Là où tout reprend [Eclipse] [PV Peter]

Angela venait tout juste d’arriver à New York. Elle venait de quitter l’aéroport, laissant derrière elle Lila Cruz. Plaçant sa main en visière au dessus de ses yeux, elle leva le regard vers le ciel. Eblouie par le soleil, le fragment de seconde durant lequel elle put l’observer lui suffit pour réaliser que déjà, le disque céleste se voyait amputé sur l’un de ses bords. Reportant son attention sur la jeune femme qui l’accompagnait, elle sembla quelque peu inquiète.

« Faisons vite, ça a déjà commencé. »

D’un signe de tête, la jeune rousse acquiesça. Prestement, elle leva une main en direction d’un taxi, tout en portant l’autre à sa bouche pour émettre un sifflement puissant entre ses doigts. Au son strident, Angela sursauta, puis d’un air critique désapprouva des manières qu’elle jugeait trop rustres pour une jeune fille. Pourtant, le chauffeur de taxi changeait déjà de direction pour se rapprocher des deux femmes.

« Pas la peine de faire cette tête là, celui qui m’a appris ça, c’est justement celui que l’on s’apprête à aller voir. »

Sans un mot, elles montèrent alors dans le véhicule. Angela communiqua alors l’adresse au chauffeur qui se mit en route. Ce fut dans le silence que se déroula le reste du trajet. Angela observait New York par sa fenêtre. Pourtant, elle semblait absente, l’esprit occupé ailleurs. Une forme d’anxiété pouvait se lire sur son visage, sans doute une crainte de ce qui l’attendait. De son côté, Mila observait également le paysage. Elle ne savait pas où porter le regard tant il lui semblait qu’il y avait de choses à voir. Dehors, elle pouvait également voir des gens tentant d’observer l’éclipse en tentant de se protéger derrière des lunettes spéciales, ou bien tout autre système fait maison. Puis, après quelques dizaines de minutes, le véhicule s’immobilisa, laissant ses passagers en sortir.

Angela passa devant, suivie de Mila. Machinalement, madame Petrelli s’assura que son chignon était en place, chassa une mèche de devant son visage, venant la bloquer derrière l’oreille. Une fois dans l’ascenseur, elle tira sur ses manches et sur les pans de sa veste, chassant d’inexistants plis sous le regard consterné de la jeune femme.

« C’est bon ! Détendez-vous ! Vous vous pointeriez en jogging qu’il ne vous en voudrait pas … après tout, vous êtes sa m-

- Ne parlez pas des choses que vous ne pouvez pas comprendre. Vous n’avez aucune idée de la relation que nous entretenons.

- C’est sûr qu’avec vous, ça doit pas être rose tous les jours.

- Pourquoi ? C’était rose tous les jours pour vous ? », répliqua immédiatement Angela d’un ton sec et acerbe.

Quelques secondes, le rouge monta aux joues de Mila. Elle semblait chercher une réponse tout aussi cinglante, mais l’ouverture des portes de l’ascenseur ne lui en laissa pas le temps. Sans lui en laisser d’avantage, Angela sortit de la cabine, s’engageant dans un couloir parsemé de portes d’appartements. Puis, elle s’arrêta devant l’une d’elle. Au dessus du bouton de la sonnette, on pouvait lire « Peter Petrelli ». Angela approcha le doigt, hésitante, avant de s’arrêter.

« Rhoooo ! Vous l’avez dit vous-même : ça a déjà commencé ! On s’est planté ! On a déjà du retard ! Poussez-vous ! »

D’un mouvement sec, Mila écarta Angela devant la porte avant d’appuyer avec insistance sur la sonnette.

« Il n’est pas sourd ! Inutile de rester ainsi le doigt dessus !

- Pas sourd, mais toujours lent à la détente pour ouvrir la porte ! Rappelez-vous que moi aussi je le connais. »

Finalement, la porte s’ouvrit, révélant un Peter Petrelli au visage traversé d’une balafre. Devant une telle vision, Angela ne put contenir un frisson qui lui parcouru l’échine, ni même s’empêcher de porter sa main à la bouche, tentant de dissimuler la tristesse et le choc d’une mère face à son enfant ainsi mutilé. De son côté, Mila fit un large sourire, ne semblant aucunement choqué par le visage du jeune homme. D’un mouvement preste, elle ouvrit en plus grand la porte avant de rentrer dans l’appartement.

« Salut Pet’, ça gaz ? Outch ! T’as une gueule d’enfer … j’pense que tu manques de sommeil, fais gaffe. »

Tout ceci, Mila semblait l’avoir dit sans aucune arrière pensée, mais avec la plus grande des sincérités. Se tournant vers Angela pétrifiée, elle fit une nouvelle fois une moue déconcertée. Puis, la saisissant par le bras, elle la tira à l’intérieur de l’appartement.

« Allez Angela ! Le temps presse. Excuse-la Pet’, elle s’attendait pas à … enfin, tu vois », dit Mila en montrant son visage par un mouvement circulaire de son doigt.

