Where do you go ? San Francisco, please ! V.2 [PV Caïn]

Il fallait se rendre à l'évidence, les preuves rapportées par le détective Roy Larys ne laissaient guère de place au doute. Asami était bel et bien vivante, bien portante et aurait acquis une réputation assez notoire au Japon en tant que chanteuse. Nouvelle fort surprenante, qui amenait une série d'interrogations supplémentaires auxquelles il n'y avait qu'un seul moyen de répondre : se rendre au Japon. L'adresse inscrite sur un post-it qu'il avait glissé tout au fond de sa poche de pantalon, Chris avait donc décidé de prendre ses affaires et se rendre à l'extrême ouest du pays. Il n'avait pas les moyens de prendre l'avion, et aurait préféré mourir que de demander un service supplémentaire à cette vipère d'Angela Petrelli, ou à qui que ce soit d’autre. Quant à Peter, il ignorait où il se trouvait, et de toute façon il n'allait pas encore une fois l'ennuyer avec ses problèmes. Il avait donc rassemblé ses dernières économies, assez rachitiques certes, et avait quitté la ville à pieds. Une sacrée trotte en somme. Alors qu'il arrivait en banlieue, où les habitations devenaient plus clairsemées et où les enfants pouvaient se permettre de jouer dans leur jardin sans s'exposer aux dangers du monde extérieur, Chris commença à ressentir une fatigue alourdissante dans les jambes. La douleur devenait de plus en plus envahissante, remontant bientôt jusqu'à sa colonne vertébrale, puis à ses épaules qui supportaient le poids de son sac. Il ignorait combien de temps il avait marché, mais la journée touchait déjà à sa fin et le soleil se vit adopter des teintes rougeâtres, prêt à entamer sa dernière course en direction de l'horizon avant de laisser place à la lune. Le fond de l'air commençait d'ailleurs à se refroidir sérieusement, ce qui n'arrangeait pas les choses. Alors qu'il rejoignait une grande avenue, l'Anglais se décida à faire de l'auto-stop. Il devait se rendre à l'évidence, il n'allait pas pouvoir continuer sa route à pieds. Malheureusement, les Américains étaient des gens plutôt méfiants et distants. Personne ne daignait s'arrêter pour prendre un jeune homme à l'accoutrement si particulier, vêtu de couleurs flashy et à l'allure assez débraillée. Chris n'était pas un mauvais garçon, mais il était vrai que son look était assez déstabilisant au premier regard. Ensuite, les gens qui le connaissaient s'y faisaient, et finissaient par ne plus y prêter aucune attention.

Les voitures continuaient de défiler inlassablement, certains conducteurs ayant déjà allumé leurs phares. De petits yeux mécaniques qui défilaient tranquillement sur les routes, tels des robots déposés sur un tapis roulant à grande échelle. Au bord de la route, Chris gardait désespérément son pouce levé, prenant garde de ne pas se le faire faucher au passage d'une voiture qui roulerait trop près du sentier piétonnier. Même le fait de maintenir son bras levé lui infligeait d’atroces douleurs. Alors qu'il passait devant une charmante petite maison au style modeste mais récemment retapée, un épagneul s'avança vers lui, remuant la queue.

- Désolé vieux, lui lança Chris comme à un vieil ami, je n'ai rien à te donner.

Le chien le regarda en inclinant la tête sur le côté, puis repartit dans son confortable petit foyer. Il ignorait la chance qu'il avait d'avoir une famille qui l'aime, une maison où il se sentait bien. Chris aurait donné n'importe quoi pour se retrouver entouré des gens qu'il aimait, dans un endroit qu'il pouvait qualifier de "chez lui", un foyer chaud et tranquille lui assurant une relative sécurité. Tout à coup, un mouvement attira son attention. Une voiture s'était arrêtée sur le bord de la route et l'attendait. Sans s'en rendre compte, il avait laissé le pouce levé en s'adressant au chien. Enfin, quelqu'un lui avait prêté de l'attention !
Ravi, il courut en direction du véhicule et se présenta à la fenêtre que le conducteur venait d'abaisser.

- Bonjour ! lâcha-t-il encore essoufflé. Je dois me rendre à San Francisco... Je sais, c'est vachement loin d'ici, mais je peux vous accompagner au moins pour un bout de chemin ?

De tout coeur, il espérait que le destin conduise ces personnes au même endroit. Un espoir presque utopique, d'un enfant qui n'avait jamais tout à fait grandi. Puis tout à coup, son sourire disparut pour laisser place à la surprise. Ce visage, cette expression fixe et inébranlable… Il ressemblait tellement à… non, impossible…

[Allez, je pars en Bretagne, mais je te laisse tout de même tout ça à lire. En espérant que tu aimes. Je sens qu'on va bien s'éclater dans ce road topic ! (Surtout que je sais pas d'où on part, mais San Francisco, c'est trèèèèès loin de New York. Ah et j'espère avoir réussi à faire quelque chose de cohérent par rapport à l'enquête de Caïn pour retrouver Chris xD).]

