Things change... [Terminé]

Dans une bulle de néant courent des vagues de couleurs et de lumières. Dans un espace que je sais trop restreint pour leurs élans de liberté, je les observe, je les admire danser comme si rien n'avait de limite. Quelque fois sources clapotantes, d'autres fois torrents puissant, je ressens dans tout mon être, le cours de la vie tracer sa route dans l'espace entre ciel et terre.
Autrefois courant d'air glacial crispant tous les pores de ma peaux, je ressens aujourd'hui la caresse du magnétisme terrestre comme un doux appel plein de puissance et d'inspirations. Imperturbable au milieu de ce balai envoutant, je sens le monde changer, bouger, sans vraiment me rendre compte que l'essence même qui constitue l'être borné et impossible à résonner que je suis, est en train de se troubler lentement. Tout est si clair dans ma tête que je n'arrive pas à assimiler le fait que mon esprit et ses désirs ne forment à présent qu'un gros noeud de contradictions. Progressivement, la bête prend ses aises dans la vie d'un jeune homme horrifié par sa nature, pourtant de plus en plus confortable avec l'utilisation de ses capacités. Dans mon monde, n'existent plus que les monstres qui attirent ma haine comme des aimants, détournant mon attention, mon intérêt, ma considération pour ceux qui sont de ceux que je souhaite pourtant protéger. Le désir si intense qui obsède mon futur ne me donne plus assez d'espace ou de temps pour pleurer ma vie passée et ma pureté perdue. C'est pourtant ce passé tant regretté qui forge mon obsession et dirige chacun de mes pas vers Claire Bennet, la source de tout.

- John, arrête de rêvasser ou Dominic va encore crier…

Me réveillant presque en sursaut devant un lavabo rempli de mousse et de flaques graisseuses, je reprends machinalement l'action de frotter un plat métallique sur lequel se sont incrustés quelques paquets d'amidon humide.

Voilà presque un mois que j'ai repris la vie insignifiante de John Smith, suppliant presque à genoux mon boss de me garder. Peu ému par ma mésaventure dans les ruines de Brooklyn, le dirigeant du DescentCafé finit par accepter à condition que je rattrape mon temps de convalescence à travailler pour lui. Etrangement, la petite semaine passée à l'hôpital s'est changé en deux mois de travail sans congé, mais c'était toujours mieux que de repartir à la chasse aux petits boulots.
Dom a aussi ses raisons de garder un "nolife" comme moi pour s'occuper de son petit café devenu de plus en plus populaire pour les entreprises naissantes du coin. Petit à petit, on retrouve des habitués qui prennent tout les jours leurs déjeuner où leur café de l'après-midi chez nous et le bouche à oreille fait son chemin jusqu'à remplir la petite salle et les tables extérieures à chaque midi de la semaine. Mais peu de gens viennent dans la Nouvelle Ville pour être garçon de café alors quand on dégote un gamin qui a l'air d'avoir que ça à faire de sa vie, on le garde.

- Eh gamin quand t'aura finis les plats tu pourras sortir les poubelles ? Sarah j'ai besoin de toi en caisse, j'vais chercher les réserves.

J'acquiesce d'un soupir plein d'ennui et de mauvaise volonté et saisit un nouvel ennemi graisseux dans l'évier. Ignorant le regard soucieux que me lance ma partenaire de cuisine, j'entreprend la répugnante tâche de frotter vigoureusement les restes de lasagnes encore tiède. Mais malgré ma tête de constipé mal réveillé, cela fait maintenant quelques semaines que je ne me sens beaucoup plus détendu dans la vie de tous les jours, beaucoup plus confortable dans mes pompes alors que l'ancien moi piquerais une crise de panique s'il se rendait compte de ce qu'il m'arrive.
Ce qui manque à présent dans le nouveau quotidien de Zach Quins, c'est ce sentiment d'insécurité et de mal être permanent. Je me sens normal alors que je la normalité s'éloigne de moi à une vitesse incroyable.

Reposant le plat suffisamment gris pour ne pas avoir l'air trop sale sur une des étagères de la cuisine du DescentCafé, je jette un coup d'oeil dans la boutique pour organiser ma prochaine activité. Sarah est à la caisse, accueillant le peu de clients en retard sur l'habituelle heure de déjeuner avec un grand sourire chaleureux, pas de Boss en vue. Je détache alors mon tablier de commit et ôte mes gants de plombier pour saisir deux sacs poubelle de la taille de deux petits pandas et sortir dans l'arrière cours. Après avoir hisser les deux paquets dans les bennes à ordures, je sors de ma poche de jean une cigarette tordue et une misérable boite d'allumette piquée à l'accueil de l'hôpital.
Soupirant longuement, je décide de me dégourdir les jambes, clope au bec et mains dans les poches comme le ferait n'importe quel adolescent de mon âge.
Qu'y a-t-il de tellement changé ? Je le ressens dans tout mon corps, mais mon esprit se garde bien de trop se questionner. C'est tellement plus agréable, tellement plus simple quand on ne se pose plus de question.
Si le patron est allé cherché des réserves au magasin, ça devrait me laisser un bon quart d'heure de pause. Sarah se débrouillera très bien toute seule.
Marchant lentement dans les petites rues sillonnant entre les nouveaux immeubles reluisant de la capitale, j'erre, seul dans mon brouillard au milieu de la foule journalière.

