour. Elle soupira de soulagement, entrevoyant avidement sa prochaine rencontre avec Rick.

Le seul point négatif de sa toute récente nouvelle vie était la perte de son don surnaturel qui la rendait si particulière. Longtemps, elle avait perçu le transfert d’effet négatif comme un lourd fardeau à porter. Maintenant qu’elle était débarrassée de ce fardeau, il lui manquait terriblement. Depuis la découverte de son don, Sky s’était placée en position de victime. Elle ne faisait qu’absorber les effets négatifs en les gardant pour elle. Elle soulageait les gens à un prix qui lui était cher. Douleur, peine, colère, cicatrices, blessures… Elle avait tout enduré pour trouver un sens à ce que la nature lui avait offert. À présent, tout était clair. Si son pouvoir était teinté d’un altruisme sans égal, il pouvait aussi se montrer d’un égoïsme effarant. Pour l’utiliser de cette façon, il ne faut être esclave d’aucun principe moral, d’aucune loi…

Soudainement, alors que la jeune femme se perdait dans la contemplation de la vitrine d’une boutique de luxe, la luminosité ambiante diminua. On aurait dit qu’un énorme nuage opaque et noir cachait le soleil. Irritée, l’évoluée tourna son regard vers le ciel en soupirant, comme si un seul coup d’œil suffirait à faire disparaître l’infâme nuage, honteux de l’avoir contrariée. L’intensité de la lumière diminuait progressivement sous les yeux de la jeune femme. Pourtant, aucun nuage se cachait ne serait-ce qu’une infime partie du ciel bleu. Ce qui se dressait devant le soleil en ce bel après-midi d’avril, c’était la lune. L’astre de nuit tuant l’astre de jour… Quel délicieux spectacle! L’ombre contre la lumière, et l’ombre gagne, sur le terrain de la lumière. Symph savourait toute l’ironie de la chose, comparant cette soudaine éclipse à sa renaissance nouvelle. Elle qui, autrefois, était le soleil, elle avait muté pour devenir la lune.

Symphony, tout en poursuivant sa contemplation de l’éclipse qui se produisait sous ses yeux, recula jusqu’à entrer dans une ruelle. Même si les éclipses ne sont pas des phénomènes spéciaux, la brune aimait regarder cela. Elle avait cette impression d’assister à quelque chose d’étrange et de sublime. Elle prenait part à un combat lune contre soleil. La lune était à mi-chemin, mais Sky avait confiance. Elle savait qu’elle réussirait à cacher l’étoile de jour en entier. La ruelle couverte d’ombre même en plein jour était déjà très sombre.

Soudain, un bruit venant des montagnes d’ordures fit sursauter la jeune femme. Elle se retourna vivement et fixa les déchets. Les sacs trop pleins étaient clairement visibles, tout comme le chat couleur d’onyx endormis dans les ténèbres. L’évoluée s’approcha, intriguée par le bruit étrange. Il faisait de plus en plus noir, alors que la lune poursuivait sa course à la domination du ciel. Les pas de la femme étaient feutrés, félins même. Elle tentait de se déplacer le plus silencieusement possible.

Le bruit se fit entendre à nouveau, comme un gémissement étouffé. Plus curieuse qu’inquiète, elle avança plus rapidement. Arrivée derrière la montagne d’ordures, Symphony rencontra la source du bruit. Rencontrer… C’était bien là le bon mot, car il s’agissait d’une personne. L’homme était vieux, peut-être la cinquantaine avancée. Ce qui frappa le plus la jeune femme était son apparence sale et négligée. Il était évident qu’il n’avait pas pris une douche depuis plusieurs semaines. Son manteau était d’un beige sans vie, tâché de tout et n’importe quoi. Ses cheveux étaient gras et incrustés d’insectes et de déchets. Sa barbe était longue et entremêlée. Il n’était vraiment pas beau. Seuls ses yeux noisette détonaient avec le reste. Le pauvre homme poussa un autre râlement, se tenant le ventre d’une main. Sky le toisa d’un air de dégoût. Elle qui, avant, l’aurait aidé, maintenant voulait s’en débarrasser.