"Soyez réalistes : demandez l'impossible." [Ernesto "Che" Guevara]
"A cœur vaillant, rien d'impossible." [Jacques Cœur]
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~~Let Me To Introduce Myself, I'm A Man With Wealth And Taste... Pleased To Meet You, Hope You Guess My Name !~~

Enfin, il se rapprochait d'elle, enfin il se rapprochait de son meurtrier. Le puzzle commençait à se mettre en place, les pièces se rassemblaient enfin pour créer un ensemble cohérent. Cela faisait plusieurs semaines qu'il recherchait celui ou celle qui avait ôté la vie à Asami Barairo. Quelqu'un savait. Et il n'aurait de repos que lorsque le meurtrier serait retrouvé. Alors, quatre-cent-cinquante-et-un ans de connaissances en tortures diverses et variées s'abattrait sur lui comme une tempête violente et impavide et son âme et son corps souffriront une éternité d'agonie, soumis à son pouvoir, le tuant et le ressuscitant sans cesse, mettant du sel sur les plaies, rendant son esprit plus fou qu'il ne l'était déjà. C'est seulement lorsqu'il se serait lassé de ces tortures, seulement quand sa jeune victime ne pourrait même plus le supplier de la tuer, qu'alors, enfin, oui, seulement à ce moment-là qu'il se reposerait. Il allait lui apprendre le sens du mot "douleur", faire sentir à chaque petite cellule de son corps une souffrance si grande que la Shoa passerait pour une douce étreinte promulguée par un bisounours en mal d'amour. Les témoins étaient peu nombreux de l'incident qui s'était déroulé et après les avoir longtemps cherché, Caïn avait renoncé à les trouver un jour. Une seule piste restait. Celle d'un témon particulier. Quelqu'un qui était avec Asami à ce moment-là, un ami qui l'avait vu mourir. Asami Barairo n'était pas le genre de personne à se promener en solitaire dans les rues de New York et c'était sur cela qu'il fondait ses derniers espoirs de la voir un jour vengé. La piste fut extrêmement longue à remonter et Caïn dû faire appel à des trésors d'ingéniosité pour arriver à retrouver la trace de fameux ami.

Il choisit tout d'abord d'éplucher les mouvements qu'avait faite la nippone pendant ses derniers mois et trouva enfin un point discordant, quelque chose d'intéressant dans tout cela : elle s'était plusieurs fois rendue à une certaine université. Heureusement pour lui, Asami était loin d'être discrète quant à ses tenues et sa boutique était connue. Les témoignages l'aidant s'alignaient et c'est donc avec une facilité déconcertante qu'il se retrouva devant un Professeur de Génétique. Celui-ci lui confirma qu'elle était bien venue le voir et qu'elle avait d'ailleurs fait sensation. Il confirmait qu'elle n'était pas seul et que le garçon avec qui elle était avait aussi posé des questions intéressantes sur la Génétique. Cela se confirmait. Et le garçon était lui aussi un être à pouvoir. L'esprit analytique de Caïn ne mit pas longtemps avant de comprendre pourquoi Asami était avec lui : elle l'avait accompagnée parce qu'il était un être à pouvoir qui ne contrôlait ni ne comprenait son don, un débutant qui avait besoin d'être guidé par une personne expérimentée. En continuant à interroger le professeur, l'immortel eut enfin la dernière bribe de la trace que lui avait laissé inconsciemment Asami : le garçon avait un oncle qui aurait pu l'aider grâce à son savoir de la génétique. Tout se mettait en place. Le puzzle commençait à se fortifier doucement, à se voir rajouter des pièces supplémentaires. Le dessin final commençait à se montrer clairement dans l'esprit de Caïn. Les témoignages d'autres étudiants lui indiquèrent qu'ils étaient ensuite allés sur le toit tous les deux. A partir de là, sa trace se perdait. Cependant, l'homme aux mille noms, connaissant le caractère de la Japonaise, avait tout de suite conclu ce qu'elle avait fait et où elle s'était rendu par la suite. Elle avait sans doute hébergée le garçon pour mieux pouvoir l'aider, surtout que le Professeur avait noté son excentrique façon de se vêtir et son accent Anglais prononcé. C'était donc un étranger.