Cet adolescent ne chercherait-il plus la seule raison de sa venue à New York ? Loin de là. La Traque n'a jamais été plus présente dans mes yeux. C'est seulement que le Traqueur qui s'éveille de plus en plus en moi est plus efficace que le jeune homme effrayé du monde et complètement de retrouver la blonde. Le jour n'est pas une bonne période pour chercher et j'en ai douloureusement fait les frais à Brooklyn. Je suis un animal nocturne, alors pourquoi s'agiter lorsque le Soleil rayonne encore si puissamment dans le haut ciel ?
La démarche trainante, j'esquive sans les voir, les dizaines de personnes si pressées de se rendre là où il faut qu'elles soient. Elles ont toutes quelque part où aller et leur chemin est un combat pour atteindre leur but si futile et inintéressant. Comme lorsque j'observe, immobile et silencieux, les torrents de vies, courant sur les lieux d'une existence passée, je ressens la fourmilière s'agiter sans adhérer à leur rythme inutilement agaçant. Bientôt, je m'arrête tout simplement de marcher.
Devant moi, un homme semble avoir compris qu'aucune de leurs raisons n'est assez valable pour susciter une telle dépense d'énergie. Immobile devant moi, j'observe ses pieds disposés dans une posture assez confortable. Non agacé d'être bloqué dans mon parcours, je remonte lentement les yeux pour finir par retrouver des traits forts et fortement familiers.
Pas étonnant qu'il n'est pas comme les autres. Devant moi se trouve Samuel Sullivan.

Sa voix rauque résonne dans mes tympans comme si nous nous trouvions seuls dans une salle vide. Normal, les gens autour ne représentent pas plus dans mon esprit que les millions de molécules d'air que j'inspire et expire à chaque respiration. Leur présence et leurs activités me sont tellement familières qu'elles sont devenues un bruit de fond permanent qu'on finit par ne plus pouvoir entendre.
Lui au contraire, de par sa stature, son attitude, son assurance et son regard fixé dans le mien, tout en lui le démarque de la masse humaine se trainant mollement sur la surface de la Terre. Droit dans l'espace impalpable, il émane la puissance des nouveaux hommes.
C'est tout cela qui, lorsque de notre première rencontre, m'avait effrayé, horrifié et dégouté. Cette même aura particulière qui avait dressé tous mes poils sur ma peau et crispé mes muscles pour me dire de fuir ou d'attaquer comme un vulgaire animal.

Un sourire se dessine sur ses fines lèvres. Il n'est pas là par hasard, et ma seule rencontre avec l'individu m'avait bien faire comprendre que Samuel Sullivan viens rarement à la rencontre des gens sans une idée derrière là tête.
Pourtant, calme et posé, je ne détourne pas mon regard du visage du personnage charismatique pour chercher une issue de secours. Seulement interloqué de la présence de l'homme si près de mon lieu de travail, je lève un sourcil en essayant de sonder les intentions du forain. Elles ne doivent pas beaucoup dériver de ses intentions passées de vouloir m'enrôler dans son zoo de bêtes de foires. Les gens se défont difficilement de leur passé.

- En effet… Mais ne vous fatiguez pas à avoir l'air étonné. Je ne pense pas que nous nous serions retrouvés une deuxième fois si une raison particulière ne vous avait pas poussé à sortit de votre trou pour me retrouver.

Le ton froid, presque glacial, je fixe mon opposant d'une toute nouvelle confiance. Si le hurleur de foire me cherche pour me révéler mes pouvoirs, alors il est à moitié en retard et doit sûrement le sentir dans mon regard sombre et sans détour. Le jeune homme apeuré et plein de question est enfoui bien profondément dans mon esprit et je me garde bien de le ramener à la surface. C'est tellement plus simple et agréable de ne regarder que dans une seule direction.

- Je m'excuse cependant une fois de plus de ne pas pouvoir passer plus de temps à jouer au chat et à la souris avec vous. Peut-être pourriez-vous formuler vos raisons clairement et rapidement que je puisse refuser sans avoir à vous voir me suivre à mon lieu de travail.

Coupant notre duel oculaire pour jeter un regard nonchalant aux alentours dans une attitude des plus naturelles, je tire une dernière fois sur mon bâtonnet de goudron avant de l'écraser au sol, indiquant implicitement à mon interlocuteur qu'il avait ma totale attention pour l'espace d'au moins quelques secondes.

