Sujet: † Réveil † { PV : Caïn Ezechiel } Sam 9 Mai - 17:29
« La mort n’est rien pour nous. […] Quand nous sommes, la mort n’est pas là, et quand la mort est là, c’est nous qui ne sommes pas »… Epicure, 300 av. J.-C.
Le noir… Il est si immense, si profond, si infini, si inerte, si immobile, si silencieux, si immortel, si diabolique, si infernal, si tortureur, si méchant, si sadique, si inoffensif, si pacifique, si calculateur, si savant, si cauchemardesque, si voyant, si omniscient, si puissant, si divin, si froid, si loin, si étouffant… Si noir… Il semble impossible de s’en échapper. Une fois qu’il nous a attrapé, il est partout. Il nous cerne. Il nous enlace. Il nous étrangle. Ses griffes s’enfoncent dans notre chair. On ne sait pas vraiment si nous sommes mort ou non. Peut être est-on sur le point de succomber ? C’est étrange car il paraissait que le Paradis était comme une grande lumière blanche aveuglante et céleste. Alors quoi ? Tout le monde n’a pas le droit au Paradis ? Mais l’Enfer est pourtant sensé être brulant et terriblement embrasé… Alors quoi ? Ce n’est ni l’un ni l’autre ? Déception… Finalement, tout n’est pas toujours tout blanc ou tout noir. Il existe et il subsiste des nuances de gris.
Le noir… Aucun son ne peut en sortir, et pourtant, il y avait parfois un simple « bip » provenant de nulle part. Cela pouvait faire penser à un sonar, à un radar, ou quelque chose comme ça. Un bip. Un autre. Encore un. Et ainsi de suite. Un bip à chaque seconde à peu près. Une horloge ? Peut être bien. Il y avait d’autres sons étranges. Elles étaient comme en arrière fond, silencieuses, discrètes, intelligibles, mystérieuses. C’était comme une sorte de dialogue mais dont la langue était inconnue. D’ailleurs elle ne semblait même pas humaine.
Le temps semblait éternel et le noir toujours aussi omniprésent. Seulement, parfois il se mit à être entre coupé de moment de lumière blanche mais légèrement voilé, peinant à filtrer entre deux volets. Des ombres blanches traversaient parfois ses lumières furtives et surnaturelles. Mais le temps était toujours aussi long. Le noir revenait toujours aussi rapidement. La vie. La mort. La haine. L’amour. Rien n’avait d’importance. Il n’y avait que le temps infini et le noir immortel. Il n’y avait que les questions quand et quoi. Qui peut être aussi, dans des moments de libertés extrêmes où les ténèbres relâchaient leur étreinte. Et encore. Mais ce n’était pas important. Ou du moins, l’importance était moindre. Il fallait et il suffisait pour le moment de sortir de cette prison obscure. Après s’être échappé, les questions secondaires remplaceraient les primaires lorsque ces dernières auront été résolues, et pour cela, l’échappatoire était la seule voie possible pour résoudre les énigmes interrogatives.
S’échapper. S’échapper… S’évader. S’évader… S’enfuir. S’enfuir… Se libérer. Se libérer… Tic… Tac… Tic… Tac… Tic…
Briser les chaînes semblait avec le temps, quelque chose de plus en plus inconcevable. Seul la mort peut nous enchaîner sans que l’on ne puisse jamais se libérer. Alors c’était bien la mort ? Ca fait cela d’être mort. Quelle déception ! En faite, être mort, c’est simplement ne pas être là. C’est simplement être devenu extérieur au monde. Un simple souvenir, et encore… On s’imagine souvent que lorsque l’on meurt, c’est la fin du monde, ou du moins on se demande comment il tournera sans nous. Ce n’est pas narcissique, c’est juste qu’on peut difficilement imaginer la monde des gens que l’on a connu sans nous. Alors on se demande ce qu’il ferait. Est-ce qu’ils continueraient à se promener dans tel ou tel parc ? Est-ce qu’ils changeraient de restaurant habituel pour leur déjeuner ? Est-ce que cela leur ferait bizarre de demander une place en moins au cinéma ? Hm… Pourquoi changeraient-ils leurs habitudes après tout ? Il n’y avait pas de raison. La mort n’est pas une fin en soi, elle ne l’est que pour soi.
Le noir… La seule chose de bien avec lui, c’est qu’il nous laisse réfléchir autant qu’on veut. Il n’y a ni faim, ni soif, ni fatigue… Aucun mal être. Il n’y a que la réflexion. La seule chose qui puisse nous harceler dans cette obscurité, c’est le temps. Le temps qui est parfois brisé comme des récréations par des bruits est des lumières. Des bips, des voix, des soleils blancs. On pourrait penser à des extraterrestres… Pourtant, il n’y avait pas de souvenirs ni d’alarmes, ni de prévention dans un champ de maïs, et encore moins de trio lumineux dans le ciel en pleine nuit. En tout cas pas plus que d’habitude.