Il n'était jamais allé auparavant dans l'appartement d'Asami à New York et revit avec une nostalgie un peu étrange la vitre cassée, fruit des criminels qui avaient autrefois tenté de violer la candide Asami. Caressant celle-ci du regard, l'homme se retrouva enfin dans le fatras de feuilles et de livres de sa Rose, constatant grâce à son doigt que cela faisait nombre de mois que personne n'avait pris la peine de nettoyer. Son ami n'était donc pas revenu en ces lieux. Sans doute lui aussi avait-il sombré dans le désespoir de sa perte. Son regard s'attardait sur chaque détail de l'appartement, les gravant dans son cœur comme le reflet de son image aimée. Il tomba par hasard sur un dessin qu'elle avait fait de lui, extrêmement ressemblant -ce qui n'était pas dur vu qu'Ash lui ressemblait beaucoup. Avec une infinie douceur, ses doigts blanchâtres plièrent en quatre le papier jaunie avant de le fourrer dans une de ses poches. Pendant une journée, il réfléchit entre ses murs inconnus et pourtant si familiers. Pendant une journée, il prit finalement sa décision. Avant de quitter définitivement l'appartement pour n'y jamais revenir de mémoire d'homme, il rendit à la fleur qu'il lui avait donné tout son éclat d'antan et sa vitalité. Un dernier message pour elle... La suite fut bien plus dure. La piste devenait de plus en plus vague après l'Incident de Brooklyn et c'est avec une extrême difficulté qu'il comprit les intentions de l'ami d'Asami. Il voulait sans doute se rendre au Japon... Mais pourquoi ? Que s'était-il passé ? Où était le corps d'Asami ? L'image était encore brumeuse par endroits... Prenant une voiture de location, Caïn arpenta les routes pour trouver l'ami selon la description que lui en avait fait le Professeur. Heureusement pour l'ami d'Asami, l'immortel savait faire preuve de beaucoup de patience, tout autre personne l'ayant irrémédiablement éradiqué puis uriner sur son cadavre déchiqueté sous le coup de la colère à cause des loooongues, très looooongues heures de routes qu'il avait dû faire pour le trouver.

[Un mois pour répondre quasiment... Tu as raison, je suis le roi des glandus. ==" Allez, j'espère que tu aimeras ma réponse.]

"Il y a toujours deux raisons pour faire quelque chose : une bonne raison et la vraie raison !" [Dale Carnegie]
"Faites connaître vos décisions, jamais vos raisons. Vos décisions peuvent être bonnes, vos raisons seront certainement mauvaises." [Murray]
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La chanson continua pendant quelques temps avant de doucement s'arrêter, mais elle restait toujours dans son esprit, se rejouant encore et encore, mélopée hypnotique qui aurait pu le rendre fou si ce n'était pas déjà le cas. L'horizon se teintait des couleurs sombres du deuil, tandis que la voiture et ses deux occupants faisaient leur premier kilomètre. Bientôt la nuit viendrait manger le ciel et recracherai en une pluie de confettis lumineux les étoiles. C'est sous cette voûte étoilée que les réponses qu'il cherchait seraient enfin trouvées. C'est sous ce firmament doucement transpercé par mille et une épées de lumière qu'il saurait enfin si la folle et naïve hypothèse qu'il avait formulé dans un instant d'espérance s'avérait être vrai. C'est ce garçon qui détenait toutes les réponses. Lui qui avait passé du temps avec Asami avant qu'elle ne meurt. C'était sans aucun doute lui qui l'avait vu sourire pour la dernière fois. C'est lui qui avait assisté à son meurtre. Il devait savoir. En être sûr une bonne fois pour toute. Que cesse tout cette aliénation impossible. Que son cerveau arrête de questionner en vain, espérant, espérant, espérant sans cesse de la voir à nouveau apparaitre devant lui. Que ses plus sombres et noirs désirs puissent finalement être dirigé vers le ou les meurtriers. Que s'accomplisse la vengeance qu'hurle depuis si longtemps le Corbeau Croassant. Que tout finisse enfin, enfin, enfin... Caïn devait rompre cet éternel cercle vicieux que la mort de la nippone avait entrainé dans son esprit. Et s'il s'avérait qu'elle était réellement morte, la seule réponse valable était "ainsi soit-il", n'en déplaise aux personnes sentimentales. Son cœur vide avait trop longtemps été abreuvé de la boisson du soleil noir de la mélancolie. Cela devait finir.

Ses craintes étaient semble-t-il justifier. Même s'ils n'en avaient jamais parlé vraiment, la Japonaise avait dû comprendre depuis longtemps qu'il était immortel, un de ces hommes sans âges qui parcourent les époques pour faire face à la vacuité de l'existence et qui bataille contre lui-même -et pas contre d'autres personnes dans des concours de décapitation comme voulait nous le faire croire certains médias. Devant la gravité que représentait cette soudaine atteinte au mystère qui l'entourait -il était partagé entre torturer Chris, lui soutirer ce qu'il savait et jeter son corps sur le bas-côté ou simplement l'admettre dans le cercle fermé de ceux qui savaient son immortalité ; partagé entre la délicieuse tension et l'envie de se protéger- Caïn hésita à pouffer après coup devant l'embarras du jeune homme qui ne savait pas s'il devait le tutoyer ou non. Ce garçon parlait sans arrêt et avait apparemment lui-même un pouvoir. Il reconnaissait bien ce flot de paroles continu : le discours n'était pas structuré, pas maîtrisé, l'éloquence normale, la syntaxe orale douteuse... c'était le discours des mal à l'aise, des personnes qui essaient de noyer le poisson, de cacher quelque chose. Chris Miles semblait vouloir ne pas être totalement franc avec lui, d'éluder ce qui lui demanderait. Pourquoi cette soudaine attitude ? Pourquoi cette réaction-ci parmi tant d'autres ? De quoi avait-il peur ? Que la situation dégénère ? Que Caïn en vienne à lui extorquer les réponses ? Le jeune homme se trompait de méthode... L'esprit de l'immortel qui avait déjà tout abandonné, l'esprit du pluriséculaire qui s'était accroché à une vaine larme d'espoir qui était la présence d'un homme potentiel lors du meurtre d'Asami allait-il réellement le laisser simplement ne pas lui répondre ? Chris Miles n'avait simplement aucune chance de ne pas lui révéler ce qu'il savait. Et Caïn était prêt à utiliser tout ce qu'il pouvait pour le motiver...