Devant son miroir, Peter se rasait. La lame parcourait ses joues, sectionnant touts les poils qu'elle croisait sur son passage et les noyant dans la mousse. Il ne s'était pas rasé depuis plusieurs jours, et avec sa balafre cela lui donnait l'air d'un voyou tout juste sorti de prison. Il était temps de se reprendre en main. Sa nièce avait besoin de son aide pour retrouver la mémoire, Sylar courait toujours et devait être arrêté... La soif insatiable de sauver le monde qui rongeait le cadet de la famille Petrelli ne cesserait de toute façon jamais, alors autant se faire plaisir et reprendre sa noble cause, même sans pouvoirs. Le danger que représentait son père avait été écarté, ce qui était une bonne chose pour l'avenir de la planète, mais le combat était loin d'être gagné.
Toujours devant son miroir, vêtu d'un jeans et d'une chemise sans manches, il s'empara de son peigne et coiffa ses cheveux vers l'arrière. Il prit du gel pour les maintenir en place et observa le résultat. Il avait eu l'occasion de voir sa version du futur et l'avait à vrai dire trouvé terriblement classe. Désormais, ce futur était devenu le présent. La cicatrice qui zébrait son visage faisait partie intégrante de lui, de son histoire, de sa personnalité. Il s'était pour la première fois battu contre Sylar sans avoir perdu l'avantage, même s'ils n'avaient pas leurs pouvoirs. Cela laissait un espoir dans l'esprit du jeune homme, l'espoir de triompher un jour contre le serial killer. Sortant de ses pensées, il remarqua soudainement que quelqu'un sonnait à la porte. Il y avait d'abord eu un coup bref, puis la sonnette ne s'était plus arrêtée, montrant l'impatience de la personne se trouvant derrière la porte. Peter s'essuya le visage et se dirigea vers la porte. Derrière le son strident qui emplissait en permanence l'appartement, il entendit des voix. Il y avait donc plus d'une personne. Qui pouvait donc lui rendre visite de si grand matin ?
Il ouvrit la porte et tomba nez à nez avec sa mère.

- Maman ? Qu'est-ce que tu fais là ?

Cette dernière, interloquée, porta une main à sa bouche et ses yeux s'emplirent de larmes. Il se rappela que c'était la première fois qu'elle le voyait ainsi mutilé. Il tenta tant bien que mal de la rassurer.

- Ne t'en fais pas, je vais bien tu sais. Sylar ne m'a pas loupé, mais je le lui ai bien rendu.

Après tout, une paire de ciseaux sous l'épaule n'était pas ce qu'il y avait de plus agréable comparé à une blessure superficielle au visage. Peter remarqua que sa mère n'était pas venue seule. Une jeune femme, fraichement sortie de l'adolescence, l'accompagnait. Le regard de celle-ci avait quelque chose de commun, comme un air de... déjà vu. Ce visage lui était familier alors qu'il ne l'avait pourtant jamais vu auparavant. Plus surprenant encore, cette fille semblait le connaître. Nullement surpris de le rencontrer, elle poussa la porte et entra sans aucune gêne dans l'appartement de cet homme qu'elle ne connaissait même pas... en théorie.

« Salut Pet’, ça gaz ? Outch ! T’as une gueule d’enfer … j’pense que tu manques de sommeil, fais gaffe. »

Bon, d'accord, elle connaissait son prénom. Cela n'était pas impossible si Angela lui avait parlé de lui. Mais pourquoi lui parlait-elle d'un ton si familier, et comme si elle le voyait tous les jours ? Intriguante, cette gosse. Elle s'arrêta cependant à mi-chemin et saisit le bras de Madame Petrelli pour l'inviter à la suivre. Peter ne connaissait aucune personne qui oserait faire un tel geste à l'égard de cette femme qui forçait au respect. Quel genre de gamine cette rouquine pouvait-elle bien être pour se permettre de telles familiarités ? Les deux femmes semblaient pourtant bien se connaître et Angela, encore boulversée par la vue de son fils salement amoché, entra dans l'appartement.

« Allez Angela ! Le temps presse. Excuse-la Pet’, elle s’attendait pas à … enfin, tu vois »

Peter l'attrappa par l'épaule et la fit pivoter sur elle-même.

- Attends mais qui t'es, toi ? On ne s'est jamais vus, alors tu peux m'expliquer ce que signifie tout ce cirque ?

L'atmosphère commençait à s'assombrir, bien plus que si de simples nuages venaient cacher le soleil. C'était plutôt comme si la nuit tombait... beaucoup trop tôt. Peter lâcha la rouquine et invita plus délicatement sa mère à entrer, posant une main rassurante sur son dos.

- Allez maman, entre, ne reste pas plantée là. Je suppose que tu as appris ce qui est arrivé à Papa ?

Il referma la porte et se dirigea vers le réfrigirateur pour y prendre de la limonade. Il en servit un verre pour sa mère, et un pour l'inconnue.

- C'était la seule solution, il a provoqué lui-même sa propre mort. Pour une fois, Sylar nous a tous sauvés. Mais ce n'est pas pour cela que je le laisserai tranquille, crois-moi. Je le retrouverai, et je le ferai payer pour tout ce qu'il nous a fait. Pour ce qu'il a fait au monde entier. C'est une ordure, et il ne mérite pas de vivre, surtout avec autant de pouvoirs volés à des innocents.

Comme à son habitude un peu trop emballé, il oublia l'essentiel. Il prit les deux verres de limonade et les apporta aux deux femmes, puis s'assit sur une chaise du salon.

- Alors, qu'est-ce qui se passe ? Ce n'est pas normal que tu viennes de si bonne heure, ce doit être important. Dis-moi tout.

Alors que Mila tirait Angela à l’intérieur de l’appartement, Peter saisit la jeune femme par le bras. Perplexe, il lui demanda qui elle était, et que signifiait toute cette mise en scène. La luminosité sembla soudainement diminuer, donnant à cette scène un air à mi chemin entre le mystique et le dramatique. Observant la pièce, Mila se mit à sourire avant de rajouter d’un air excité :

« Ouuuh … ça foutrait presque les chocottes cette ambiance. »

Peter reporta alors son attention vers sa mère. Il parla alors de la mort d’Arthur des mains de Sylar. Même s’il admettait que pour une fois le tueur avait fait une bonne action, Peter n’en restait pas moins motivé pour mettre un terme une bonne fois pour toute aux agissements du serial killer. Tout en fournissant ses explications avec sa fougue habituelle, il alla chercher de quoi servir une limonade à ses deux invitées. Silencieuse, Mila but une gorgée de sa boisson, sans cesser d’observer Angela. De son côté, madame Petrelli commençait tout juste à se remettre de ses émotions. Tenant son verre à la main, il ne le portant pas pour autant à ses lèvres.