D’habitude… D’habitude. Ce mot sonnait bizarrement. Comme lorsqu’on se rend compte qu’une chose dont on avait jamais douté l’inexistence, n’existe pas, et n’a donc aucun sens. Comme si un moine se rendait compte par lui-même que Dieu n’existait pas et que ça ne servait plus à rien de Le servir… « D’habitude ». Ce mot semblait traduire quelque chose de répétitif, et donc d’antérieur à maintenant. Mais dans ce noir, c’est comme si le maintenant était éternel. Il était sensé existé un présent des choses passées, un présent des choses présentes, et un présent des choses futures. Cependant, le futur semblait compromis, le présent éternel, et le passé… Le passé… Le passé. Comme le mot « habitude », la notion de passé semblait être un tas de cendre qui s’évapore avec le vent, ou bien emporté par le flux de la mer.
Il n’y avait pas de passé.
Mais il fut un moment, un vrai moment, un instant que l’on pouvait nettement distinguer des autres, où la notion de futur put prendre place. Juste la notion, car sans passé, comment construire un avenir ? Mais une fenêtre s’ouvrit sur le noir, il y eu comme une aspiration après que les bip se fasse insistant. Il n’était plus question d’un bip mais d’un « bipbipbipbipbip ! ». La lumière fut rapidement alors toute entière. L’échappatoire n’était pas seulement possible, elle était réelle.
Sa main saisit une jeune femme blonde en blouse blanche à la gorge. Celle-ci commença à suffoquer. Il la projeta contre le sol. Elle glissa sur le linot, se releva et s’enfuit. Une autre femme déboucha dans la pièce en criant de se calmer. Coup d’œil vers ses mains : noires et douloureuses. Le bip répétitif devint rapidement énervant. Un cri de rage. Une sensation de puissance, et l’appareil ainsi que les lumières explosèrent, cessant ainsi le bip agaçant. La jeune femme demanda une identité en tentant de ne pas se préoccuper du matériel. Il la saisit elle aussi à la gorge, la soulevant du sol. Ses yeux avaient un air horrifié, ils se fermèrent. Il lâcha la pression et elle tomba mollement sur le sol. Tâtant son visage, il sentit un tissu assez grossier dessus : des bandages. En allant sur la droite de son visage, il se rendit compte que le bandage était tombé. C’était douloureux. Il le remit rapidement en place en s’apercevant que l’intérieur était rougit par du sang.
Au moment où il sortit de la chambre, il tomba nez à nez avec un homme. Comme par réflexe, il lui décocha un poing. L’homme tomba immédiatement sur le sol, mais il avait à la main. En l’observant, il s’aperçut que la chair s’en allait aisément, mais pas la douleur.
Quoi qu’il en fût, il devait s’en aller, s’enfuir, disparaître. Une voix résonna dans son dos. Celle-ci lui demanda de s’agenouiller. Sans savoir pourquoi, il s’exécuta, tout en se retournant. C’était un homme vêtu de bleu foncé, casquette comprise, avec une arme de poing à la main. Il pensa alors que ça pourrait lui être utile. A côté de l’homme armé, la jeune femme blonde qu’il avait laissé s’enfuir. A son cou, la marque de cinq doigts l’avait comme marqué au fer rouge. Il regarda ses mains. Repensa aux machines dans la chambre. Jeta un coup d’œil à l’autre jeune femme toujours sur le sol qu’il voyait à l’intérieur de la pièce. Les mêmes marques sur le cou. L’homme juste à côté de lui, également allongé, toujours dans les vapes, une marque de brûlure là il l’avait frappé. Etrange.
Il regarda l’homme armé. Il le regarda profondément. Ses yeux brulés devenus jaune pénétraient sans peine ceux de l’homme. Plus il fixait, plus il paraissait paniqué. Cependant, quelque chose l’obligeait à rester ici et à maintenir en joug l’inconnu agenouillé aux bandages sur le visage. S’il fuyait, qui protégerait les gens ? Alors faisant son possible pour conserver son sang froid, il maintenait son arme pointée sur l’homme à genoux sur le lino bleuté. Cependant, plus les secondes interminables passaient, plus l’air se faisait de plus en plus lourd. Il commençait à suffoquer. Des flammes commencèrent doucement à entourer en cercle l’inconnu au visage caché. Puis d’autre naquirent sur les murs et les rambardes. L’homme aux yeux étrangement jaunes restait serein sur le sol, sans bouger. On aurait pu croire qu’il était mort.
Pourtant, c’est l’homme armé qui tomba. Il se leva alors, et se dirigea tranquillement vers le corps inerte sur le sol et saisit l’arme. Au moment où il s’apprêta à partir une bonne fois pour toute, un flash lui envahit l’esprit. Comme la lumière d’un appareil photo, l’image ne dura qu’un très court instant, si cours d’ailleurs, qu’il était impossible de le mesurer dans le temps. Mais de la même manière qu’un flash photographique laisse pendant quelques instants un voile vert ou bleu devant les yeux, celui-ci laissa dans l’esprit de l’homme une image bien nette : un visage blanc, des yeux cernés de noir, un sourire de l’ange bien rouge. Ce flash le força à mettre les poings aux tempes, gardant tout de même l’arme en main. Un souvenir. C’était un souvenir. Sans savoir pourquoi, il en était sûr. Il n’avait pas d’identité, même pas la sienne, il n’y avait pas de passé, mais il avait le souvenir d’un visage de clown. C’était un début. Il sortit du bâtiment.
Les bras ballant le long du corps, il déambulait dans la rue de manière plutôt hasardeuse. N’ayant plus de mémoire, il n’avait que son instinct pour lui servir, à la limite, de source de connaissance. Car des connaissances, il semblait en avoir quelques unes, mais de souvenir : aucun. Que pouvait il faire alors à part espérer de tomber par hasard sur le clown qu’il avait en tête. Alors il marchait, ou plutôt errait, un pistolet à la main, sans savoir où aller.