Chris Miles se trompait sur un minuscule point : quoiqu'il fasse, la vérité éclaterait. Ce qui s'était passé ce jour-là n'était aucunement sa propriété et la réalité ne serait rester caché. Les vaines tentatives qu'il engagea pour que l'homme aux mille noms s'éloigne de lui se terminèrent par une dernière prise de parole balbutiante et maladroite, tandis que le doux manteau de la nuit enlaçait les frêles épaules du ciel. C'était maintenant à son tour de parler. Il devait lui révéler ce pourquoi il était venu, lui confier ce qu'il savait et son dessein. Faire éclater la vérité, être totalement franc avec lui. Seul le son ténu de la voiture se déplaçant habitait l'habitacle du véhicule, Caïn jouant sur l'atmosphère tendue que redoutait le jeune homme pour lui donner un simple avant-goût de ce qui l'attendait et pour lui montrer que l'immortel n'était pas dupe.

« Tu crois sincèrement que le fait que l'homme dont Asami t'avait parlé, par le plus grand des hasards, prenait cette route au moment précis où tu avais besoin d'un chauffeur ? Allons, ne te fais plus idiot que tu ne l'es. Je te cherchais, j'ai des questions à te poser. Et tu vas y répondre, Chris Miles. »

Le ton de sa voix était neutre, mais la menace n'était même pas voilée. Il n'avait pas de temps à perdre et surtout, il ne comptait pas faire preuve de patience. Selon sa coopération, le jeune homme pourrait se retrouver "Échec et Mort". Se rendant bien compte qu'il n'était pas responsable, il reprit, dans un essai de simulacre de douceur :

« Je t'ai cherché parce que tu connaissais Asami. Tu es la dernière personne à l'avoir vue en vie. Je n'ai découvert ton existence que parce mon enquête m'a conduit à penser qu'il y avait un témoin du meurtre d'Asami, quelqu'un, un ami peut être, qui était avec elle à ce moment-là. J'aimerais que tu m'expliques ce qui s'est passé... S'il te plait, Chris. »

A son propre étonnement, son éternel masque d'insensibilité s'était brisé et les derniers mots de sa phrase avaient été murmuré, à peine audible, mais bel et bien réels, esquissant sa douleur. Rare moment.

« Et j'aimerais aussi, si ce n'est pas trop te demander, que tu me racontes ce que tu as vécu avec Asami. J'aimerais savoir comment elle était pendant les derniers moments de sa vie... Pardonne mon indiscrétion et... mon manque de patience vis à vis de cette histoire. »

Ton neutre encore.
Mots et paroles plus affectés également.
La nuit serait longue.

La tension était tellement palpable qu’elle semblait s’engouffrer dans les voies respiratoires de Chris, l’entrainant dans une suffocation purement nerveuse. Malgré ses efforts pitoyables de se tirer du pétrin dans lequel il s’était mis tout seul, son interlocuteur semblait imperturbable, il devenait tout simplement impossible de détourner son attention vers des sujets moins délicats. Il était déterminé, et ne comptait pas se laisser leurrer. Le ton qu’il employait était aussi aiguisé et précis qu’une lame de katana manié par des mains expertes. De sa voix glaciale et sans faille, il avait un don naturel pour impressionner par son discours pourtant très peu grandiloquent. Il employait les mots justes, mais n’avait pas besoin de longues argumentations pour se montrer convainquant. Oui, Chris allait devoir lui répondre. Il n’avait plus d’autre choix, sinon d’ouvrir la porte et de sauter de la voiture avant de s’enfuir en courant. Il commençait à regretter d’y être entré. Une nuit de marche ne l’aurait pas tué, et quelqu’un d’autre aurait fini par le prendre en auto-stop. De toute évidence, Caïn n’était pas tombé sur lui par hasard, même s’il avait tout de même eu de la chance de le croiser avant la tombée de la nuit. Tout comme Chris, il cherchait des réponses, il voulait réagir à sa manière à la mort d’Asami… mais de toute évidence, il ignorait l’essentiel. Elle était toujours en vie. Il parlait d’elle au passé, ce qui balaya tout doute de l’esprit du jeune homme. Il voulait en savoir plus sur le meurtre de la nipponne, il désirait connaitre tous les détails de cet acte si affreux que personne ne pourrait jamais comprendre pourquoi il avait été commis. L’éternel changea même de temps, la requête semblant particulièrement importante à ses yeux. Chris ne s’attendait pas à entendre un « s’il te plait » sortir de cet être à l’air inébranlable. Malgré ses apparentes menaces, il semblait également affecté par la disparition d’Asami. Ce ton adouci réconforta quelque peu Chris, mais il ne serait pas facile de ressasser les souvenirs douloureux du jour où il avait cru perdre celle qu’il aimait à jamais.
Pire encore, il désirait savoir ce qu’ils avaient vécus ensemble, les mois précédant le tragique incident. Des moments qui semblaient tellement intimes aux yeux de Chris… comment arriverait-il à les partager à quelqu’un d’autre ? Ces questions étaient lourdes d’implications, il en avait conscience. Il prit une profonde inspiration, serrant sa main gauche à l’aide de la droite pour cacher un tremblement naissant. Il n’avait jamais parlé à personne de ce qui s’était passé ce jour-là.