Le clochard mit du temps à voir Symphony dans les ténèbres de la ruelle. D’ailleurs, ce détail ne manqua pas de tiquer la jeune femme. Malgré l’absence de lumière, elle voyait très bien chacun des détails de l’endroit. Néanmoins, en apercevant la femme, le sans-abri se jeta sur elle. Il l’implora de lui donner de l’argent ou de lui donner à manger. Tout ce que Symph lui donne fut un violent coup de pied dans les côtes. L’homme plia sous la douleur. Dans une ultime demande, il toucha la main de la jeune femme. Un transfert d’effet se fit ressentir. Pendant un instant, juste une seconde, elle ressentit la faim, le mal, la tristesse. Une seconde, pas plus… Un sourire se dessina à nouveau sur ses lèvres roses.

« Merci… »

Puis elle donna à l’homme un nouveau coup qui lui arracha un cri. Peu importait ce déchet de la société, elle était heureuse. Son pouvoir lui était revenu…

Invité

Une éclipse. Cela n'arrivait pas tous les jours. Ce genre de photos était vraiment apprécié par certaines personnes et bien qu'elle n'ait pas de contrat particulier, Elisha ne pouvait rater une occasion d'avoir de beaux clichés. Bien sûr, quelques précautions étaient à prendre, mais elle avait prévu et avait le matériel nécessaire pour un tel projet.

Le matin, elle s'était levée de bonne humeur, pour une fois, et avait savouré son petit-déjeuner avant d'aller à la douche. Elle n'avait pas très envie de se prendre la tête pour s'habiller et avait donc opté pour un jean noir, un marcel blanc et un pull léger dans les tons bordeaux. Elle aimait bien cette couleur. Plus calme, plus douce que le rouge. Elle aurait aimé ne pas se compliquer la tâche et attacher ses cheveux à la va vite, mais à peine avait-elle fait une queue de cheval improvisée qu'elle avait craqué devant les bosses qui s'étaient formées dans sa tâche. Elle recommença donc trois fois avant d'obtenir une queue haute sans trop de ratés. Elle soupira devant son miroir. Que de temps perdu pour se rendre présentable. Elle divagua immédiatement sur les top-models ou les actrices. Combien de temps passaient-elles à se faire maquiller, coiffer, habiller, avant de se présenter sur un podium ou un tapis rouge ? Malgré qu'elle s'imaginait parfois être ainsi chouchouté, elle se disait souvent qu'elle ne tiendrait pas. Trois heures pour une coiffure ou un maquillage à effet « naturelle », non merci !

Puis elle sortit de son appartement, décidant d'aller faire un tour en attendant l'heure que les médias ne cessaient de répéter depuis une semaine. Comme si c'était l'évènement du siècle, ils n'avaient cessé d'en parler dans les divers programmes en donnant les heures, les endroits où l'on verrait le mieux le phénomène, ainsi que de nombreux reportages sur les précédentes éclipses, sur les précautions d'usages, les dangers et blabla et blabla... bref, tout ce qui pouvait servir à faire de l'audience en somme. Le monde continuait de tourner. Il était étrange de voir comment une année à peine après le drame de New York, la vie avait repris son court, même ici, comme-ci de rien était. Enfin, le monde était ainsi fait. La vie devait continuer, même si la face du monde changeait. Cela semblait normale à tout le monde, mais cela inquiétait quand même Elisha de temps en temps. Tout autour d'eux, des êtres avec des capacités spéciales évoluaient. Des gens capables de survivre à des attaques qui auraient tué n'importe qui de normale, capable de voler, de jouer avec la glace... Comment reconnaître ceux qui voulaient juste vivre normalement, de ceux qui voulaient plus ? Qui se considéraient comme supérieur ? Comment réagir face à ces derniers ?

L'esprit de la brunette divagua une fois de plus vers Tyler, son ex-petit ami. Elle avait pris peur le jour où il lui avait avoué ce qu'il était. Aujourd'hui, elle regrettait. Elle aurait dû être plus compréhensive, chercher à comprendre plutôt que de tout rejeter en bloc. Maintes fois il lui avait montré qu'il l'aimait et qu'il ne lui ferait jamais de mal et pourtant, dès qu'il lui avait avoué sa différence, elle avait agi sottement, s'éloignant de lui, balayant toute leur histoire d'un geste parce qu'elle avait pris peur. Maintenant qu'elle avait eu le temps de réfléchir, elle savait que les gens comme Tyler n'étaient pas mauvais. Ils ne cherchaient pas à abuser de leurs pouvoirs. Mais les autres ? Elle n'avait toujours aucune réponse quand aux autres. Ceux comme Sylar. Ceux qui voulaient le pouvoir et le revendiquait.