Etrangement, il était assez fatigué. Il n’était pas encore à bout de force mais il sentait peu à peu que ses réserves étaient grignotées. Sans parler du fait que la douleur le rongeait de partout. Toutes ces brûlures sur son corps le démangeaient et pourtant lui faisait extrêmement mal. Il aurait du mal à tenir jusqu’à la cicatrisation. La douleur le rendrait fou avant. D’autant plus que son physique serait sans doute à jamais endommager. Comment retrouver la personne qu’il était si son aspect physique avait disparu. Plus de visage, plus d’empreinte capillaire, plus d’empreinte oculaire, plus d’empreintes digitales… Il était personne.
Il s’arrêta devant un petit magasin dont la vitrine était uniquement occupée par des postes de télévision. Chacun diffusait une chaîne différente. L’une d’elle était une chaîne d’information. Celle-ci parlait d’un immeuble qui aurait subit de lourds dégâts matériels suite à des explosions à plusieurs étages. On recensait plusieurs dizaines de blessés, de morts, et de disparus. L’enquête était en cours, mais un des éléments intrigants qui avait attisé la curiosité de la police était le fait que le hangar comprenait plusieurs camionnettes blanches avec le logo de Primatch, une entreprise de papeterie. Cela pourrait être tout à fait bénin, sauf que l’entreprise en question était au Texas… L’homme devant la vitrine regarda le nom des rues sur les pancartes alentour. Ce n’était pas loin d’ici. Au moins il savait qu’il se trouvait à New York. Un pas en plus. C’était toujours ça. Il reprit sa marche.
Il marcha, marcha, marcha. Cela sembla aussi long que lorsqu’il était dans le noir. La nuit était calme et silencieuse. La pleine lune éclairait les rues sombres de tout son éclat argenté. Il marchait le nez en l’air, observant le ciel, fasciné par l’astre lunaire, son éclat immaculé et ses taches bleutées et circulaires. Mais sa marche rêveuse finie par se solder par une chute. Il venait de heurter une poubelle. Observant le bâtiment près duquel il était tombé, il vit un immense escalier montant jusqu’à des portes condamnées par des blanches de bois qui les barraient. Une vieille affiche collée sur le côté de l’escalier annonçait une représentation exceptionnellement en version française, avec des comédiens français de « Huis Clos ». La représentation était annoncée pour le 5 juin 1986 à 21 heures.
Les yeux de l’homme retombèrent sur vers le sol. De la poubelle était tombé un masque. Un masque entièrement, sans expression aucune. Il déchira un bout de bandage de ses bras et l’enroula autour de l’élastique pour ne pas que ce dernier lui coupe son crâne chauve brûlé. Il tira sur l’élastique, le passa derrière sa tête, et cala correctement le masque par rapport au pansement sur son visage. Se trainant sur le sol à l’aide de ses mains douloureuses, il alla s’adosser au mur dans la petite ruelle, sur le bâtiment voisin à celui du théâtre. Il regarda vers la lune. Il voyait à peu près bien au travers des trous pour les yeux. Il n’avait pas trop de mal à respirer non plus. Regardant sur le sol autour de lui, il pu dénicher un miroir brisé près d’une poubelle. Il observa ses multiples reflets. C’est la première fois qu’il voyait son visage. Il était bel homme. Il n’avait pas une ride, pas une cicatrice, il était bien rasé, et ce teint blanc ne dérangeait pas plus que cela. Le masque était toute fois un peu sale et légèrement ébréché en haut, d’où une fissure coulait jusqu’à la bouche en passant par l’œil droit. C’était déjà mieux que le bandage pensa l’homme. C’était plus élégant. Il allait devoir se trouver des vêtements maintenant, car la chemise grise à points verts et bleus, complètement ouvert dans le dos mis à part au niveau des deux boutons qui permettaient que la chemise ne s’en aille pas.
Des vêtements, un nom, une identité, un passé, des réponses…
Caïn Ezechiel ~~All Causes Shall Give Away : I Am In Blood~~
Nombre de messages : 1647 Age : 31 Pouvoirs : Contrôle cellulaire(=>Enzyme) ; Expérience ; Téléportation Côté Coeur : Il n'existe plus. Date d'inscription : 03/08/2008
:::Votre Perso::: Age du perso: 451 ans(apparence 23) Relations avec d'autres personnes: Voir Background Travail: Je n'aime pas le travail, nul ne l'aime ; mais j'aime ce qui est dans le travail l'occasion de se découvrir soi-même.(Joseph Conrad)
Sujet: Re: † Réveil † { PV : Caïn Ezechiel } Mar 2 Juin - 20:52
"Et Lazarus se releva"[Evangile selon Saint Jean; chapitre 11] "Lève-toi et marche."[Saint Marc 2; 1-12] ------------------------------------
~~And Lazarus Was Raised~~
L'homme avait décidé de sortir de sa monotonie quotidienne et de sortir pour une fois de chez lui. Depuis son entretien avec la Matriarche, il ne cessait de penser à cette organisation, aujourd'hui déchue, autrefois si glorieuse. Pourquoi était-il lui même parti ? Ses explications et son opinion qu'il avait exprimé devant elle ne contenait pas l'entière vérité. Plus que le fait que La Compagnie s'était éloignée de ses objectifs d'origine et qu'elle avait sombré dans l'hypocrisie la plus totale, l'immortel était parti car il n'avait plus rien à faire là bas. Lui qui avait vécu si longtemps, il ne pouvait s'empêcher de bouger, ce désir ardent étant sa plus fidèle malédiction. Comment nouer des liens avec autrui lorsque votre âme est tourné vers le voyage et que vous êtes un fringant vagabond solitaire ?