Mais mes sourcils se froncent alors que lentement, je sens un sentiment désagréable remonter le long de mon système nerveux jusqu'à mon cerveau. Le questionnement. Le fait de retrouver une connaissance me jette ma propre différence de personnalité à la figure comme l'éclairage agressant d'un spot lumineux.
Tentant de me concentrer au mieux sur les paroles de Samuel, je ne peux m'empêcher de me rendre petit à petit compte de mon propre changement. Lequel est-il ? Et pourquoi est-il si agréable ? Tellement agréable qu'il en devient effrayant pour le Zach Quins qui se réveille lentement dans l'ombre de mon esprit.

Relevant mon regard vers l'individu, je me demande si sa présence n'est pas plus désagréable que je ne le pensais à notre rencontre. Mais une nouvelle question émerge dans ma tête, indésirable et pleine de tourments. Cet homme m'apporte soudainement plein d'interrogations, mais est-ce vraiment aussi mauvais que désagréable ? Je me sens comme émergeant lentement d'un rêve, mais n'est-il pas mieux de se réveiller et de se rendre compte qu'on rêve que de rester dans une illusion de bien-être ?
Dévisageant à nouveau le forain, comme le leveur de voile, avec beaucoup moins d'assurance, je ne sais même plus si je veux qu'il reste ou parte.

Soupirant longuement, je remarque sans surprise que ce n'est la phrase claire et concise pouvant m'amener rapidement à la fin de cet échange que j'attends qui sort de la bouche du forain. Agacé, mon regard fait des aller-retour entre le visage marqué de l'adulte et la ruelle qui me mènera, au plus tôt je l'espère, au Café.

Au lieu de me répondre, il me renvois la question avec autant d'habileté qu'un Hurleur de Foire pourrait faire preuve. Mais la seule chose que je sais et que j'espérais jamais savoir de Samuel Sullivan est ma rencontre passée dans les coulisses de son cirque. La démarche de l'individu de venir me retrouver en plein Manhattan n'est-elle enrichie d'aucun vécu ou réflexion de la part du forain ?
Pour ma part, beaucoup de choses ont changées depuis… Beaucoup.

Un frisson me parcours le corps alors que je sens un fois de plus un jet de questions m'embrumer le cerveau que j'essaye inutilement de chasser en secouant légèrement la tête. Perdu dans mes propres réflexions pendant qu'une partie de moi aspire encore à la tranquillité et l'insouciance, je me retrouve rapidement au sol sans comprendre la cause de la situation.
Mais le contact brutal du bitume contre ma boite crânienne eu pour effet de me remettre rapidement les idées en place et les questions dans les tiroirs.
Non, aujourd'hui n'est pas un jour où j'ai prévu de réfléchir. D'ailleurs, le jour n'est pas un bon moment pour réfléchir.
Ce a quoi je devrais songer en revanche est pourquoi je me retrouve à l'horizontal au milieu du trottoir.

Les passants trop pressés et occupés ne prêtent pas attention à ma mésaventure et se contente de nous éviter d'un air dérangé. Grognant à la douleur naissante au dos de mon crâne, je me prépare à me relever et me retrouve rapidement bloqué par l'imposante personne de Samuel Sullivan. Je lui laisse quelques secondes de désorientation avant de se relever en se confondant en excuses comme n'importe quelle personne en ayant bousculé une autre à ce point le ferait, mais les secondes passent et l'homme n'a pas l'air de vouloir bouger. Il n'a d'ailleurs pas l'air désorienté ou gêné non plus.
Mon regard vient trouver le sien qui me fixe, comme si rien était venu déranger notre discussion. Mais à moins que la gravité ait subitement décider de bouger de 90°, nous nous trouvons bien dans la position inconfortable et embarrassante d'être allongé l'un sur l'autre.

Que veut-il à la fin ? Son regard de prédateur sur moi me fait presque croire qu'il se serait volontairement jeté sur moi. Les fins, cependant, me restent toujours inconnues.
Je sentais que nous étions séparés du monde des passants, comme deux tours de marbre au milieu de la fourmilière, mais je pense que cela ne nous permet pas de faire n'importe quoi non plus. Et comme j'avais prit le soin de le préciser, ma petite pause auto-accordée serait bientôt remarquée par mon patron qui n'apprécierait pas mon attitude.

Ne pouvant me relever normalement en position assise, je m'extirpe de sous Samuel en rampant à reculons sur le sol, toujours déconcerté par le soudain refus de bouger de mon interlocuteur. Me raclant la gorge en me massant l'arrière de la tête, je me dois tous de même de briser le silence étrange.

- Hm ! Et bien… Je crois que je vais devoir vous laisser… Si vos raisons n'ont pas changées alors je ne vois pas pourquoi celles de mon refus l'auraient.