« Peter … Il y a tant de choses à dire … ça m’est difficile, mais je me dois de te dire la vérité. »

Angela, les yeux rougis par la tristesse mais également par la honte, posa son verre avant de poursuivre. De son côté, Mila sembla prise de remord face à la détresse de cette mère, à sa culpabilité à présent qu’elle était confrontée à son fils. La jeune fille n’avait jamais vu sa coéquipière de fortune dans un tel état. Elle se surprenait pour la première fois à lui trouver une part d’humanité. Instinctivement, elle posa alors une main sur celle d’Angela, lui apportant silencieusement son soutien.

« Arthur n’est pas responsable de sa propre mort, ni même Sylar. C’est moi qui ai fait en sorte que leurs chemins se croisent. Je savais comment une telle association se solderait. Mais je ne voyais pas d’autres solutions. Arthur était trop … trop dangereux, trop arrogant et instable. Il était incapable de voir vers quelle catastrophe il nous menait. J’ai tenté de l’avertir, mais il ne m’a pas écouté. Pardonne-moi Peter, je t’en prie. Il fallait que je vous manipule, il fallait que j’épargne ta vie, que je te protège …

- Et justement, en parlant de ça Pet’ … il serait bon d’y aller mollo dans ta croisade contre … Sylar. »

L’idée de prononcer le nom du tueur à haute voix procura à Mila une étrange sensation. L’espace d’un instant, elle s’attendit à ce qu’une catastrophe ne se produise, une vieille habitude qui lui avait été inculquée. Mais rien de vint, mis à part une obscurité de plus en plus tenue. Subitement, Angela sembla se ressaisir. Sa voix se fit plus sûre.

« J’ai été envoyée dans le futur Peter, afin d’être protégée de ton père. J’y ai vu ce que l’avenir nous réserve, et cette fois-ci, ce n’était pas qu’un simple rêve. J’ai vécu ce futur vers lequel nous nous dirigeons. Ce que nous avons connu avec l’avènement de Pine Hearst n’est qu’une prémisse, un avant goût de ce qui nous attend. Le monde va être embrasé dans un conflit qui nous échappera totalement si nous n’agissons pas au plus vite. »

Angela se leva, se dirigeant vers la fenêtre. Levant son regard vers le ciel obscurci, à présent, elle n’avait plus vraiment de difficulté pour observer l’éclipse qui avait grandement progressée depuis l’aéroport, sans toutefois être encore complète.

« Et ça commence maintenant. »

« Angela, nous n’avons plus le temps pour les énigmes ! Il faut tout lui révéler maintenant et sans détours ! Je n’ai pas fait tout ce chemin pour échouer ! », accéléra Mila en se levant.

« Oui, je sais … »

Mila resta quelques secondes silencieuses, attendant qu’Angela fasse ses révélations. Mais rien de vint. La dame continuait de scruter l’extérieur. N’y tenant plus, la jeune fille se tourna vers Peter.

« Oh diable les papillons ! », pesta Mila.

« Bon, on va faire vite. L’éclipse qui est en train de se passer en ce moment va désinhiber les pouvoirs … Bref, d’ici quelques temps, tout rentrera dans l’ordre. Exit le virus, bye bye la normalité, re-bonjour les super pouvoirs. Le problème, c’est que le conflit entre la Compagnie et Pine Hearst a permis l’émergence de deux autres organisations. Et vu qu’elles n’ont pas les mêmes positions, ça va virer au drame, mais un drame genre planétaire. »

Bien entendu, devant une telle débâcle d’informations, il était compréhensible que Peter ait un peu de mal à suivre. Mila s’approcha alors de lui, le saisissant par les épaules et plongeant son regard dans celui du jeune homme.

« Ce que je veux dire Peter … c’est que tu vas mourir … et ça, elle ne le supporterait pas. On ne se remet jamais vraiment de la perte d’un être cher … c’est … »

Un instant, la jeune femme hésita.

« … c’est bokûtrop dur … »

L’atout lâché, Mila se retourna afin de se dissimuler de la vue de Peter. Discrètement, elle chassa une larme d’un revers de manche.

Ce fut un véritable tsunami d'informations confuses qui vint immerger l'esprit de notre pauvre Peter. S'il avait bien saisi les révélations qui venaient de lui être faites à l'instant, il y avait d'abord eu la responsabilité d'Angela dans la mort d'Arthur. Elle aurait manipulé diverses personnes à sa guise comme elle avait l'art de le faire, afin de changer une nouvelle fois le futur, de boulverser le cours du temps et de réduire à néant les projets funestes de son mari, désormais définitivement défunt. Mais c'était donc à cause d'elle que Peter se voyait maintenant marqué à vie par cette fameuse cicatrice. En effet, elle ne serait jamais apparue s'il avait toujours ses pouvoirs et s'il avait pu se régénérer grâce au pouvoir de Claire. Enfin, c'est du moins ce qu'il pensait. Si Arthur avait pris ses pouvoirs, il aurait pu se retrouver dans la même situation après tout. En tout cas, il n'en voulait pas à sa mère, et ce qui était fait était fait. Sa réaction prouvait d'ailleurs qu'il restait en elle de l'humanité. Elle n'était pas aussi forte qu'elle le laissait paraître, même s'il fallait une certaine rigidité morale pour soutenir sur ses épaules le poids de l'avenir du monde.
La petite rouquine, lorsqu'elle reprit la parole sans aucune gêne pour évoquer le nom de Sylar, sembla pour une fois perdre son insolence et son impulsivité. Elle se méfiait du serial killer, elle en avait peur. Peter se demandait une fois de plus qui pouvait bien être cette mystérieuse fille au regard si familier, aux longs cheveux enflammés.
Angela ne lui laissa pas le temps de fouiller dans les méandres de sa mémoire. Elle lui expliqua qu'elle revenait d'un séjour dans le futur. Comment était-ce possible, si tous avaient perdu leurs pouvoirs ? Une personne de l'avenir était-elle venue la chercher pour la protéger ? Quoiqu'il en fût, il semblait que le monde était une nouvelle fois en danger. C'est la jeune fille qui prit le relais dans les explications. Comme d'habitude, elle ne pouvait pas attendre. D'après elle, l'éclipse qui se passait à l'instant allait être déterminante. Elle était en train de déshiniber leurs pouvoirs... définitivement ? Comment tout cela allait-il faire revenir leurs dons ? Il n'en avait aucune idée, et cette partie du discours de la rouquine restait floue. Mais s'il en croyait ses paroles, il était à nouveau puissant. Ceci dit, il y avait un revers plutôt sombre à la médaille. La chute de la Compagnie et de Pinehearst aurait provoqué l'émergence de deux nouvelles organisations, à propos desquelles elle n'en dit pas davantage. Mais il semblait qu'elles pouvaient très bientôt prendre des proportions démesurées et se solder par une guerre à l'échelle planétaire. Dans un sens, cela intéressa fortement Peter. Il voulait sauver le monde, il allait être servi. Mais il devrait redoubler les efforts pour contrôler ses pouvoirs, ne pas se laisser guider aveuglément par la quête de justice et réfléchir. Réfléchir au camp dans lequel il allait se ranger, avec quelles personnes il allait s'allier, quels buts il allait combattre avec ferveur. Les choses se compliquaient considérablement et, comme un cheveu dans la soupe, l'annonce de la mort du fils Petrelli tomba au terme du discours de la rouquine. Elle semblait affectée à la fois personnellement et pour Angela, dont la tristesse croissante faisait peine à voir. Mais Peter ne sourcilla pas. Il se leva avec détermination.