Cependant, il avait apprécié revoir son ancienne amie, qui avait répondu à ses demandes. Il avait contemplé pendant de longues heures son dossier mais plus précisément sa photo et son histoire. L'histoire qu'il s'était inventé une nouvelle fois, devenant Thomas Gireaud, franco-américain. Sa photo, antique perle de souvenir à la couleur jaunie lui rappelait cette époque féconde. Puis, finalement, il l'avait brûlé grâce à son briquet, le feu dévorant lentement son passif d'agent. L'immortel avait admiré le feu détruire la fragile paperasse, et tandis que le papier se consumait et disparaissait, que la peau de ses doigts se faisaient recouvrir de cloques et que ses ongles fondaient, il avait sourit. Simplement.
A présent, il se promenait sous la lumière d'un astre, jumelle et compagne du Soleil. La Lune. Comme son compagnon, elle étendait sa lumière diffuse sur toutes choses et tout êtres, donnant de cruelles ombres aux souris, aux poubelles et aux immeubles. Comme toutes les nuits, les mêmes lampadaires éclairaient de cercles lumineux la rue, faisant fuir les ténèbres partiellement. Et dans la nuit noir, nul bruit ne se faisait entendre à part le murmure du vent.
Une fumée éparse et tremblotante s'envola soudain vers le firmament. L'homme venait d'allumer une cigarette. La retirant de sa bouche grâce aux doigts de sa main droite, il expira une bouffée de nicotine et autres produits sous forme gazeuse, tout en continuant de marcher. Ses semelles résonnaient sur le béton, de concert avec le mugissement sylphide qui faisait frissonnait les vide-ordures ou tout autre être. Sauf un. Caïn continuait inlassablement à marcher, mais où pourrait-il aller ? Où aller à cette heure ? Où se rendre, où discuter ?
Peut être rencontrerait-il quelqu'un ? En cet nuit obscur et où nul étoile faisait irradier sa lueur. Peut être un autre vagabond solitaire se montrerait à lui et ils pourraient briser leur monotonie respective en conversant. Mais qui serait assez singulier pour sortir à cet heure ? Qui pourrait-il rencontrer ? Sera-t-il un Ivrogne, un Saltimbanque ou un Fou ? L'homme écrasa la cigarette allumée et fumante dans sa main, noyant dans les replis de sa peau le feu. La blessure se refermant en même temps que le pâle mégot était mis à bas, trônant désormais sur un trottoir quelconque, égaré parmi d'autres. Les yeux du meurtrier regardèrent sa silhouette tandis qu'il passait devant la vitrine d'un magasin, où l'on voyait le traditionnel rideau de fer interdisant la voie aux bandits et aux voleurs.
Tournant donc à l'angle de la rue, il déboucha sur une autre des rues désertes de la Ville-Qui-Ne-Dort-Jamais. Pourquoi ce nom s'il était le seul debout à cette heure tardive ? Il savait que jadis, il y a une trentaine d'années, il était venu dans cette même rue pour aller au théâtre, plaisir ancien qui resterai à jamais gravé en lui. L'immortel avait vu bon nombre de pièces, si ce n'est toute -enfin, celles qui, désormais étaient appelées "des classiques"- lui même étant né avant bien des auteurs reconnus et célèbres tel Beaumarchais, Molière, Racine et Corneille. Dramaturges accomplis, ils n'arrivaient cependant pas à le combler autant que le regretté et génial Shakespeare. Combien avaient pleurés dans le drame intemporelle des amants maudits, Roméo et Juliette ? Combien s'étaient interrogés sur les mots prononcés par Hamlet face au crâne de Yorik le bouffon ? Combien avaient admirés les pouvoirs fantastiques de Prospéro ? La Lune fit apparaitre sur la façade du bâtiment un cercle de lumière, illuminant un non moins célèbre graffiti: "Kilroy Was Here". Au-dessus de ce symbole, et partout ailleurs sur le mur, d'autres inscriptions se faisaient voir, démontrant l'ancienneté de la rue. Des "A bas Nixon !", "Faites l'Amour pas la Guerre !" ou "A bas la Guerre !" se retrouvaient ainsi côte à côte, témoins de l'époque du scandale du Watergate et de la présidence de Richard Milhouse Nixon. Continuant de marcher, Caïn vit une vieille affiche. Il se souvenait à présent. Il se souvenait qu'il était allé voir cette représentation exceptionnelle de "Huit-clos" et qu'il avait fort apprécié.
Soudain, il entendit un mouvement, ses yeux balayant le sol, le Monstre crut à un animal, rat ou chat. Mais bientôt, tandis qu'il avançait, la curiosité s'emparant avec vélocité de son être, il vit une main humaine... Et des tâches de sang. Commençant à se baisser, il remarqua que celle-ci bougeait encore, signifiant que la personne -l'homme vu la taille de sa main- était encore vivant. La Lune l'aida à y voir plus clair, un pâle rayon luminescent révélant un homme masqué, couvert de bandages et qui sentait le brûlé, remuant un peu, Caïn sourit, sa voix perçant le silence de la nuit et brisant la torpeur de son Fou.