Me relevant lentement en remettant en place ma veste, je sais bien que si Samuel Sullivan n'avait pas changé depuis notre dernière rencontre, Zach Quins avait bien changé.

Une dernière pensée me stoppe cependant sur mon départ pendant que le forain se relève à son tour. Un prénom qui ne devrait pas être prononcé à New York venait de franchir les lèvres d'une deuxième personne depuis mon arrivée dans la ville maudite. "Zach". Une appellation que j'ai renié il y a maintenant deux ans. Alors pourquoi deux ans après m'être arraché à mon passé, pourquoi après deux ans de Traque infructueuse et de vie horriblement banale en temps que John Smith, pourquoi faut-il que les écho du passé viennent hanter ma vie déjà bien troublée. A-t-il, lui aussi, assisté au cours brisé de mon passé ? Non, je me souviens du pouvoir terrifiant de faire trembler le sol d'une force anormalement haute, il ne devrait pas posséder plus de puissance encore.
Pourtant, quand mes yeux emplis de doutes et de questionnements viennent à son regard sombre à nouveau, je sens que l'homme sait beaucoup de chose. Le fait qu'il ne laisse aucune information passer ses yeux noirs de mystère et ses fines lèvres cadenassées dans un sourire imperceptible, est loin de témoigner d'un manque de savoir de son côté. Samuel est un coffre, un trésor de réponses enfouis dans le plus profond des abysses et c'est tout en le sachant qu'il sait susciter l'intérêt et la curiosité.

Mais ai-je vraiment envie d'avoir des réponses à mes questions ? Là est la plus importante de toutes. Tout ce qu'on m'a donné jusqu'à aujourd'hui ne m'a apporté que frustration et colère, ai-je vraiment envie de découvrir que je ne trouverais rien d'autre en ce monde ? Le savoir de la désillusion vaut-il tous les délices du rêve ?
Je n'avais pas prévu de quitter l'insouciance de ce début de journée ressemblant à beaucoup d'autres, mais chaque regard croisé avec cet homme mystérieux me mène plus proche d'une sombre vérité et je me sens aussi impatient que terrifié d'arriver à la fin de notre périple, mais il nous faudra attendre.

- Que… Diriez-vous d'avoir une conversation plus… convenable, autour d'un verre ? Si vous avez le temps, je serais plus enclin à vous écouter à la fin de mon service et vous n'aurez pas besoin… de me clouer au sol.

Alors que, d'un ton à la fois ironique et agacé, les mots franchissent le seuil de mes lèvres, ne sachant pas comment terminer cet échange, je ne sais même pas si en repousser la fin est une bonne solution. Ironique et étrange de me rendre compte que c'est ma couverture qui finit par régler ma vie plus que l'existence que je mène dans l'ombre de la Lune.
Mais ne pouvant rattraper ma proposition, je m'apprête à regagner mon lieu de travail d'un pas pressé sans vérifier que le forain me suis.

Voyons s'il a autant de temps à me céder qu'il voudrait que je lui consacre.

Retenu par une étreinte dont je me défais très rapidement d'un geste vif, je me retourne un peu brusquement pour faire face à un Samuel Sullivan presque suppliant. Ayant l'air affolé, l'homme me demande de ne pas partir, il n'a pas l'air d'avoir comprit mon problème. D'ailleurs il n'a pas l'air d'avoir une logique même proche de la mienne. Je ne proposais pas un café parce que j'adorerais papoter avec l'adulte comme deux vieilles copines de lycée, mais parce que rester ici, au milieu de la rue grouillante de travailleurs et autres passants, ne me convient pas. Si nous voulons continuer notre conversation, elle se fera dans le DescentCafé.
Le forain me désigne ensuite un petit banc qui même très récemment placé là me parait complètement misérable. La vue d'un tel personnage attendant que le temps passe sur ce minable meuble public de bois m'arracha un sourire moqueur. Soit, s'il a encore envie de m'attendre dans de telles conditions, je ne lui proposerais pas les chaises plus confortables du DescentCafé une deuxième fois.
Laissant donc mon camarade courbé sur son banc public, je tourne donc les talons et presse le pas pour en finir avec cette journée de travail, un sourire coincé sur mon visage. Qu'est-ce que cet homme veut de moi ? Les intentions du forain restent encore obscures, mais je ressens une petite satisfaction à voir une telle puissance soumise. Mais je ne remarque pas qu'ici, ce n'est toujours pas lui le plus faible des deux. J'ai beau refuser tout ce qu'il attend de moi, il ne me laisse jamais partir et connaissant maintenant mon lieu de travail, il risque de se permettre de presser sa demande plus régulièrement.

- T'étais où ? Heureusement que j'ai refilé la caisse à Dominic quand il est revenu ! J'ai dis que j’allais t'aider à ranger.