- Ca n'arrivera pas, dit-il en s'adressant à sa mère plutôt qu'à cette rouquine dont il n'avait que faire. Maman, dis-moi juste comment je peux empêcher ça, et je le ferai. Je ne vais pas laisser de nouvelles organisations diriger le monde, nous avons trop souvent risqué de courir à notre perte. Il y a eu une fois où j'en fus le responsable.

Il se retourna et regarda dehors, sa silhouette se détachant dans la fenêtre donnant sur l'avenue. Dehors, l'atmosphère était devenue quasiment nocturne, comme si l'univers avait décidé de faire une sieste, une pause dans sa course effrenée. New-York était en suspend.

- Il est grand temps de réparer mes erreurs.

Alors qu'il prononçait ces paroles, il ne remarqua même pas que de petits éclairs couraient le long de ses bras, illuminant la pièce de petits flashes innofensifs. Il se tourna alors vers la rouquine, toujours debout avec son verre de limonade en main.

- Toi...

Il s'avança lentement vers elle et plongea ses yeux dans les siens. Tout à coup, il eut une vision très brève directement issue de l'esprit de l'inconnue. Un anniversaire. *Joyeux anniversaire Mila* *Félicitations pour tes 5 ans*. Des ballons, des invités. Et ses parents à ses côtés.
Le flash provoqua chez Peter un mal de crâne percutant, tellement violent que le jeune homme dut se tenir la tête à deux mains et un léger râle s'échappa de sa gorge. Le retour de ses pouvoirs ne se faisait pas de la manière douce, c'était sûr. Il tenta de surmonter sa douleur, sa surprise aidant. Il dévisagea Mila comme si elle était un extraterrestre.

- Non, ce n'est pas possible...

Il porta son regard vers Angela pour appuyer ses interrogations. Etait-ce bien ce qu'il pensait ? Il ne pouvait pas y croire.

- Pourquoi est-elle ici ? Vous allez briser le continuum espace-temps. Qu'est-ce que vous avez prévu pour la suite ?

Peter se dirigea vers sa mère. Sur son visage, on ne pouvait lire aucune rancœur. Au contraire, il rassura Angela, lui assurant que sa mort n’arriverait pas ainsi. Toujours avec la même détermination qui le caractérisait, il était prêt à suivre les indications de sa mère afin d’éviter le pire, afin d’une nouvelle fois, secourir le monde. Dans ses propos, on pouvait sentir qu’il se sentait en parti responsable des évènements passés. Cette culpabilité ne le quitterait surement jamais. De furtif flash lumineux émanèrent de son bras, brisant momentanément l’obscurité dense qui à présent s’était emparée de l’ensemble de la ville. Il se tourna ensuite vers Mila et s’approcha d’elle. Alors qu’il l’observait, son visage fut épris de surprise. C’était comme s’il avait vu un fantôme. A cet instant, Mila sut que Peter venait de deviner la véritable origine de la nouvelle alliée d’Angela. Alors qu’il se tournait de nouveau vers sa mère, il lui demanda pourquoi elle avait pris un tel risque en modifiant à ce point l’espace temps.

« Attends Pet’, c’était mon idée. Angela n’y est pour rien. Elle a bien tenté de me faire changer d’avis, mais elle a vite compris que face à moi, elle n’aurait de toute manière pas le choix », s’empressa de répondre Mila.

« Peter, j’ai longuement réfléchi avant de prendre cette décision, et je n’ai pas trouvé d’autre solution. Dans le futur, mes rêves étaient … vides. Ils ne me révélaient plus rien. Tu sais ce que ça signifie ?, poursuivit Angela avant de marquer une pause. Et bien cela signifie toute simplement qu’après, il n’y a plus rien. Tout s’achève. »

Mila saisit l’une des mains de Peter et la retourna. Du bout des doigts, elle effleura sa paume. C’était comme dans ses souvenirs, comme si elle avait fait ce geste hier. Il était exactement tel qu’elle l’avait connu.

« Je suis consciente de ce que je fais Peter. En modifiant l’espace-temps, je change le futur, c'est-à-dire que je change mon présent. Il y a de forte chance pour que je disparaisse, mais je suis prête à faire ce sacrifice s’il me permet d’accéder à une vie meilleur. Je sais que tu as compris qui je suis. »

La jeune femme lâcha la main de Peter et retourna s’assoir dans le canapé pour boire une gorgée de sa limonade. Pour tenter de chasser l’obscurité, elle alluma une lampe.