"Que vois-je ? Ne serait-ce pas un pâle oisillon tombé du nid ? Porte-t-il seulement un nom ?"
Empoignant l'être et l'accoudant au mur, il parvint à voir qu'à part le fait qu'il avait des bandages, il semblait fort et vigoureux. Il était donc jeune. Soupirant, l'immortel activa son pouvoir, voyant l'état des blessures de celui qui se ferai nommer Daniel Ment. Beaucoup de cellules avaient été grignotés et détruites, probablement à cause d'un feu. Sa main blafarde passa tel un évanescent courant d'air devant l'ancien agent de l'O.W.I. et reprit la parole:
"Je t'ai guéri de la Souffrance. Qui es-tu ? As-tu seulement un nom ? Comprends-tu mes mots et mes paroles ?"
[En espérant que tu aimes(désolé pour l'attente) ]
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Sujet: Re: † Réveil † { PV : Caïn Ezechiel } Jeu 11 Juin - 22:19
Une voix perça les murmures silencieux et intelligibles de la nuit. Ceux de la nuit ou ceux des oreilles voire de la tête au jeune homme ? Difficile à dire. Le silence semblait harceler de murmure l’esprit de celui qui se trouvait derrière le masque blanc. Il y avait un sifflement constant, et ce tambour incessant… Le pauvre avait l’impression d’être une machine défectueuse. Tous ses rouages étaient endoloris, mal graissés. Son mécanisme devait être remonté s’il ne voulait pas qu’il s’arrête pour de bon. Il chercha d’ailleurs un instant une clé à tourner pour se remonter tout seul. Devenait-il fou ? Peut-être l’était-il déjà ? Quant à son disque dur… Effacé.
La voix douce et chaleureuse, qui donnait presque envie de se rapprocher de celui qui la détenait et de le toucher, ne rappela rien au jeune homme. Ni son identité, ni celle de personne d’autre. Aucun souvenir. Rien. Venait-il de naître ? Peut-être, oui, s’il s’avérait qu’il soit véritablement une machine. Parce que même s’il n’avait aucun souvenir, il avait tout de même des connaissances. Il savait qu’il était impossible qu’il puisse être né à l’instant, car il avait une taille adulte. Alors si la vie venait juste de le trouver, ce ne pouvait être que de manière figurée.
En faite, la seule chose que rappelait à cet inconnu à lui-même, c’était l’homme. L’homme du monde, son évolution. Il avait en effet bien changé depuis le début de son existence. Il avait appris à marcher, puis s’était relever, pour ensuite construire un monde à son image. Plus que jamais, en ce jour il rêvait de pouvoir, de supériorité. Mais comme chacun voulait dépasser l’autre, une lutte sans merci avait débuté afin d’être en haut de l’échelle. Ou plutôt de la chaîne alimentaire, car il semblerait qu’avec le temps, l’homme ressemble de plus en plus à un animal sauvage bien particulier, car vivant de moins en moins en meute ou en troupeau.
Un flash : un visage de clown.
L’homme masqué mit la main à sa tête comme si cela pouvait changer quelque chose à la douleur. La douleur… S’il avait mal, c’est qu’il n’était pas une machine. L’homme a la capacité de faire retour sur soi, il peut réfléchir, il peut comprendre, savoir, apprendre… Il possède des sentiments. La haine, la colère, la joie, la tristesse, l’enthousiasme, la déception, l’engouement, le courage, la peur, la douleur… L’amour. C’est un peu tout cela que lui rappelait la voix. La voix appartenait à un homme. Ami ou ennemi ? Un frère ? Un amant ? Un parent ? Un inconnu ? Pourquoi était-il aussi seul à cette heure de la nuit dans une rue plus sombre encore que le ciel ? L’instinct – car c’était la seule chose qui restait à cet amnésique – lui recommandait d’être prudent. Avait-il une famille, cet homme ? Si oui, pourquoi être ici, plutôt qu’avec elle ? Et lui, sous son masque blanc, avait-il une famille ? Quelqu’un pensait-il à lui en ce moment même ? Quelqu’un était-il en train de le chercher ?
Tant de questions… C’est comme s’il tentait de percer à jour un homme dont il ne connaissait absolument rien de son passé. Et il n’avait aucun nom non plus pour commencer ses recherches. Le pire dans tout ça c’est que cet homme était lui-même. Il devait se lancer à la recherche de son propre fantôme. Il n’était pas convaincu que la Quête du Graal soit plus difficile que la quête qui l’attendait. Mais… Etait-il vraiment forcé de se chercher ? Il était possible qu’il ait pu demander à quelqu’un de lui offrir une seconde chance, une nouvelle vie, la précédente n’étant plus acceptable. Et s’il se cherchait lui-même, il risquerait de tout gâché. Il allait devoir y réfléchir mais jusqu’à présent, le contre se faisait plus lourd que le pour. Il allait attendre encore un peu.