- Ce… ça s’est passé à Brooklyn, tout près du pont. Elle s’y était rendue pour aider des sans-abris et des victimes de l'explosion. Vous la connaissez, elle avait le cœur sur la main.

Il avait du mal à parler d’elle au passé. Il s’était tellement refusé de croire à son décès qu’il n’avait même pas été surpris de la savoir en vie. Son plus grand étonnement venait de ce qu’elle était devenue. Et de la personne qui l’accompagnait dans sa nouvelle vie, Galadriel. Il reprit son récit avec une peine non dissimulée.

- Il y avait aussi deux personnes, deux spéciaux… Je ne sais pas ce qu’ils faisaient là, je suis arrivé trop tard. La première était une gamine qui manipulait des espèces de fils, une fillette aux cheveux bruns, mais avec un regard tellement glacial qu’il en était flippant. Elle avait un grain, c’est sûr, et son pouvoir ne jouait pas en sa faveur. Le genre à avoir buté ses parents, c’est pour vous dire… Elle s’appelait Gabrielle Stanton, un nom que je n’oublierai jamais. C’est elle qui a blessé mortellement Asami.

Il tourna sa tête vers l’extérieur. Dans le reflet de la vitre, il observait avec mélancolie la larme qui coulait le long de sa joue.

- L’autre, c’était un type avec des cheveux mi-longs et un chapeau. Il n’a pas touché à Asami, il l’a juste fait disparaître dans une espèce de… portail. Je ne suis pas sûr qu’il voulait lui faire du mal. C’est à moi qu’il s’en est pris, il m’a tabassé… il… comme si j’avais besoin de ça dans un moment pareil. Mais la douleur physique n’était rien à… désolé…

Il sentait sa gorge se nouer. La réémergence de ces souvenirs lui était terriblement douloureuse. L’expression « remuer le couteau dans la plaie » n’avait jamais aussi bien porté son nom qu’à cet instant précis. Peut-être que raconter les mois qui ont précédé cette tragédie l’aiderait à oublier temporairement son chagrin.

- En tout cas, je peux vous assurer qu’elle a connu le bonheur, du moins partiellement, avant… avant que tout cela n’arrive. On était bien ensemble, même si on avait chacun nos démons. Elle regrettait ce qu’elle avait fait pour la compagnie pour laquelle elle avait bossé, celle qui était dirigée par le vieux de Peter Petrelli, vous voyez… Ca la perturbait pas mal. Mais j’avais aussi mes problèmes, et on se consolait en quelque sorte. Elle m’a appris à apprivoiser mon pouvoir. On a passé des moments inoubliables ensemble. Mais ça semble tellement lointain, à présent… Elle était si jeune, et enfin heureuse… Elle ne faisait jamais de mal à personne. Pourquoi faut-il que ce genre de merdes arrive à des gens comme elle, hein ?

Question purement rhétorique, dont il n’attendait aucune réponse. Il n’existait pas de raison pour tuer, selon lui. C’est ce qu’Asami lui avait appris, même si cette idée avait toujours veillé silencieusement tout au fond de lui. S’essuyant la joue, les yeux encore rouges, il se tourna vers Caïn, davantage concentré sur le récit que sur la route. Il avait du mal à voir son expression, la nuit étant complètement tombée. Il ne voyait son visage que par l’intermittence des faibles lueurs orangées des lampadaires. Cependant, Chris avait deviné les intentions de l’immortel.

- Vous allez venger Asami, n’est-ce pas ? C’est pour ça que vous vouliez me retrouver. Je suis le seul à connaître les responsables. J’y ai pensé moi aussi, j’avais ce désir de vengeance. Mais un part de moi s’y refusait… c’est l’héritage qu’Asami m’a laissé. Je suis un peu comme elle, à présent. Mais vous… je sais que vous en seriez capable. Non pas que vous ayiez une tête de psychopathe hein, ne vous méprenez pas. Ce que je veux dire, c’est que vous savez ce que vous faites, et le rôle que vous avez à jouer. Asami m’a dit un jour que vous lui aviez sauvé la vie à plusieurs reprises. Mais là, il est trop tard… alors vous allez faire payer sa meurtrière.

Même s’il pensait avoir deviné ses intentions, Chris savait très bien qu’il n’avait pas cerné la personnalité de cet homme étrange. Asami lui disait souvent qu’il apportait plus de questions qu’il ne donnait de réponses. Un esprit aussi complexe n’était pas des plus aisés à comprendre, surtout avec une vision de la vie aussi simpliste que celle de la nipponne. Caïn était un mystère à lui tout seul.