Secouant la tête en se morigénant de trop réfléchir, Elisha reprit sa route tout en réalisant que ses pas l'avaient conduit dans Manhattan. Elle n'avait même pas réalisé. Elle avait dû marcher longtemps... Tant pis, de toute manière s'était l'heure. Sortant son appareil photo de son sac, elle leva l'objectif vers le ciel et observa un instant l'éclipse à travers l'appareil sans rien faire. Puis elle pressa le bouton, prenant plusieurs clichés du spectacle qui s'offrait à ses yeux. En quelques secondes, la lune cacha entièrement le soleil, ne s'entourant que d'un rayon de lumière et baignant la terre dans l'obscurité.

Alors qu'elle était occupée à prendre ses clichés, la jeune femme entendit un bruit dans une ruelle plus loin. Machinalement, curieuse, elle s'approcha lentement de la ruelle lorsqu'un hurlement se fit entendre. Elle se figea quelques secondes. Elle n'était pas très courageuse sur ce coup. Elle aurait eu envie de prendre la fuite immédiatement, sans demander son reste. Mais l'homme qui hurlait avait peut-être besoin d'aide. Non ? Alors, elle continua d'avancer, tremblante, s'injuriant intérieurement de tous les noms possibles et imaginables. Elle était stupide et effrayée, mais elle continuait d'avancer, poussée par elle ne savait trop quoi. Lorsqu'un deuxième cri se répercuta à ses oreilles, elle avança plus vite, jusqu'à arriver à l'intersection de la ruelle. Le spectacle qui s'offrit alors à ses yeux étaient des plus étranges. Un vieux SDF par terre, se tenant les côtés en souffrant visiblement. Devant lui, se tenait une femme, dos à elle. Elisha resta là à observer sans dire un mot, sans savoir quoi faire. Que faire de toute manière ? C'est alors que le SDF leva les yeux, semblant l'apercevoir. Il regarda Elisha une seconde, sans bouger, avant de tendre la main dans sa direction. Une fois de plus, sous la surprise et la peur, la jeune femme se figea.

La ruelle était si sombre qu’il était difficile d’y distinguer quelconques détails. On pouvait y deviner des formes qui bougeaient grossièrement. La lune cachait entièrement le soleil, représentant symboliquement une victoire des ténèbres sur la lumière. Aussi grande et puissante soit la lumière, l’ombre triomphera toujours. Pour Symphony, c’était là une constatation très importante. Malgré toute la peur, malgré l’orgueil et la grandeur, elle devait dire qu’Alexis avait raison. Ce n’est que dans les ombres que l’on peut véritablement devenir quelqu’un. À quoi bon briller de milles feux dans un ciel clair? Il n’y a que dans l’obscurité que l’on remarque l’étincelle des grands. Et la jeune femme avait décidé qu’elle voulait faire partie de cette élite du monde.

Dans l’ombre toujours plus opaque, presque solide, la brune se tenait fièrement. Ses yeux bleu de ciel brillaient dans l’obscurité d’une lueur turquoise désarmante. Ils ressemblaient aux yeux d’un chat qui perce la nuit de son regard. Le vert des iris des chats se mêlait au bleu habituel des yeux de Sky. Dans un mélange d’un turquoise des Caraïbes parfait ses iris avaient changés. Étrangement, la jeune femme n’avait pas besoin de plisser les yeux et de fouiller l’obscurité, comme n’importe qui aurait eu à le faire, pour bien voir les détails de cette ruelle plongée dans le noir. Elle voyait parfaitement bien dans l’ombre. Étrangère à cette particularité, la brune l’appréciait d’autant plus. Sa première pensée se dirigea d’instinct vers Alexis Kane, le prince des ombres. Un sourire se dessina au coin de ses lèvres rosées. Il ne lui ferait plus peur maintenant qu’elle pouvait voir dans les ténèbres. Dans tout son orgueil et son arrogance, elle se surprit même à attendre avec impatience leur prochaine rencontre.