M'attendant les bras croisés mais un sourire ineffaçable sur son visage, Sarah me dévisage dans l'arrière cours comme une mère accueillant son petit garnement à la maison. J'entre dans le magasin en poussant un soupir de soulagement. Pas de boulot en plus pour Zach le lâcheur. Et heureusement pour le forain, parce que je sens que si ça c'étais mal passé ici, je l'aurais bien laissé croupir sur son petit banc toute la nuit.

- Merci... J'ai... J'm'emmerdais alors je suis allé faire un peu de pub autour.

Loin d'être convaincu, mon amie me place une pile d'assiette sale dans les bras avec un sourire en coin. C'est ça qui est bien avec Sarah, elle ne pose pas de question. Espérons qu'elle en fasse de même lorsqu'elle verra le Hurleur de Foire du Sullivan Bros. Carnival.

¤ ¤ ¤

Il ne me faut que deux heures de récurage intensif de plat pour repenser aux réponses qui m’attendent à quelques mètres d’ici, patientant sur un banc. Va-t-il attendre longtemps ? Mon service termine à une heure du matin, il ne faudrait peut-être pas exagérer. D’expérience, je sais que l’heure qui suit est une heure creuse avant diner. Ayant presque finit mon nettoyage et Sarah et le boss préparant surement le reste pour 19h, j’aurais peut-être le temps d’expédier le forain à sa roulote tout en lui soutirant des informations.
Mais ai-je vraiment envie de lui parler ? De le réentendre me demander de le rejoindre dans sa vie sans encombre où chaque spécial à sa place et vit pleinement sa puissance parmi ses semblables ? Ai-je envie de sentir ma détermination à rester qui je suis, faiblir ?

- Va pioncer dans un coin de la salle, t’as une sale gueule petit. Sarah est rentrée donc t’éloigne pas quand même. Ce soir je te veux opé et souriant. On sera que tout les deux.

Merci boss, mais vous venez de me donner le feu vert pour faire bien le contraire. Quittant donc mes gants en caoutchouc une nouvelle fois, je pars dans la rue en soupirant une énième fois. Quelques pas et j’aperçois déjà la stature misérable de Samuel n’ayant pas bougé de son banc.
Une fois à son niveau, je lui tapote l’épaule et me contente d’un bref hochement de tête pour lui faire signe de me suivre. Ne commençons pas un nouveau débat dans la rue.
La lumière orangée du Soleil qui n’excuse pour aujourd’hui accompagne notre silence jusqu’au café. Les gens sont aussi moins nombreux dans la rue. Une heure creuse pour tout le monde sauf le duo qui arrive rapidement à destination.

Je passe rarement par la devanture du café. Les néons sont allumés et diffusent une forte lueur bleue sur les quelques arbres plantés dans le béton du trottoir. La salle est un peu plus basse que le niveau de la rue, donnant l’impression lorsqu’on pénètre dans le magasin en descendant trois marches d’entrer dans une cave à moitié ouverte par une grande façade de verre laissant observer le défilé des passants pressés. L’intérieur a une couleur plus chaleureuse et rappelle les boulangeries de France, selon Dominic. Bois ou cuir pour les meubles, ça me fait plus penser à un ranch modernisé par des filles.

Entrant devant M.Sullivan, je lui désigne une table entourée de banquettes de cuir foncé avant de me diriger vers le frigo derrière la caisse. Sans avoir accordé un seul regard à l’individu depuis le banc, je finis par briser le silence en empoignant une bière fraiche.

- Je vous préviens, à partir 19h je serais aussi communicatif qu’un mur de pierre alors ne perdons pas de temps. J’vous sers quelque chose ?

Je marque ensuite ma consommation ainsi que celle de mon invité (si consommation il y a) sur la liste consignant le crédit des employés, avant de rejoindre mon camarade à la table avec les boissons. Prenant le temps de mettre de l’ordre dans ma propre tête en avalant deux longues gorgées de liquide frais, je bloque ensuite mon regard sur Samuel Sullivan. La conversation peut commencer.

- Ça m’intrigue toujours. Je vous ai déjà dit, deux fois, qu’intégrer votre cirque ne m’intéresse pas. Et pourtant vous êtes toujours là. Y a-t-il donc quelque chose de plus intéressant valant le coup d’attendre deux heures sur un banc publique que vous auriez à me demander ?

Déposant ma bouteille sur la table de bois, je me redresse et me mets à l’aise sur la banquette pour dévisager mon interlocuteur. En réalité, les raisons du clown m’intéressent peu mais je n’arrive pas à savoir ce qui me pousse à converser avec ce personnage. Moi qui ai toujours trop de questions emmêlées dans mon esprit, me voilà à chercher des réponses chez Samuel qui n’a pas encore eu l’occasion d’entendre une quelconque interrogation de ma part.
Je sens que je change et je ne sais pas pourquoi ni comment, mais je sens en moi que le changement est source de tiraillement. Une partie de moi à soif de libération alors qu’une autre la redoute par-dessus tout. Que fait Samuel dans tout cela ? Je n’ai pas besoin de sa présence pour faire ce choix à ma place et que pourrait-il faire pour me soigner de mes tourments personnels ? Aucune question n’est formulable pour ce que j’attends de l’homme assis en face de moi et pourtant, un son s’échappe de ma gorge sans avoir été autorisé par mon cerveau.