"La vengeance est une justice sauvage." [Francis Bacon]
"L'amour passe, paraît-il, mais la vengeance ! Ah ! Le temps la rend plus belle et plus terrible !" [Roberto Assagioli]
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Son ton, ses mots l'avaient finalement atteints. Tour à tour glacial, menaçant puis sensible et presque touchant, tour à tour cruel et brisé, l'immortel avait su rompre l'idée saugrenue de Chris Miles d'éviter les sujets importants. De le persuader de dévoiler la vérité sur ce qu'il s'était passé. Oui, il savait que cela le ferait souffrir. Il savait que cela allait rouvrir d'anciennes blessures qui cicatrisaient à peine, qui le meurtrirai à nouveau. Mais pour lui qui n'avait aucune réponses et qui avait dû lutté pendant tout ce temps en se demandant ce qui lui était arrivée, pour lui qui ne savait rien et qui avait cherché en vain, la souffrance que pouvait ressentir le jeune homme était insignifiante et ne ressemblait qu'à une vague et grotesque imitation du costume du deuil. Les sentiments de son compatriote lui étaient presque étrangers et c'est avec une cruauté silencieuse et avide que Caïn attendait d'entendre le récit du témoin. Peu lui importait les états d'âmes de ceux qui savaient tout, seul comptait à présent la Vérité et son message, ce pourquoi il avait fait toutes ses recherches, ce pourquoi il avait tant lutté avec l'idée qu'elle était morte, ce pourquoi il était ici, à conduire une voiture louée sur une des nombreuses routes du pays. Il n'avait après tout cure des problèmes existentiels et sentimentaux de son interlocuteur, tout enfermé dans la spirale de vengeance et de rancœur -émotions grisantes, violentes et brûlantes de passion dans l'horizon hivernal qu'était son cœur- dans laquelle il était, aspirant obsessionnellement à savoir ce qui lui avait été caché jusque là. Laissant enfin s'engouffrer un peu de la triste folie qui l'habitait, l'immortel attendait, impassible, mais les yeux d'une gourmandise répugnante et insatiable figé sur Chris Miles. Ses oreilles étaient là, frémissantes d'envie, pouvant enfin savourer un repas bien mérité.

Et les mets furent comme il l'avait tant espéré, délicieux. Pleins de saveurs inconnues et douce-amères, qui exaltait en son cœur l'opéra tonitruant de la vengeance. Tout d'abord, il évoqua le lieu de sa mort et aussi la raison qu'elle avait d'être à cet endroit à ce moment-là. Fidèle à elle-même et à ses convictions, elle aidait les sinistrés de Brooklyn du mieux qu'elle pouvait. Comme toujours, elle était la pâle lueur de l'espoir dans les ténèbres insondables, mais cette fois-ci, aider ces personnes lui avaient coûté la vie. Témoins passifs, ils n'avaient fait que la regarder mourir, leurs esprits devenus lâches après le sinistre qui les avait frappé, n'aidant pas leur sauveuse, ne faisant pas un minuscule acte de bravoure. Certains avaient regardé même. Sans rien faire. Sans rien dire. Sans rien voir. Pathétiques statues de guimauves brûlées, inefficaces et inutiles. Puis, enfin, l'immortel apprit qui était ses cibles, qui était les coupables. Ses yeux s'écarquillèrent pendant une fugace seconde, non pas à cause de la surprise, mais plutôt du coup que venait de lui adresser le Destin. Cruel et moqueur, raillant ses grotesques efforts pour regagner quelque peu son humanité, se jouant de ses représentations théâtrales et de sa facette de comédien, le frappant en plein cœur, un sourire torve et sinistre sur son visage. Exultant de cette ironie maligne. Riant de son désarroi. Lui crachant au visage. Son âme était inconsolable. L'assassin, le terrible assassin qu'il recherchait n'était autre qu'une enfant qu'il avait croisé, n'était autre qu'une enfant qu'il avait voulu guider. Comme un fantôme aux yeux voilés par une meurtrissure inguérissable, il se tourna et regarda le reflet de Chris qui pleurait, qui ne le voyait pas, sa vision obscurcie par ses souvenirs. Et alors qu'une larme roulait sur sa joue, les yeux de Caïn restait sec de toute activité lacrymale. Mais son propre trouble ,lui, était bien présent et même si elles ne se voyaient pas, elles étaient bien là.... ses larmes invisibles...