Ses pensées vagabondèrent quelques secondes avant de revenir à la réalité du moment. Symph se trouvait toujours dans cette ruelle sombre. Quel cliché… Mais malgré ce faux-pas dans l’originalité, la femme avait trouvé une distraction hors du commun. Alors qu’elle croyait avoir perdu son don à jamais, voilà qu’il se manifestait à nouveau, furtif et gêné.

**J’espère que Rick n’a pas retrouvé le sien. Quel avantage je pourrais avoir…** , pensa-t-elle.

L’espoir fut de courte duré. L’évoluée soupira. Même si Rick ne contrôlait plus les maladies comme il l’avait toujours fait, elle ne disposait pas d’un énorme avantage sur lui. Son pouvoir se voyait réduit à son strict minimum. Elle allait devoir redoubler d’effort pour le faire revenir au stade ou elle l’avait emmené. Le vieil homme gisait toujours à ses pieds, se tenant le ventre, frottant ses côtes endolories. Le visage de la jeune femme feignit la compassion lorsqu’elle s’accroupit auprès de lui.

« Je vais vous soulager mon cher… »

Apeuré, le sans-abri recula un peu mais Symph fut plus rapide. Elle posa sur lui une main douce et délicate. La douleur de l’homme se transféra rapidement dans le corps frêle de la brune qui encaissa le coup sans broncher. Elle avait l’habitude maintenant de supporter la douleur des autres. Au moins, elle arrivait encore à absorber. Mais la pauvre refusait de retourner à ce stade ou elle devenait le martyr des blessés. Si son pouvoir lui revenait, elle le voulait en entier. Elle se concentra un instant. L’homme, qui ne ressentait plus aucune douleur, se mit à la remercier du fond du cœur. Sky ne l’écoutait pas. Elle était concentrée le plus sérieusement du monde. Elle voulait arriver à transférer à nouveau. Soudainement, toute la douleur qu’elle avait absorbée à l’homme quelques secondes auparavant retourna dans le corps du malheureux telle une onde de choc. Il poussa un grand cri et se tortilla.

Satisfaite, la brune se releva. Elle se retourna afin de sortir de cette ruelle indigne d’une femme comme elle quand elle se rendit compte qu’on l’observait. À voir l’expression de la jeune femme qui la dévisageait, on pouvait juger qu’elle n’approuvait pas les actions de Symphony. Elle leva un sourcil et s’approcha d’elle. Enfant chérie de la nature, la brune se sentait invulnérable. Elle valait tellement mieux que ces pauvres humains ordinaires. C’est donc sans aucune peur que l’évoluée avança vers sa spectatrice.

« Je peux t’aider peut-être? »

[Désolé, c’est plutôt court. Je vais faire mieux sur le prochain.]

Invité

Spectatrice impuissante, la jeune Connors ne pouvait qu'imaginer les détails de la scène qui se jouait sous ses yeux. Elle ne pouvait que distinguer les ombres de l'homme et de la femme, entendre les gémissements, les cris de douleurs de l'homme en détresse... et elle restait là. Elle restait invariablement stupéfiée, figée dans l'horreur de ce qu'elle ne pouvait que voir à peine mais grandement imaginer. Elle aurait du courir, appeler à l'aide, sauter sur la femme dans l'infime espoir d'avoir le dessus une seconde, le temps que l'homme s'enfuit et qu'elle puisse se dégager et se mettre à courir à son tour. Mais elle se savait trop faible. Elle savait qu'elle ne pouvait rien faire. Elle savait qu'elle était complètement pétrifiée par la peur. Alors elle restait là, à observer sans rien dire, sans rien faire, assistant à un... meurtre ? Elle aurait voulu bouger, parler, crier, hurler, pleurer... faire quelque-chose en somme. Mais elle ne faisait rien. Même son esprit ne faisait plus rien, embrumé par ce spectacle d'horreur, par la réalisation du fait qu'elle était en train d'être témoin d'une agression et probablement d'un assassinat.