Pour le moment, l’homme à la voix inconnue l’aida à se relever. Il sentit une vive douleur sur tout son corps. Impossible de dire où elle était précisément tellement qu’il avait mal. Jetant un coup d’œil à ses bandages au travers des trous du masque, il vit que certaines bandes blanches étaient devenues rouges écarlates et semblaient assez spongieuses, reflétant plus facilement les pâles lueurs de la nuit que les bandes encore sèches.
Mais alors qu’il serrait les dents, les yeux levés aux cieux pour tenter de se concentrer afin de ne plus sentir la douleur, celle-ci sembla se dérober d’elle-même. Pas totalement bien sur, mais le soulagement était tel qu’il avait la sensation de revivre. Après avoir renaquit, voilà qu’il revivait. Une bien étrange nuit que celle-là.
Puis la voix reprit. La même. Chaleureuse. Celle qu’on a envie de toucher. Mais elle allait trop vite pour quelqu’un qui venait de respirer pour la première fois, une seconde fois. Alors il ne fit que répondre, après quelques instants, à la dernière question : il fit oui de la tête.
Dans le fond, il espérait que ce gardien nocturne allait le protéger en ce début de nouvelle vie jusqu’à ce qu’il puisse s’envoler seul. Car le fait est que l’homme masqué était encore faible et malgré des connaissances qu’il avait gardées, il pouvait être une proie facile pour le monde. En fin de compte, il pouvait faire confiance à cet homme. Sa méfiance instinctive du début s’était dissipée en même temps que sa souffrance physique. Cette fois, son instinct lui disait qu’il avait tout à gagner en se donnant à cet homme, si ce dernier voulait bien de lui, ce qui était bien loin d’être sûr, car qui pouvait bien recueillir un inconnu couvert de bandages, de brûlures, et au visage masqué, rencontré assis contre un mur d’une ruelle sombre, près d’un théâtre désaffecté, au milieu de la nuit ?
[ J'ai beaucoup aimé, et je te pardonne ne ton retard. Vu le niveau médiocre de mon post, je peux dire qu'on est quitte. ^^" ]
Caïn Ezechiel ~~All Causes Shall Give Away : I Am In Blood~~
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"La vie est un voyageur qui laisse traîner son manteau derrière lui, pour effacer ses traces."[Louis Aragon] "Tout peut basculer si vite dans une vie, si vite que le passé s'efface comme dans un rêve."[Christophe Gans] "Une tête sans mémoire est une place sans garnison."[Napoléon Bonaparte] ---------------------------------------------------
L'homme qu'il venait de secourir était encore faible et cela était compréhensible car il ne l'avait pas soigné. Pas complètement. Seulement assez pour qu'il n'y ai aucun être qui meurt cette nuit. Pourquoi cette bonté ? Allait-il se servir de cet âme qu'il avait sauvé comme d'un pion ? Ou... Allait-il le transformer en un puissant Cavalier, en une terrible Tour ? Il l'avait déjà fait. Il avait déjà transformé des êtres. Et il avait enseigné à un homme.
Un sourire écarlate dans l'obscurité de la nuit naquit. Oui, cela faisait longtemps qu'il ne l'avait vu. Cet homme plongé dans le vice et qui ne buvait pas la tasse, qui demeurait maître de ses actes malgré sa corruption et qui aimaient les sept péchés capitaux. Daniel Hénok. Son ancien élève. Et maintenant son allié. Devait-il encore instruire ? Devait-il encore montrer la face cachée de l'Humanité à un autre ? Dans la fraicheur rassurante de la nuit, il craignait que son nouvel ami soit meurtri à cause de ses brûlures. Il décida donc de ne pas rester ici. Et c'était sans doute la meilleure chose à faire à cette heure tardive.
L'Inconnu venait de montrer qu'il comprenait ce qu'il disait et que, par conséquent, la communication entre eux deux était possible et serait déterminante. A fortiori, il devait être américain. Cependant, il savait que sa langue et ses cordes vocales étaient en un état de marche raisonnable et qu'il pouvait parler. Caïn comprit que le choc de son embrasement avait dû le traumatiser et qu'il ne pouvait ainsi palabrer. L'immortel souleva à nouveau l'homme au masque et le laissa s'appuyer sur lui.
Ils commencèrent donc à se déplacer. Devait-il le soigner définitivement ? Et pourquoi un étrange pressentiment lui disait de l'examiner à nouveau. Et plus attentivement ? Devait-il l'écouter ? Caïn consentit à cela et se laissa envahir par un des effets de son pouvoir. Le contrôle cellulaire lui permettait de voir l'intérieur de toutes choses non pas comme un ensemble complexe de muscles, de chairs, d'os et de nerfs mais comme un aggloméra de cellules de différentes consistances, poids et couleurs. Il les voyaient, les ressentaient. Ainsi, le Monstre vit une seconde fois les cellules profondément endommagés, puis il chercha autre chose. Une chose qui avait pu lui échapper la première fois. Il fouillait plus profondément encore qu'il ne l'avait jamais fait, voulant se repaître des mystères que semblait renfermer cet homme aussi énigmatique que lui.
Et il trouva.