- Claire Bennet.

Presque étouffé par mes propres paroles, je ressens le besoin de m’éclaircir la gorge et de me repositionner dans mon assise avant de continuer.

- J’aimerais savoir si une jeune fille blonde portant ce nom à foulé votre Carnaval. C’est la seule raison pour laquelle je serais amené à y retourner.

Au final, tout ce bordel indéchiffrable dans mon esprit n’est que trop simple lorsqu’on revient à l’essentiel. Rien à foutre de mes questions, je n’ai besoin que d’une seule réponse.

Levant un sourcil à l'absence de réponse du forain, je me rend compte que je ne suis pas le seul pour lequel cette situation est complètement dénuée de sens. Même celui qui est venu me chercher dans la foule de Manhattan ne peut me dire ce qui l'a poussé à sortir de son cirque. En tout cas, c'est ce que son silence m'amène à penser. Soit cet homme prend un malin plaisir à rendre sa visite inutilement longue, soit c'est qu'il n'a aucune idée de ce qu'il pourrait me répondre.

Agacé à ma seule demande, je l'entends grogner sur la futilité de mes conditions et le vois se lever en me laissant une fois de plus dans un manque d'information la plus totale.
Une pointe de frustration vient crisper mon visage alors que moi même je me demande comment les gens peuvent ne pas connaitre Claire Bennet, celle qui semble être partout et nulle part à la fois, toujours impliquée dans les plus ombres événements, la cause de tout. Mais à force d'arriver dans des cul-de-sacs, j'ai finis par m'y faire.

Samuel renonce enfin et quitte la table d'un pas à la fois rapide et retenu. Mes yeux le suivent alors que mon cerveau décide des raisons pour lesquelles j'ai laissé le forain me suivre jusqu'ici quelques minutes auparavant.

Samuel Sullivan est une énigme, un questionnement à lui tout seul et tout ce temps à le fréquenter ne m'a apporté rien d'autre que des interrogations. N'en ai-je pas déjà assez ?
Pourtant quelque part en moi, je sens que cette personne peut m'apporter quelque chose. Mais si ce n'est pas Claire Bennet alors y a-t-il encore autre chose qui puisse m'intéresser ?
Non. Mon esprit est trop accaparé par cette cheerleader et rien ne peu m'atteindre avant que mon regard laiteux ne puisse se poser sur sa chevelure rayonnante. Peut-être aurais-je besoin d'autres réponses une fois que le problème Bennet aura été réglé, mais pour l'instant, je n'ai pas la liberté d'agrandir la collection de bêtes de foire de M.Sullivan.
Mais alors que mes pensées s'en vont vagabonder à ma première rencontre avec le forain et son Carnaval, un sursaut me parcoure le corps, me faisant me relever brusquement en renversant presque la table.

- Attendez !

Mais alors que mon regard cherche le forain à travers la vitrine du magasin, je me rend compte qu'il n'a pas encore quitté le restaurant. La main sur la poignée, le regard perdu dans le ciel de la nuit, il reste pourtant immobile, comme s'il attendait d'être retenu.
Le rejoignant près la porte d'une démarche maladroite et le souffle court, je jette à l'adulte un regard plein d'excitation.
Comment m'a-t-il retrouvé ? Je n'ai jamais cru à la malchance et le forain n'a pas dénié m'avoir cherché intentionnellement. Samuel Sullivan n'a peut-être pas le pouvoir de m'aider, mais avec sa grande "famille" il est peut-être celui qui possède le plus de pouvoirs en ce monde. Il devrait bien y en avoir un qui puisse m'aider dans le tas, non ? Ma pensée se concentre plus précisément sur une jeune femme blonde dont je ne me rappelle que le regard effrayé face à mon canon.

- Vous ne vous en souvenez pas mais si c'est le cas, je le saurais. Permettez-moi de voir par moi même si cette fille est venue à votre fête foraine. Aussi… J'aimerais… Rencontrer votre diseuse de bonne aventure. Vous m'avez dit lors de notre première rencontre qu'elle peut dévoiler ce qu'on désire le plus au monde, et dans mon cas, je crois que la nature de mon désir n'est pas un mystère. Peu importe comment, il faut que vous me meniez à elle. Aidez-moi…

Fixant l'homme de mes yeux sombres, lui exposant ma demande avec fermeté, je sais pourtant qu'il n'a aucune raison d'exposer ses petits camarades à quelqu'un ayant voulu tous les éliminer à sa première visite. Moi-même, ne pouvais lui promettre de ne pas essayer d'alléger la tare de la Terre une fois entouré de tous ces êtres indésirables. Mais même s'il n'obtiendrait pas la promesse d'intégrer les rangs des spéciaux de son cirque, il m'aurait au moins une fois de plus dans l'enceinte de sa foire, chose que qui ne serait jamais arrivé si je n'avais pas changé.