Puis plus rien. L'homme ne hurlait plus, sa respiration bruyante avait cessé et il ne restait plus qu'elles deux, l'une figée, l'autre n'aillant pas encore réalisé qu'elle avait une spectatrice. Elisha déglutit péniblement alors que l'autre se retournait, réalisant enfin sa présence. Le coeur de la jeune photographe s'arrêta d'un coup, avant de repartir en battant un tempo plus rapide que celui de la plus rapide des musiques. Il s'emballait et provoquait une douleur atroce dans sa cage thoracique. Pendant un instant, Eli' cru que son coeur allait tout simplement sortir de sa poitrine pour prendre la fuite là où ses jambes lui faisaient cruellement défaut. L'instant d'après, elle pensa que son myocarde allait tout simplement arrêter ses contractions et causer sa perte. Mais il n'en fut rien. Il continua de tambouriner sauvagement, ardemment, comme dans l'espoir d'insuffler à ses jambes le même mouvement rapide et sans doute salvateur.

Et la femme avança vers elle, elle. Elle n'avait pas peur elle, elle ne tremblait pas comme Elisha quelques secondes plus tôt. Elle n'était pas figée alors que son coeur battait à mille à l'heure. Non elle ne craignait rien. Elle avait même l'air surpuissante... ou du moins, elle se pensait surpuissante. Et Elisha, elle, en était totalement impuissante.

La jeune femme sursauta quand l'autre lui demanda si elle pouvait l'aider. Miraculeusement, ses jambes se remirent alors à fonctionner et elle fit un petit pas tremblant en arrière, puis un autre.

« Non, je... Non... »

Faisant un troisième pas, elle trébucha sur on ne sait quoi, sur ses propres pieds peut-être même, et s'étala sur le dos. Immédiatement après le choc, une brûlante douleur se fit sentir au niveau de ses reins, alors que ceux-ci étaient collés à l'asphalte froid et gravillonné. Elle sera les dents alors qu'elle s'imaginait déjà morte. C'était probablement la fin pour elle. Elle allait à son tour subir le même sort que l'homme. Elle allait mourir elle ne savait trop comment et personne n'allait venir la sauver, comme elle-même n'avait rien fait pour le pauvre homme. S'en était fini de sa vie.

Elle se moquait des gens qui voyaient leur vie défiler devant leurs yeux avant de mourir dans les films, mais elle réalisa alors combien il était véridique qu'on pensait à ce genre de choses avant la fin. Sauf qu'elle ne revoyait pas son existence de sa naissance à sa mort. Elle voyait les visages de ceux qu'elle aimait tant. Ses parents, son petit frère et Tyler. Combien elle regrettait d'avoir fuit Tyler. Combien elle regrettait de ne pas lui avoir donné une chance. Elle aurait du et elle n'aurait jamais l'occasion de lui dire combien elle avait eu tort et combien sa vie n'était que regret depuis le jour où il était parti. Elle allait mourir et ça serait tout.

Spoiler:

Il ne fallut pas plus de quelques secondes, peut-être même une minute toute entière pour que l’homme aux cheveux et aux habits sales ne succombe à ses blessures. Était-il mort ou tout simplement inconscient ? Peu importait à la jeune femme… Cet homme ne méritait pas de vivre librement dans cette ville au potentiel surréaliste. En tant qu’humain dans un monde d’humain, il n’était rien. Il n’était qu’une loque, un fardeau à la société. Sans éducation, sans emploi. Il ne servait à rien. Personne ne le regretterait de toute façon. D’un certain angle, Symphony avait rendu un grand service à la société en la débarrassant d’un être immonde vivant au crochet des autres. En tant qu’humain dans un monde d’évolués, il était moins que rien. De toute façon, l’humanité toute entière n’était rien face aux évolués.