« Désolé si je t’ai semblé trop familière. Après tout, tu ne me connais pas … du moins, pas encore. Je m’appelle Mila Stound … tout du moins, c’est l’identité que j’ai adopté dans votre monde. En réalité, on me connait sous le nom de Lisa Dumont. Et oui, je suis ou serai la fille de Kerry et Alex … ça explique pourquoi je te connais si bien … et aussi pourquoi je peux me montrer un peu trop enthousiaste de te revoir.

- Pour limiter les dégâts, il serait préférable que ses parents n’apprennent pas la véritable identité de Mila. D’ailleurs, personne d’autre ne doit être au courant. »

D’un signe de tête, Mila acquiesça la recommandation d’Angela.

« D’ici peu, Claire, ta nièce va être victime d’un enlèvement. J’ignore encore comment, mais ceci va être un évènement majeur dans le déroulement de l’avenir. A mon avis, nous ne parviendrons pas à l’empêcher. Cependant, si nous pouvons la retrouver au plus vite, nous réussirons peut-être à en limiter les répercutions. Malheureusement, mes pouvoirs sont quelque peu perturbés par ces voyages dans le temps. Je n’arrive plus à vraiment savoir dans quel ordre ils vont se dérouler. Mais Mila peut nous aider. »

[Mille excuses pour mon retard mon Lelex <3]

Mila avait pris un énorme risque en débarquant dans son passé en compagnie d'Angela. Mais il semblait que cette dernière n'avait pas eu le choix, et Peter doutait que seule la détermination de la rouquine avait suffi à convaincre la matronne. Son pouvoir devait sans aucun doute y être pour quelque chose. Elle en avait un, c'était sûr. A moins d'un tour joué par la génétique, il était quasiment inévitable qu'elle n'hérite pas de pouvoirs de la part de ses parents. Si Alex (celui du présent) voyait ça...
Il semblait cependant qu'Angela était d'accord avec la proposition de Mila, en raison des rêves qu'elle avait fait dans le futur. Ceux-ci étaient pour ainsi dire inexistants, vides. C'était de mauvaise augure et pouvait présager qu'il n'y avait tout simplement pas d'avenir, en raison d'une enième fin du monde. Mais cette fois-ci, la mère de Peter semblait fatiguée, épuisée même. Elle devait être lasse de lutter vainement pour un monde meilleur, évitant une catastrophe pour tomber sur une autre encore plus grave. Rendait-elle le monde vraiment meilleur, ou était-elle la future responsable de sa perte ? Porter une telle responsabilité sur ses épaules relevait quasiement de l'impossible. Sauf peut-être si elle avait un soutien, un bras auquel s'accrocher si elle perdait pied.

Mila prit l'une des mains de Peter et carressa sa paume du bout des doigts. Elle était devenue une belle jeune femme, un peu plus jeune que le cadet Petrelli mais grande et déterminée. Dire qu'elle n'était encore qu'un embryon dans le ventre de Kerry... Mais si elle avait tenu le coup tant d'années, la fin du monde n'était pas pour tout de suite. Il y aurait certes beaucoup de boulot, mais avec de la volonté et de la persévérence, ils pouvaient arriver à changer le cours des choses. Rien n'était perdu.
Mila était prête à se sacrifier, mais Peter refuserait une chose pareille. Alex allait sûrement aimer sa fille de tout son coeur, jamais Pete' la laisserait disparaître, il était hors de question que son meilleur ami perde son enfant. Il n'hésiterait pas à la ramener d'où elle venait si ça pouvait la sauver, et il se débrouillerait seul avec Angela.
La rouquine finit par lâcher la main de Peter et retourna boire sa limonade. Elle alluma la lumière, provoquant un lancement douloureux dans le crâne du jeune homme. Il mit sa main devant ses yeux et détourna le regard. Dehors, cette atmosphère lugubre était plus agréable au regard. Mila confirma les soupçons déjà bien fondés de Pete', elle était bien la fille Dumont. Apparemment, elle aurait bien connu la famille Petrelli, ce qui expliquerait cette étrange familiarité à leur égard. Angela précisa que personne ne devait apprendre la présence de Lisa dans cette époque, et surtout pas Alex et Kerry.

- Ne t'en fais pas, tu peux compter sur moi, lâcha Peter presque automatiquement.

Son regard était toujours rivé dehors. Une averse récente avait parsemé la rue de flaques dans lesquelles les pneus des voitures pataugeaient, arrosant parfois l'un ou l'autre passant imprudent. Beaucoup de gens et de véhicules s'étaient arrêtés pour observer l'éclipse, avec plus ou moins de protection pour les yeux.
C'est alors que la révélation de l'avenir tomba des lèvres d'Angela, grave et solennelle. Claire allait être enlevée. Par qui ? L'une de ces deux nouvelles organisations, peut-être ? En tout cas, cet événement semblerait déterminant dans le tracé de leur avenir. Ceci dit, d'après la mère de Peter il était déjà trop tard pour empêcher le mal d'être fait. Mais il était impératif de retrouver la fille Bennet au plus vite. Pour l'heure, il ne fallait plus compter sur le don d'Angela, ses voyages dans le temps avaient rendu ses visions comparable aux pièces d'un puzzle complètement mélangées. Seule Mila pouvait éventuellement les aider. Mais Peter aussi pouvait voir l'avenir, le rêver ou le peindre.

- Attendez.

Il n'était pas sûr de pouvoir y arriver étant donné qu'il venait à peine de récupérer ses dons, mais il n'était pas inutile d'essayer. Il se dirigea vers son bureau et en sortit un bloc de feuilles ainsi qu'un crayon. Il retourna devant la fenêtre et ferma les yeux pour se concentrer. Il cherchait à retrouver cette sensation dans sa tête, dans ses yeux. Il devait se projeter plus loin, lever le voile obscur sur l'avenir, trouver les réponses. Il eut comme une absence prolongée, mais lorsqu'il rouvrit les yeux, il tenait dans ses mains un dessin qui ne lui plut pas du tout. Le cours du temps avait d'ores et déjà été modifié par Angela. Sur son croquis se trouvaient plusieurs personnes, dont Peter et la Cheerleader. Il y avait face à eux des êtres menaçants. Une femme entraînait Claire par la main pendant que d'autres personnes semblaient prêtes à se battre. Le lieu était méconnaissable sur cette simple esquisse, on pouvait juste deviner les protagonistes principaux. Le jeune homme tendit sa production à sa mère.