A la terre entière, à la face du monde qui l'accablait, il aurait voulu crier, plein de rancœur contre lui-même, plein de désespoir, « C'est ma faute ! », mais nul son ne sortit de sa bouche, tandis que Chris continuait son récit et évoquait un deuxième coupable qu'il ne connaissait pas. Sa gorge se serra et le pluriséculaire retrouva sa contenance habituel, se maîtrisant et transformant peu à peu sa tristesse et son désespoir en rage et en colère. De biens tristes remèdes pour son mal... Oui, c'était inutile de se lamenter, de pleurer, de désespérer. Cela ne l'aiderait pas. Cela ne la ramènerait pas. Maintenant après tout, il savait. Maintenant, il avait des visages, il avait un nom... Sa vengeance n'était plus très loin. Le Corbeau croassait sur son épaule, appelant à la rapidité et à la brutalité. Métaphore noirâtre de ses plus sombres desseins, il lui semblait que le volatile s'était rapproché et que désormais, tous les deux tendaient vers leur sanguinaire but commun. Chris Miles accéda ensuite à sa seconde requête, qui serait sans doute pour lui aussi douloureux que l'avait été son témoignage du meurtre d'Asami. Douloureux et agréable à la fois. Avec l'étudiant, Asami avait pu enfin vivre une vie plus juste, plus "normale"... Il écouta le récit avec attention. Il dévoila des choses qu'il n'aurait jamais pu connaitre, des choses qu'Asami ressentait et qu'un autre l'avait aidé à surmonter. La Japonaise fut la confidente de l'Anglais et inversement. Elle lui confia ses regrets et lui ses problèmes. Ensemble ils s'entraidèrent et finirent par créer une relation forte, une relation qui fut violemment brisée par Gabrielle. Ainsi pendant un temps fugace, elle avait su s'attirer la chaleur d'un être qu'elle aimait, bien différent du froid fantôme du passé qu'il était. Quelque part, il était reconnaissant à l'étudiant pour les moments qu'il avait passé avec la nippone...

Mais il lui en voulait de ne pas avoir su la protéger. C'était un sentiment sombre, égoïste, qui avait fait germer cette pensée en son cœur. Très vite il la chassa, indigne qu'elle était de figurer en ce moment dans son esprit, alors qu'il devait employer celui-ci à retrouver Gabrielle et à lui faire payer son meurtre ignoble. Nulle cachette au monde ne la protégerait de sa fureur... L'immortel n'écouta ensuite que distraitement ce qu'il considérait comme des simagrées et des banalités de la part de Chris, préférant se concentrer sur des informations ou des mots plus utiles qu'il aurait à délivrer. Se détournant de la vitre pour le regarder, le jeune homme énonça ce qu'il pensait des intentions de Caïn. Ce que le monstre n'avait cure. Peu lui importait l'opinion des autres. Leurs principes, leurs idéaux, leurs voies, tout cela n'était que grains de sables au vent devant la machinerie véloce et impavide qu'était sa volonté. Dans le désert de leur choix fades et faciles, il était un nomade pourvu d'une détermination qui n'avait pour objectif qu'une oasis lointaine, mais bien présente. Après plusieurs minutes où il resta focaliser sur sa conduite, Caïn consentit enfin à répondre, exposant alors clairement ce qu'il allait faire par la suite :

« Je n'ai jamais caché à Asami que je n'étais pas quelqu'un de bien. Que j'avais déjà tué. Que je continuerais sans doute encore... mais elle l'avait accepté. Ou peut être ne comprenait-elle pas réellement la portée de mes paroles ? Quoiqu'il en soit, je ne suis pas comme toi ou Asami. Je ne me berce pas d'illusions naïves et de grandeur d'âme. Peu m'importe ces fadaises... »

Il regarda fixement Chris du coin de l’œil, avant de continuer :

« Je sais seulement une chose. Elle ne méritait pas de mourir de la sorte. Je vais réparer cette erreur. Comme tu le dis toi-même, j'ai mon rôle à jouer... Certains doivent continuer à marcher dans l'ombre, pour que d'autres puissent être bercé par la clarté, Chris Miles. Asami et toi, vous n'avez pas à savoir ce qui va leur arriver. Tout cela ne regarde que moi... et mon talent. »

Un sourire sardonique et froid vint couvrir son visage en réponse à ce dernier mot. Un avant-goût subtile pour l'horreur. Un amuse-bouche pour le sang qui allait pleuvoir par barriques de litres. C'est avec un ton amer qu'il renchérit, plus pour lui-même que pour son interlocuteur :

« Oui, certains doivent plonger dans la fange pour que d'autres puissent marcher sur la berge... »

Fixant la nuit interminable devant ses yeux, voile obscur qui semblait éternel, Caïn termina par énoncer ses observations à Chris, son visage de marbre et sa voix glaciale restant immuables.

« Dis moi, Chris... tu ne rentres pas en Angleterre si je ne m'abuse. Tu te diriges vers San Francisco, il me semble. Or, je ne vois pas ce que tu vas y faire là bas... j'en ai conclu l'idée saugrenue que tu voulais te rendre jusqu'au Japon. La question que je me pose bien entendu est pourquoi... Chris Miles... pourquoi te rends-tu dans son pays natal ? Est-ce qu'Asami serait... vivante ? »

Un éclair traversa le ciel couleur onyx, illuminant le visage sombre de l'immortel et donnant plus de reliefs à ses yeux désireux d'entendre enfin, si oui ou non, il était fou d'espérer...