Sky avait compris certaines choses à propos de son don. Elle qui l’avait perçu comme faible et uniquement altruiste, elle le voyait maintenant plus fort que jamais. Elle avait réussi, pour la toute première fois de son existence, à tuer un homme de sang-froid. Dans un état d’esprit complètement différent, son état d’avant, la jeune femme aurait paniqué. L’idée même de détenir un tel potentiel destructeur l’aurait fait plongé, dans le meilleur des cas, dans une dépression profonde. Dans le pire des scénarios, elle serait devenue paranoïaque et probablement psychotique. L’ancienne Sky aurait pleuré toutes les larmes de son corps jusqu’à se dessécher de l’intérieur. Elle aurait paniqué, apeurée à la simple idée de pouvoir faire du mal à quelqu’un. Mais l’ancienne Sky n’était plus de ce monde. Telle une Juliette bafouée, elle était morte par amour. Voilà que la nouvelle Sky n’avait pour but que de tuer son cher et tendre Roméo.

Le pouvoir… Plus les ténèbres se dissipaient, plus la brune prenait conscience de son don. Elle regardait les ombres autour d’elle qui se faisaient de plus en plus petites, de plus en plus pâles et elle avait peur. Si ses capacités lui avaient été rendues grâce à l’éclipse, elle craignait qui ne disparaissent avec elle. Maintenant qu’elle avait compris, elle se sentait plus forte que jamais. Elle pouvait tuer… Une simple absorption de douleur suivit d’un transfert vif et rapide, peut-être même un peu amplifié, et le tour était joué. Elle était devenue invulnérable. Tout ce qu’elle subissait, elle pouvait le renvoyer. Elle était devenue la forte parmi les faibles. Elle était maintenant celle qui dictait les règles. Le monde allait jouer selon SA volonté. Rien ni personne ne pouvait l’empêcher d’être celle qu’elle était vraiment.

En se retournant, Symph vit qu’elle n’était pas seule. Oubliant en un éclair l’homme mort à ses côtés, la brune s’était avancée vers sa possible futur victime. Allait-elle se mettre à tuer tout New York ? Évidemment que non… Mais elle avait maintenant une nouvelle philosophie de vie : la Liberté. Par contre, la liberté a un prix. Tout le monde ne peut pas se la permettre. Symphony, faisant partie de l’élite de l’humanité, était de ceux dont la liberté est un dû. Elle avait le droit de faire ce qu’elle voulait. La nature l’avait choyé, non pas pour qu’elle se cache dans quelconque coin d’ombre en attendant la mort. Non ! Elle devait rééduquer l’humanité. Elle devait leur apprendre que des êtres supérieurs aux humains parcouraient la surface du globe et que les pauvres humains leur devaient respect et soumission. Cette campagne de rééducation allait commencer maintenant.

Quand elle s’adressa à sa spectatrice, lui demandant d’un ton arrogant si elle avait besoin d’aide, la jeune femme recula d’un air apeuré. Un sourire se dessina au coin des lèvres de l’évoluée. Ce simple geste, sans parole aucune, seulement une femme qui recule, disait tant de choses. Elle accompagna le tout d’un balbutiement, un simple « non » bégayé. Tout cela symbolisait la puissance de Symphony devant cette femme. Elle fit un autre pas vers la pauvre terrorisée. Celle-ci recula à nouveau puis s’affala sur le sol. Sky ne pu s’empêcher de rire de bon cœur, contraste macabre avec le tout récent meurtre.

« Oh ! Excuse-moi ma chère. C’est qu’il n’y a rien de plus drôle dans la vie que de voir quelqu’un tomber. Hahaha ! Tu m’a fait rire un bon coup, merci ! »

Son rire était franc, sincère. La jeune femme avait cette attitude de ceux qui savent que la partie est gagnée d’avance. Elle s’approcha et s’accroupie près d’elle. Elle se devait de l’instruire. Sky parla de sa voix la plus douce.

« Pauvre pauvre humaine… Si faible… Si vulnérable… Comme c’est joli. Mais n’aie pas peur, je ne te tuerai pas. Je vais t’éduquer. Relève-toi, humaine, et écoute-moi. La nature a créé des êtres plus puissants que les humains. Vous n’êtes plus au sommet de la chaîne. Les évolués sont là, et nous n’avons pas peur. Tu sais, moi, je suis une femme gentille. J’ai un bon cœur. Je n’aspire pas à tuer des gens, ou à les blesser. Mais si les humains me poussent à bout, il y aura des conséquences. Les humains nous doivent respect et soumission. Félicitation à toi ! Tu seras la première à te soumettre. Allez ! Soumet-toi ! Reconnais ta faiblesse ! »

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