L'être en face de lui présentait un grave problème au niveau du cerveau, plus particulièrement du cortex cérébral et des lobes pariétal, temporal et occipital qui étaient le centre de la mémoire. Ainsi, il était indubitablement amnésique, cela ne faisait aucun doute. Il comprenait maintenant pourquoi cet être semblait si déconnecté de la réalité, posant un regard nouveau sur ces choses si communes pour d'autres. Le Monstre Sans Nom connaissait la difficulté de ne pas se souvenir de son identité, de ne pas en avoir. Tout être en ce bas monde possède un sigle de reconnaissance et de différenciation que nous nommons "nom". Et même s'ils existent bon nombre d'homonymes, par leurs apparences, leurs goûts et leurs voix nous pouvons les différencier.
Se rendre alors compte qu'on a pas de nom, qu'on a donc pas d'identité, qu'on est un fantôme, un vague souvenir, que nous ne pouvons être appelés, que personne ne se souvienne de nous, voilà la souffrance de ceux qui n'ont pas de noms. Et le seul remède qui existe, le seul antidote est la volonté. La volonté de construire son destin plus qu'incertain, de lutter contre ses aléas meurtriers, de se relever, nouvel être gorgé de puissance et de crier un amas de lettres qu'on a choisi pour se représenter. Crier à la face du monde notre nom.
"Nomme-moi Caïn."
Il s'arrêta et le plaqua délicatement contre un mur. Caïn se retourna et son visage apparut, la lumière lunaire auréolant sa tête tel un messager divin. Ses yeux brillaient étrangement et la certitude de ce qu'il devait faire de l'amnésique était évidente. Il allait le guérir. Lui enseigner certaines choses le temps qu'il recouvre ses capacités et son libre-arbitre. Il avait également remarqué une chose. Celui-ci possédait un don. C'était une chose inscrite dans l'Acide DésoxyriboNucléique et par extension, dans chaque cellule, cellules qu'il pouvait lire et comprendre. Caïn allait lui apprendre la vérité.
Tout d'abord, ses doigts blanchâtres et sa pâle main se refermèrent sur les yeux de la figure de l'amnésique. Ensuite, de l'autre main il arracha le masque et chaque bandage qui recouvrait cette figure meurtri. Enfin, son pouvoir s'activa, imprégnant chaque fibre, chaque centimètre carré de peau, de nerfs et de muscles de ce corps blessé, brisé et le guérit. Les plaies cicatrisèrent et se refermèrent, les cloques disparurent et la peau brulée ne fit plus sentir sa répugnante odeur. Le sang ne coula plus des plaies purulentes. La souffrance avait cessé ses cris puissants, elle s'était tu. Le crâne brûlé avait fait place à des cheveux bruns, le cuir chevelu régénéré.
"Tu es sauf désormais. Il y a des choses qu'il faut que tu saches. Tu as sans doute dû le remarquer mais tu es amnésique. Et, personnellement, je ne te connais pas."
Il sortit son téléphone éteint et lui tendit pour lui servir de miroir, qu'il voit son visage, qui sait, la vue de celui-ci pourrait peut être faire surgir de sa mémoire des bribes de souvenirs ? En attendant, il s'avança dans la rue et lui fit signe de le suivre, car, désormais, il avait la force de marcher. Comme un parent protecteur, le Monstre avançait mais le faisait lentement pour qu'il arrive à le suivre. Il reprit:
"Tu possèdes un don. J'en suis sûr. Nous ne sommes pas des monstres et surtout, nous ne sommes pas seuls, beaucoup sont comme nous de par le monde. Il y a des bons et ceux qui prennent une voie différente... Moi, je peux soigner comme tu l'as toi-même remarqué. N'ai pas peur. Je vais t'aider."
Il le berçait de paroles réconfortantes et attendit qu'il marche jusqu'à lui, il espérait qu'enfin, l'homme parlerait...
"Peut être devrais-tu choisir un nom ? Tu devrais regarder là dedans."
Caïn sortit un petit livre noir d'une de ses poches et le tendit à l'amnésique. C'était dans la Bible qu'il devait chercher son nom...
L’homme, inconnu à lui-même, avait beaucoup de mal à se déplacer. Il se sentait alourdit par l’épuisement, le manque de force. Trainant des pieds, il sentait bien qu’il n’irait pas loin, ou alors à une lenteur hors du commun. Cela devait faire un moment qu’il n’avait pas mangé. Et sa crise à l’hôpital où il avait une démonstration « inopinée » de son potentiel l’avait exténué, sans parler de la course qui avait suivit. Une expérience unique, aussi bien d’un point de vue subjectif qu’objectif, car des expériences uniques et des premières fois, l’amnésique allait en avoir pendant un moment. Bien sur il y a des choses qu’il savait déjà comme marcher, courir, parler, lire, écrire, nager peut être même, ou bien conduire, et bien sûr utiliser une étrange capacité. Mais il sentait qu’il allait aller de surprise en surprise se découvrant des choses qu’il n’avait même pas imaginer. Il avait d’ailleurs hâte de savoir ce qu’était sa vie, la découvrir comme on découvre un roman page après page. Qui était-il ? Qu’était-il ? Qui le connaissait ? Qui avait seulement entendu parler de lui ? Qui le craignait ? Qui l’admirait ? Qui l’aimait ? Qui ?
L’homme qui l’aidait à marcher déclina son nom. Son nom… Ce rapport à l’identité plongea notre homme plus profondément encore dans son sentiment d’être étranger. S’il devait trouver un pseudonyme en attendant de retrouver la mémoire se serait « L’Etranger ». Etranger au monde et à lui-même. Ce sentiment d’être personne alors que cet autre étranger portant le nom de Caïn lui donnait d’emblée une symbolique divine, d’autant plus qu’il aidait un semblant de clochard en proie à la folie, le visage couvert d’un masque salit et entaillé par le temps. Oui, cet homme pouvait bien être le messie. Et s’il était le messie, ce Caïn venait de trouver son premier disciple.