- Et maintenant, on fait quoi ?

Il prit une profonde inspiration et laissa glisser de ses lèvres une question qui lui brûlait depuis quelques instants.

- Comment vais-je mourir, dans l'avenir ?

Attentivement, Peter écouta chaque parole proférée par les deux femmes. Il avait pris conscience de l’enjeu. Une fois encore, l’échec n’était pas envisageable. Subitement, Peter se dirigea vers un bureau. Il se saisit d’une feuille de papier et d’un crayon. Quelques secondes, il sembla chercher de l’inspiration. Curieuse, Mila l’observa, sans réellement comprendre ce qu’ils attendaient tous. Puis, le regard du jeune homme se changea, comme s’il était atteint d’une soudaine cécité, un voile blanc venant de se déposer sur ses pupilles. Au même instant, il se mit à griffonner sur la feuille tel un automate. Une fois son œuvre terminée, il la tendit à sa mère, avant de demander ce qu’il convenait de faire à présent. Angela regarda longuement le croquis. La Cheer Leader y figurait, tenue au niveau du poignet par une femme, cette dernière étant visiblement en train de l’entrainer quelque part. Peter était également identifiable sur cette esquisse. D’autres personnages étaient présents, mais il était difficile de déterminer qui ils étaient. Ce fut la question de Peter qui sortit Angela de ses réflexions. Elle résonna tel un coup de tonnerre, serrant dans un étau glacial le cœur de la mère du new yorkais.

Discrètement, Mila se leva, rejoignant Angela. Elle voulait voir le contenu de la feuille, ayant deviné ce qu’avait fait Peter. Elle voulait laisser Angela répondre à la question du jeune homme, mais rien de se produisit. Un lourd silence plomba l’appartement.

« Peter … ça n’est pas pour tout de suite. Tout ça ne se produira que dans plusieurs années. Il n’est pas utile de se tourmenter avec ce genre d’histoire … Et puis, nous sommes là pour que ça n’arrive jamais. »

Mais au regard de Peter, Mila comprit rapidement que le jeune homme n’avait pas l’intention d’en rester là. Essayer de le dissuader de connaitre son destin était une pure perte de temps.

« Très bien … si tu y tiens tellement. », soupira la jeune femme.

Toujours aussi silencieuse, Angela retourna s’assoir dans le sofa, tenant toujours le dessin à la main, sous le regard de Mila. Décidément, la jeune femme n’était pas prête à jeter un œil sur cette fichue ébauche de l’avenir. Se mordant une lèvre de déception, elle reporta son attention sur Peter dont le regard entêté n’avait pas changé d’un iota.

« Ce sont des souvenirs assez flous pour moi, tout remonte à si loin. Je n’étais qu’une enfant, et je crois que mes parents ont embelli pas mal de choses pour tenter de me préserver. Claire kidnappée, j’ai cru comprendre que les deux organisations se sont faites concurrence pour tenter de la récupérer. Le conflit a dégénéré. Le monde a alors de nouveau reporté son hostilité contre les gens comme nous. Voilà dans quel contexte j’ai grandi. »

Quelques secondes, Mila regarda Angela qui à présent semblait regarder de manière fixe le mur en face d’elle, le dessin posé sur la table basse. C’était peut-être l’occasion d’y jeter un œil. Se rapprochant subtilement du sofa, elle poursuivit son histoire.

« Mais parmi tous ces conflits, il est une personne qui n’a jamais oublié ses véritables rancunes. Tu étais le numéro deux sur sa liste. Après s’être occupé de Claire, Sylar a donc reporté son attention sur toi … tu ne survivras pas Pet’ … désolé. »

A ce moment là, Mila quitta Peter du regard, tentant de voir le dessin. Mais à la fin de sa phrase, Angela se retourna vers les deux jeunes personnes tout en posant sa main sur l’esquisse. C’était une nouvelle fois raté.

« Mais ça n’arrivera pas Peter. Tu ne dois pas affronter Sylar. Mila, faites en sorte qu’il n’y aille jamais !

- Angela ! C’est votre propre fils ! Vous ne pouvez pas me demander de faire ça, s’offusqua Mila en foudroyant Angela du regard. Ce serait condamner son libre arbitre. Vous savez très bien que ça n’est pas la solution.

- Oui, je sais … mais j’aurai aimé le préserver, même à ce prix. Désolée Peter. », acheva Angela, quelque peu honteuse.

L’émotion d’une telle requête passée, Mila se tourna de nouveau vers Peter. Elle s’approcha de lui, oubliant pour un temps le dessin.

« Peter, promets-nous de ne pas y aller. Je sais qu’avec le pouvoir de la Cheer Leader tu te crois invulnérable … tu sais pourtant comment on tue les gens comme toi … alors je te laisse imaginer ce que ça a donné dans mon futur. Je n’ai pas été témoin de ta scène de mort … celle de mes parents un an plus tard a largement suffit pour me permettre d’imaginer du haut de mes quinze ans. »

Soulagée d’une certaine manière de pouvoir faire de telles confidences, mais également bouleversée de faire remonter de tels souvenirs à la surfarce, Mila lâcha un long soupir, détournant son regard humide de celui de Peter.