Chris n’était pas là pour juger Caïn, ni pour le juger de ses actes et opinions. Ce garçon était quelqu’un d’indulgent, voire baba cool, qui détestait dire aux autres ce qu’ils avaient à faire. Il avait déjà du mal à jauger ses propres actes, il n’avait nulle envie de se préoccuper de ceux des autres. Si Caïn désirait retrouver la gamine et lui régler son compte, c’était son choix, et cela ne regardait pas le jeune homme fluorescent. Le multi-centenaire avait peut-être mal cerné son passager en le croyant aussi naïf qu’Asami. Chris avait lui-même déjà éprouvé des envies de meurtres et de vengeance envers Angela Petrelli, et il l’aurait sûrement carbonisée si Alex Dumont ne l’en avait pas empêchée. Symphony avait elle aussi failli faire les frais de ses pouvoirs ravageurs. Plusieurs fois, il avait failli s’écarter du chemin qui longeait côte à côte celui de la nipponne, mais il semblait que le destin s’évertuait à le rappeler à l’ordre. Ce n’était pas une mauvaise chose d’ailleurs, il aurait eu du mal à la regarder en face s’il avait agi d’une manière qu’elle ne préconisait pas. Caïn avait pourtant réussi à se faire accepter tel quel par la Japonaise, mais c’étaient plusieurs centaines d’années d’expérience qui parlaient. Les relations que l’immortel entretenait avec l’espèce humaine avaient quelque chose de particulier, de différent des autres liens, cela se sentait dans ses paroles, sa gestuelle, son regard.
Chris eut même le sentiment étrange que le conducteur se délectait de la simple idée de faire couler du sang afin de purger le monde d’une personne impardonnable. D’une expression solennelle de deuil, il était passé à une soif avide de… oui, de mort. Cet homme assumait ce qu’il était, la voie qu’il avait empruntée, les actes qu’il avait posés. Telle était sa nature, et il n’avait pas peur ni ne s’en cachait.

Tout en gardant son regard posé sur la route qui se détachait d’un fond à l’encre de Chine, brisé uniquement par la lueur puissante et bien dessinée des phares, Caïn analysa les hypothèses possibles concernant le désir de Chris de se rendre vers l’ouest. Son raisonnement bien ficelé le mena même à la conclusion que le jeune homme tentait de se rendre au Japon, et qu’Asami était peut-être en vie. La situation était délicate… à tout moment, le fil ténu qui les unissait en une relation de confiance approximative pouvait se briser, et la situation se retournerait contre Chris. Ce dernier sursauta lorsqu’un éclair zébra le ciel, illuminant les yeux ténébreux de son compatriote. Même s’il ne risquait rien grâce à son pouvoir, le jeune Miles n’était pas très rassuré en la présence de cet homme aussi mystérieux qu’imprévisible, doté d’une intelligence déstabilisante.

- Je suis comme vous, M’sieur Caïn, je cherche des réponses aux questions que je me pose. Ces dernières semaines m’ont appris à ne plus me fier à la parole des gens, que tout pouvait s’avérer n’être qu’un énorme mensonge… même votre propre vie. C’est pas facile à avaler, alors je me débrouille pour découvrir la vérité par moi-même. Mais si je découvre des choses intéressantes là où je vais, je peux vous tenir au courant.

Rien de ce qu’il venait de dire ne s'avérait relever du mensonge, et il en retirait une certaine fierté. Comment être sûr que ce détective douteux engagé par Angela Petrelli n’était pas l’une de ses nombreuses supercheries afin de manipuler Chris, ou de s’en débarrasser ? Pourquoi se découvrirait-elle tout à coup de bonnes intentions, comme celle de se faire pardonner des atrocités qu’elle avait pu commettre par le passé ? Le garçon n’avait absolument aucune confiance en elle, et il voulait se rendre au Japon pour en avoir le cœur net, pour se permettre de se réjouir s’il trouvait Asami. C’était un espoir fou, mais ça n’en demeurait pas moins un espoir tout de même. Si la Japonaise était en vie, Caïn avait le droit de savoir. Il semblait tenir énormément à elle, et même s’il agissait différemment de Chris, utilisant la vengeance et sa soif de sang, il était l’un de ses amis. Ou du moins, quelqu’un d’extrêmement important pour elle.

[i]Toutes ces émotions lui ayant donné soif, Chris se mit à fouiller son sac et en extirpa une bouteille. Cette dernière étant malheureusement vide, il se permit d’ouvrir la fenêtre et de laisser l’eau de pluie remplir le récipient. Le contact frais et pur de l’eau lui rappelait Asami, dont la douceur et la pureté n’avaient d’égal que son innocence. C’était pour cela, entre autres choses, qu’il aimait tant la matière aqueuse. Malheureusement, tout comme l’eau, la nipponne ne cessait de lui glisser entre les doigts lorsqu’il voulait la garder auprès de lui.

* * *

Le reste du voyage se fit dans le calme et sans embûche. Ils discutèrent encore un peu, puis Chris sombra dans un profond sommeil dont il n'émergea que plusieurs heures plus tard. Ils étaient presque arrivées. Une fois à destination, Caïn se gara au bord de la plage et laissa son jeune compatriote livré à lui même, face à l'océan. Il repartit d'où il était venu, tel un spectre dont il ne restait plus aucune trace, hormis le souvenir qu'il avait laissé gravé dans la mémoire de Chris. Leurs routes s'étaient croisées et décroisées tout aussi rapidement, mais au moins le jeune homme savait à présent qui était ce mystérieux personnage qui obsédait Asami : une personne effrayante, malsaine, à éviter à tout prix.

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