Allez Samuel, quelque chose naissant lentement en moi a aussi induit l'aberrante pensée que je pourrais tirer quelque chose d'utile de mes semblables. A toi de me montrer si c'est la bonne voie. S'ils devraient représenter plus qu'une simple liste d'indésirable à éliminer, se rallongeant de jour en jour dans le coffre de ma voiture.

Tiens, le voilà qui arrive. Cela m'aurait étonné ... Je ne lui en veux pas, au fond de moi, je voulais qu'il me rejoigne. Mais ne me demandez pas pourquoi, je n'en sais absolument rien. Par contre quelque chose me dit qu'il va me reparler de cette petite blonde de Claire Bennet. Ah ce qu'il m'énerve à me parler d'elle. Claire par ci, Claire par là .... Non mais ça suffit ! Il en est raide dingue ou quoi ? C'est agaçant à force...


- Vous ne vous en souvenez pas mais si c'est le cas, je le saurais. Permettez-moi de voir par moi même si cette fille est venue à votre fête foraine. Aussi… J'aimerais… Rencontrer votre diseuse de bonne aventure. Vous m'avez dit lors de notre première rencontre qu'elle peut dévoiler ce qu'on désire le plus au monde, et dans mon cas, je crois que la nature de mon désir n'est pas un mystère. Peu importe comment, il faut que vous me meniez à elle. Aidez-moi…

Avec ce regard de chien battu qu'il me lance, je ne peux pas résister. Bien sûr que je vais l'aider à la retrouver cette fichue fille qui l'intéresse tant! Je me demande aussi s'il n'avait pas fait ce regard si j'aurai résisté longtemps. Je ne peux pas m'empêcher de l'aider, c'est comme ça, je n'y peux rien. C'est Zach, tout simplement.

- Bien sûr que je vais t'aider, imbécile. Je ferai tout ce qui en mon pouvoir pour retrouver ta petite ( ordure de ) Claire. Il n'y a pas de soucis. Suis-moi, nous allons voir Lydia.

Et nous nous dirigeons vers le Sullivan Bros. Carnival main dans la main , lui devant et moi derrière. Il a l'air si déterminé à retrouver cette fille, ça en devient gênant.
( Non, Samuel, remonte les yeux, espèce de Pervers ! )

L'homme m'observe longuement avant qu'un de ses sourires effrayants ne se dessine lentement sur son visage. Il a enfin réussi à me faire céder et le souvenir de cette foire où amusement et monstruosité se mêle avec un charme horrifiant me fait immédiatement regretter ma demande au forain.
Mais il faut que cela cesse.

Ma vie de Traqueur me tire de plus en plus vers les recoins les plus sombres de moi même, me faisant lentement oublier la chaleur et le réconfort de l'espoir de jours meilleurs. Mais me détourner de ma quête à la recherche de cet espoir est hors de question.
Comment penser s'élever quand les bases de votre vie n'est plus que ruine et poussière ?

Comme cette pour cette ville, la reconstruction est futile tant qu'on ne règle pas le problème. Tout ce travail et cet argent pour raviver la flamme de l'ancienne capitale, pouvant être anéantit par un simple claquement de doigt d'un de ses nouveaux habitants. Chacun à cru passer à autre chose, aller de l'avant et oublier les jours sombres en remplaçant les décombres par de belles tours de vitres. Mais Sylar n'a pas été éliminé et même s'il l'avait été, la monstruosité sais toujours trouver un nouveau visage. Sylar, Clayface ou Sons of Liberty, les spéciaux sont les termites de ce monde d'illusions qui balance sur une vieille poutre de bois. Peu de rides auront le temps d'apparaitre sur mon visage avant que tout ne s'écroule à nouveau.

Tout comme moi, le monde ne pourra revenir en arrière avant de détruire celle qui vint troubler la paix d'une vie pleine d'ennui. Pour espérer revoir un jour le Soleil d'Odessa, je dois d'abord embrasser les ténèbres et suivre Charon jusqu'aux plus sombres contrées des enfers.

- C'est quoi cette mine sombre gamin, on est pas un service de pompes funèbres ici ! Pour la table 6 et j'veux voir toutes tes putains de dents !