Les deux hommes s’arrêtèrent de marcher, ou plutôt de trainer des pieds. Notre fugitif avait déjà besoin d’une pause étant complètement essoufflé. Caïn l’aida à s’appuyer contre un mur, sa tête heurtant doucement la brique. Les yeux rivés vers le ciel, celui-ci venait de se laisser envahir par quelques nuages audacieux. Mais la Lune ne se laissait pas prendre facilement. Elle brillait toujours sans se lasser de servir de lampe de chevet à deux hommes dans une ruelle sombre de New York. Peut être était elle en faite en train de les observés avec cette même excitation qu’à le voyeur en découvrant ce qu’il savait déjà sur sa bien aimée, et peut importe si cette vérité blesse puisque seule la vérité compte. « À l’amour, la gloire, l’argent, la loyauté, la justice, je préfère la vérité » disait Thoreau. Et tel un spot théâtral, la Lune éclairait comme en plein jour la vérité. En effet, lorsque le misérable redescendit ses yeux des cieux, il découvrit avec stupeur comme s’il s’était s’agit de Dieu, le visage de son Sauveur. Il entendit son souffle résonné de plus en plus fort sous son masque tandis que cet ange divin posait sa main sur ses yeux, comme le Christ rendant la vue à l’aveugle. Et comme l’aveugle vit s’évanouir son obscur cécité, l’Etranger sentit son mal être disparaitre. Les douleurs, les brulures, ce n’était qu’un souvenir. La pensée que cela était un souvenir sonnait étrangement alors qu’il était amnésique. L’idée que son premier souvenir soit la douleur le terrifiait. Mais heureusement, le souvenir de ce visage divin, le souvenir du premier visage amical s’apparentait obligatoirement à celui du parent. Il avait le sentiment que ce Caïn allait être sa seule « famille ».
Quoi qu’il en soit, bien que la fatigue était toujours là, il n’y avait plus de douleur, retirant une épine du pied à notre homme. Ce dernier regarda ses mains intactes une fois que Caïn retira la sienne de ses yeux. Puis il toucha son visage. Il y avait encore des cicatrices, notamment au niveau de sa joue gauche, mais il était content d’avoir des cheveux. Le Sauveur annonça les nouvelles, mais elles étaient sans surprise : il était amnésique et ils ne se connaissaient pas. De cela il s’en était déjà rendu compte. Néanmoins, il ne pipa mot étant bien plus que reconnaissant envers l’homme – ou la divinité – qui l’avait sauvé. Ce dernier lui tendu un téléphone afin qu’il puisse se voir dans l’écran, sembla-t-il, mais instinctivement, et aussi curieux que cela puisse paraître, il repoussa le petit appareil de la main, car quitte à recommencer une nouvelle vie, autant devenir celui qu’il veut être et non pas celui que le Destin aurait voulu à sa naissance. Ainsi, il remit son masque pour continuer d’être personne et tout le monde à la fois, tel un symbole. Il avait l’intention de ne le retirer que lorsqu’il aurait trouvé une bonne fois pour toute qui il était. Ce jour n’étant pas encore à la veille de se lever, il se mit en tête de trouver à la limite un autre masque, peut être plus esthétique et plus confortable.
L’Etranger s’exécuta lorsque le Sauveur lui dit de le suivre, et lorsqu’il reprit la parole, ce fut réellement intéressant. En effet, il découvrit que Caïn savait qu’il avait une sorte de capacité inhumaine, sans que cela l’effraie d’ailleurs. Comment le savait-il ? Etait-il à l’hôpital ? Le cœur de notre fugitif se mit à battre plus fort. Puis il se calma en se disant que s’il était une divinité, ce n’était pas la seule chose qu’il devait savoir. Et si c’était une divinité, c’était pour cette raison que notre fugitif avait oublié d’être surpris lorsqu’il fut guéri en étant comme touché par la grâce, et c’était pour cette même raison que ce semblant d’homme n’était pas effrayé par un être qui était capable de mettre à feu et à sang un service hospitalier. Cependant, ce n’était pas logique qu’une divinité puisse aimer un tel monstre. Puis la suite de son discours fut plus énigmatique encore. En effet, que signifiait « beaucoup sont comme nous de par le monde » ? La phrase était simple mais le sens échappait à tout ce que l’on pouvait penser. L’Etranger ne fut pas plus rassuré lorsque le Sauveur lui affirma qu’il n’y avait aucune crainte à avoir et qu’il allait prendre soin de lui. Cependant, il se devait de lui faire confiance. Il reprit donc son calme.
Après un cours laps de temps où ils marchèrent silencieusement, notre homme étant plongé dans ses pensées, Caïn tendit un livre : la Bible. Il devait trouver un nom dedans. Il l’ouvrit et se mit à survoler les petites lignes inscrites sur les fines feuilles beiges en quête d’une identité temporaire, suivant toujours de près cet ange au sourire aussi mystérieux que mystique, mis en lumière par l’éclat marbré de la Lune, sous lequel un homme venait de naître.