« Voilà, à présent, tu sais tout. Les seules choses que je sais sur l’enlèvement de Claire, c’est qu’un certain Kane y est mêlé, et qu'il se trame des choses du côté de Vegas. Est-ce lié ? Aucune idée. »

Angela sembla petrifiée face à la question de son fils. Elle restait là, debout devant le bout de papier, ouvrant la bouche mais sans qu'aucun mot n'en sortît. Mila s'approcha d'elle et tenta discrètement de jeter un oeil au dessin. Le bruit de ses pas retentit dans un silence pesant et interminable. L'atmosphère était tendue, on touchait à un sujet délicat. Mais cela n'arrêtait pas Peter, il voulait savoir. Il voulait connaître la vérité. La voix fluette de la rouquine finit par rompre l'embarras :

« Peter … ça n’est pas pour tout de suite. Tout ça ne se produira que dans plusieurs années. Il n’est pas utile de se tourmenter avec ce genre d’histoire … Et puis, nous sommes là pour que ça n’arrive jamais. »

Il n'était pas question de tourment, à vrai dire. Si Peter devait s'engager sur le champ de bataille, il devait prendre en compte tous les facteurs pouvant courir à sa perte. Il devait tâter le terrain et savoir dans quoi il s'engageait. Ce n'est que de cette seule manière qu'il arriverait à prendre l'avantage sur Sylar. Il lança un regard persistant à la fille d'Alex, lui intimant intérieurement :

* Parle, Mila. Dis-moi comment je vais mourir. *

La demoiselle soupira et se résigna.

« Très bien … si tu y tiens tellement. »

Peter n'eut pas le temps de savourer sa victoire par rapport à la réutilisation de ses pouvoirs. Sa mère se dirigea vers le sofa pour s'y rasseoir, toujours sans prononcer un seul mot. Son regard semblait perdu. Mila reprit alors ses explications.

Elle était encore jeune, très jeune. Il ne lui restait plus que des bribes de souvenirs, mais ceux-ci semblaient fiables et suffisamment ancrés dans sa mémoire pour ne pas être altérés par le temps, malgré le fait que ses parents aient tenté d'embellir les faits... ou plutôt de les rendre moins glauques.
Le kidnapping de Claire aurait provoqué une querelle entre les deux organisations émergeantes. Ceci était un atout potentiel dont ils pourraient tirer quelque chose, avec suffisamment d'ingéniosité. Mais il allait falloir gérer la dégénérescence de ce conflit qui allait apparemment tourner à la catastrophe. Si le monde apprenait l'existence de ces organisations, ils melangeraient tout et le chaos règnerait sur le monde. Ils seraient alors tous en danger, tous les êtres exceptionnels. Ils devraient vivre dans l'ombre et dans la peur, encore plus que maintenant où seul un groupe restreint de terroristes était réellement craint. C'est dans cette angoisse qu'avait dû grandir Mila. Cette pauvre enfant n'avait sans doute eu que très peu de moments de vie ordinaire. La scène d'anniversaire devait en faire partie.
De son côté, Angela avait posé le dessin sur la table et son regard était toujours perdu dans le vide. Sa protégée s'approcha à nouveau d'elle, ou plutôt du croquis.

C'est alors que le verdict tomba : maintenant que Sylar détenait le pouvoir de Claire, il allait s'intéresser à Peter et le traquer jusqu'à la fin. Jusqu'à ce qu'il obtienne sa proie. Etait-ce là le désir intarissable de tuer qui dévoirait à nouveau Gray, ou alors ce dernier avait-il envie de rencontrer un adversaire enfin à sa taille ? C'était une question à éclaircir, mais déjà une idée germait dans l'esprit du frère de Nathan. S'il devait éviter de s'attirer l'hostilité de Sylar, alors il en ferait son allié. Et ce n'étaient pas les appats qui manquaient. Des êtres suffisamment puissants pour semer le chaos dans le monde attiserait forcément l'intérêt du serial killer numéro un.
Pete' se demanda si Angela avait déjà réfléchi à tout cela. Il commençait à acquérir la clairvoyance et le don de manigance de sa mère. Il avait l'échiquier, il ne lui manquait plus qu'à bien déplacer les pions. Et tout tournerait à son avantage. Mais en guise d'assurance, Petrelli eut une seconde idée. Mais le manque de temps lui fera peut-être manquer de temps. Il aviserait, mais il n'écartait aucune de ses idées.

Angela sortit enfin de ses pensées, comme prise d'une soudaine panique. Ce qu'elle avait vu semblait vraiment l'avoir traumatisée.

« Mais ça n’arrivera pas Peter. Tu ne dois pas affronter Sylar. Mila, faites en sorte qu’il n’y aille jamais !

La rouquine fut choquée par un tel ordre de la part de la vieille dame. Elle ne désirait pas choisir à la place de Peter, ce qui soulagea ce dernier. Au pire, il arriverait probablement à contrer son pouvoir.
De toute façon, le cours des choses avait déjà changé, du moins dans l'esprit du jeune homme. Il avait mentalement d'ores et déjà changé de stratégie, et cela allait modifier pas mal de choses.
Angela s'excusa, honteuse d'avoir tenté de préserver son fils d'une telle manière. Mila se contenta d'utiliser la manière douce, et de prendre son ami par les sentiment. Elel voulait le faire promettre de ne pas retrouver Sylar. Puis une seconde révélation tomba : Alex et Kerry allaient être tués un an plus tard. Un frisson glacial parcourut tout son corps rien qu'à cette idée. Son meilleur ami allait mourir. Il devait à tout pris empêcher cela, et donc devait être encore en vie pour le sauver.
Mila poussa un long soupir, soulagée de s'être débarrassée d'un tel poids. Mais les choses sérieuses ne faisaient que commencer.

« Voilà, à présent, tu sais tout. Les seules choses que je sais sur l’enlèvement de Claire, c’est qu’un certain Kane y est mêlé, et qu'il se trame des choses du côté de Vegas. Est-ce lié ? Aucune idée. »

Peter réfléchit quelques instants. Le nom de Kane ne lui disait rien du tout. De même, il n'était pas du tout au courant de ce qui pouvait se tramer à Vegas.

- Très bien, dit-il sèchement. Même s'il est impossible d'éviter l'enlèvement de Claire, je vais faire un tour à Las Vegas. Mais avant, il faut que j'aille voir Sylar.

Avant que sa mère ne se lève, prise une nouvelle fois de panique, Peter lui indiqua d'un lever de doigt qu'il n'avait pas fini.