C'est la mine la moins sombre possible que je termine ma journée de service au DescentCafé. Mais mes gestes animés d'une lenteur morbide et les commissures des lèvres subtilement tirées vers le bas, une étincelle vibre dans mon torse. Comme quand une piste vient titiller mes sens, je sens le parfum d'une jolie blonde m'embrouiller la cervelle.

Laissant mon boss me congédier avec des paroles enduites de délicatesse et une expression toute aussi radieuse que la mienne, je rejoins le forain attendant immobile sur le trottoir vide de monde, son regard fixé sur moi depuis qu'il attend notre départ pour le Sullivan Bros. Carnival.

- Il est bientôt une heure du matin, vous êtes sûr que ça ne va pas déranger ?

La question est bien inutile et une autre de ces réponses détournée du clown est la dernière chose que j'ai envie de recevoir, mais le silence lourd de la ville endormie applique une certaine pression sur mes épaules qui me fait frissonner. Tellement de vie, tellement d'insouciance sommeille dans ces immeubles alors que dans chaque ombre se cache un prédateur. C'est à la fois révoltant et excitant.

- Alors… Cette Lydia. Comment marche son pouvoir ? C'est comme ça que vous m'avez retrouvé ?

Suivant l'avenue éclairée par les lampadaires blancs, je presse le pas pour écourter le voyage. Etrangement, à cet instant, la foire et ses innombrables créatures me semble plus rassurante que cette simple rue vide.

[HRP : Désolé pour le retard >.< On s'arrête là et on passe à un autre sujet ? ]

Le bras du forain vient entourer mes épaules dans un geste un peu trop amical à mon goût. Me rassurant qu'il ne me menait pas vers un lieu vide ou j'y perdrais mon temps, il continua de marcher à mes côtés avec son éternel sourire. Je m'écarte de son étreinte d'un léger coup d'épaule, mais ne m'éloigne pas pour autant du forain. Même si ses habitudes plutôt tactiles m'exaspèrent, je ne peux m'empêcher de me rendre compte que la présence de se personnage loufoque mais chaleureux m'est agréable par cette promenade nocturne.
Moi qui suis tellement habitué à fuir la lumière des lampadaires et scruter le vide, seul, caché dans l'ombre, je découvre un autre visage à cette noirceur qui enveloppe chaque nuit de Traque.
Même si la lumière aveuglante de son carnaval doit bien souvent l'éloigner des ténèbres, Samuel semble plus à l'aise que moi dans cette rue vide de monde. Comme au milieu de la foule de jour, il marche fièrement, se distinguant spécialement du décor, ne laissant dans l'espace qu'une Trace brillante de son passage.

- Ma chère Lydia te montre ce que tu désires au fond de ton coeur, son corps est comme un miroir où se reflète ton désir le plus profond. Elle sait où tu peux la trouver, crois-moi. Et oui, c'est grâce à elle que nous marchons côte à côte sous la nuit, ce soir, Zach. Ce qui prouve que tu peux lui faire confiance. Lydia est un trésor.

Je m'écarte légèrement pour laisser tomber sa main posée sur mon torse avec un discret rictus agacé. C'est donc grâce à cette femme qu'il a pu me retrouver dans la foule de Manhattan et c'est par ce même moyen que je retrouverais Claire Bennet.
Cette idée parcouru mes veines en laissant une forte sensation d'impatience me crisper les muscles et les nerfs. Une fois de plus, une fois dans d'innombrables fois, je me rapproche de toi et te sens à ma portée.

Mais un frisson viens chasser mon enthousiasme avec un courant d'air glacé. Encore une fois où la frustration viendra brûler mes attentes ? Une fois de plus où le destin se rira de moi en me voyant revenir à la case départ ? Non, pas cette fois.

Mon regard se tourne vers Samuel qui continue de marcher silencieusement devant moi, sûrement perdu dans ses propres pensées. Non, il ne me laissera pas tomber. Grâce à sa puissance, je trouverais enfin la sortie de ce maudit labyrinthe.

Mais lui ? Qu'obtiendra-t-il de moi ?
Qu'est-ce que le grand Samuel Sullivan, maitre de la terre, peut bien attendre d'un regret éternel ? Des mots récents me reviennent alors en tête : "Ce que tu désires au fond de ton coeur".
Mes yeux vinrent une nouvelle fois épier le dos de mon guide, noircis sous mes sourcils froncés. Qu'a-t-il prévu pour moi ?

Au loin, j'aperçois une lumière scintillante me parvenir aux oreilles par une mélodie entêtante produites par des instruments inqualifiables. M'appelant comme la première fois, comme un vulgaire insecte, j'accélère le pas vers ce lieu bien pus magique qu'il n'y parait, pour rejoindre le Hurleur de Foire qui se trouve devant l'entrée, m'accueillant d'un geste cérémonial, comme s'il n'avait jamais quitté la foire et qu'un simple fantôme m'avait attiré une nouvelle fois vers le Sullivan Bros. Carnival.