- Ce n'est pas pour ce que tu crois, maman. Il ne se passera rien avec Sylar, je peux te l'assurer. Par contre, j'aurai forcément besoin de votre aide pour retrouver Claire le plus vite possible après sa disparition. Appelez Noah Bennet, Alex et toutes les personnes dignes de confiance que vous trouverez.

Il partit dans sa chambre et enfila rapidement un pull, puis se dirigea vers l'entrée pour s'emparer de son imperméable noir.

- Restez ici tant que vous le voulez, passez tous les coups de fil qu'il faut. Je serai prudent, ne vous souciez pas de moi.

Il s'approcha de sa mère et de la fille de son meilleur ami, posant une main sur l'épaule de chacune d'elles. Puis il se dirigea vers la porte. Juste avant de quitter son appartement, il se retourna et d'une voix forte et déterminée, lança :

- Nous allons retrouver la Cheerleader, et nous sauverons une nouvelle fois le monde.

Quelques instants, Peter resta silencieux, réfléchissant aux possibilités qui s’offraient à lui après la révélation de toutes ces informations. Il avait bien compris que l’enlèvement de Claire était à présent un fait qui ne pouvait plus être empêché. La seule chose encore possible, c’était de limiter les répercutions qu’un tel fait aurait dans le futur. Commencer par Vegas lui semblait logique, se fiant à Mila. Pourtant, ce qu’il décida de faire avant de se rendre dans la ville du péché, provoqua une réaction unanime de la par des deux femmes. Il voulait rendre visite à Sylar. L’espace d’un instant, Lisa se demanda s’il avait réellement écouté ce qu’elle venait de lui raconter. Elle était presque furieuse qu’il ne tienne pas compte ce qu’elle venait de faire remonter à la surface, comme si une telle confidence n’était rien d’autre qu’une banale conversation sur la pluie et le beau temps. De son côté, Angela manqua de perdre connaissance, se ressaisissant de peu. Cependant, d’un geste du doigt, Peter fit en sorte qu’elle ne tente pas de l’empêcher. A l’en croire, il n’y avait rien à craindre d’une telle rencontre aujourd’hui. Cependant, il demanda à sa mère et à Mila de contacter toutes personnes susceptibles de pouvoir l’aider à localiser Claire.

Quelques minutes, Peter disparut dans sa chambre. A ce moment là, les deux femmes se regardèrent quelque peu déconcertées. A voix basse, Angela fustigea Mila.

« C’est de votre faute ! Maintenant réparez ce désastre et arrêtez-le tout de suite ! Libre arbitre ou non ! »

Mais déjà Peter ressortait, vêtu d’un pull. Se saisissant d’un imperméable, il informa ses visiteurs qu’elles pouvaient rester autant qu’elles le souhaitaient dans l’appartement. S’approchant d’elles, il leur déposa une main sur l’épaule, leur assurant que tout se passerait bien, puis, il s’avança en direction de la porte. Mila alla alors pour prendre la parole dans l’unique but de suivre la directive de madame Petrelli, mais d’une voix forte, le jeune homme l’interrompit, annonçant qu’ils allaient retrouver la cheer leader et une nouvelle fois sauver le monde. Transpirant d’assurance, la volonté de Mila fut comme sapée par tant d’aplomb.

La porte de l’appartement se referma alors derrière Peter, laissant Angela et Mila à présent seules. Soudain, la matriarche sembla perdre tout son sang froid, surprenant la rouquine par ce comportement si inhabituel.

« Pour l’amour de Dieu ! Mais qu’est-ce que vous avez foutu Mila ?! Pourquoi ne l’avez-vous pas arrêté ?! Vous avez conscience d’où il va à présent ? », hurla-t-elle.

La réaction de Mila face à une telle vague d’agressivité fut également inhabituelle au regard de son caractère. La voix hésitante, elle sembla bégayer dans sa réponse.

« Je … je ne sais pas … Je … je n’ai pas pu. Il m’a … je ne sais pas comment l’expliquer Angela.

- Je ne vous demande pas de l’expliquer ! Rattrapez-le et ramenez-le maintenant ! A quoi serviriez-vous si ce n’est le garder en vie ? Alors faites ce pourquoi vous êtes là ! »

Les larmes aux yeux, Mila laissa sa rage et sa tristesse s’échapper. Le barrage forgé par son caractère, forteresse apparemment imprenable, construite par tant d’années de souffrance et de chagrin semblait soudainement voler en éclat, mettant à nu une enfance perdue, une adolescence meurtrie et une jeune adulte sans espoir.

« Mais vous ne comprenez donc rien vieille bique ! La mort de Peter n’est pour vous qu’une éventualité, une probabilité ! Ni plus, ni moins ! Mais pour moi, oui, pour moi, Lisa Dumont, jeune New Yorkaise du futur ! Pour moi, la mort de Peter est un fait réel ! Tout autant que celle de mes parents ! Ce sont des faits qui sont liés à ma vie, à mon existence, des blessures gravées dans mon âme ! Des souvenirs indélébiles d’une vie gâchée et volée ! Et pourquoi ? Pour un crime que je n’ai pas commis, pour une raison qui m’est totalement étrangère ! Est-ce que vous pouvez le comprendre ça !? »

Surprise, Angela se retrouva sans voix devant une telle détresse.

« Alors si je suis là, ce n’est surement pas pour sauver Peter. Si je suis là, c’est pour récupérer ce à quoi j’ai droit, comme n’importe qui ! Une vraie vie ! J’ai confiance en Peter ! S’il dit qu’il ne craint rien en allant voir Sylar, je le crois. En arrivant à Miami, il y a quelques heures, je n’avais aucun espoir. Mais de le revoir, j’ai retrouvé cette chose essentielle à la vie. J’ai retrouvé l’espoir. Alors si vous voulez le ramener … démerdez-vous ! »

Toujours submergée par le chagrin, mais à présent également emplie de rage, Mila saisit sa veste et se dirigea vers la porte.

« Où allez-vous ? », demanda Angela.

« Faire un tour ! »

Claquant la porte, Mila disparut, laissant à présent, Angela seule.