Las Vegas Parano ? [PV : Chris, Alex / Mila]

Debout entre deux rangées de fauteuils, Alex regardait une dernière si tous ses papiers étaient en ordre : passeport, visa, billet pour Las Vegas. A présent qu’il se trouvait dans la zone d’embarquement, il lui était difficile de faire marche arrière. Et quand bien même, il n’en avait pas l’intention. S’il se rendait dans la ville du jeu, c’était avant tout pour tenter de venir en aide à Asami, mais également pour tenter d’aider Peter, étrangement associé à Sylar.

A priori, tout semblait en ordre. Il repéra Chris assis quelques sièges plus loin et se dirigea naturellement ver lui. Angela leur avait trouvé des billets d’avion quelques heures après leur conversation dans l’appartement de Peter. Décidément, cette femme avait encore énormément de ressources, malgré la chute récente de la Compagnie. S’asseyant à côté du britannique dont finalement, il ne connaissait pas grand-chose, il tenta d’amorcer un semblant de conversation, dans le seul but de détendre un peu l’atmosphère.

« Pour sûr, j’aurai préféré aller là bas pour faire comme tout le monde : jouer, gagner quelques cacahouètes, prendre une bonne cuite, jouer de nouveau pour tout perdre cette fois-ci. Mais visiblement, le sort en a décidé autrement. »

Le sourire du français disparut en voyant Mila s’approcher des deux jeunes hommes, un sac dans une main et une canette dans l'autre. Il resta alors quelques secondes bouche bée. Sur le nez, la rouquine portait une paire de lunettes de soleil totalement extravagante avec des strass à n’en plus pouvoir, dont l’étiquette du prix pendait encore à l’une des branches. A la place de son chemisier, elle arborait à présent un t-shirt moulant noir sur lequel figurait en rouge vif « Hottest Girl of this place ». Les cheveux relâchés, retombant sur ses épaules, elle s’approcha fière de ses emplettes et tout sourire de ses deux compagnons de voyage, tout en relevant ses lunettes.

« Euh … Mila … il me semble que le but de cette affaire, c’est quand même d’être discret, non ? Parvint finalement à articuler Alex. Là, c’est peut-être un peu inapproprié cette halte au duty free.

- Et blablabla … dis-moi, certaines choses ne changent pas décidément … On va à Vegas oui ou merde ? Là bas, tout est extravagant. Et puis, pourquoi lui aurait plus le droit que moi ? », acheva-t-elle en désignant d’un mouvement du menton Chris et son t-shirt haut en couleurs.

Alex fronça les sourcils, regardant tour à tour Mila et Chris. Cette fille lui semblait vraiment en décalage, aussi bien par son comportement que par ses propos parfois étranges. Les femmes entêtées, il connaissait, et il y avait un moment qu’il s’était fait une raison. Quand elles avaient quelques choses dans le crâne, ça n’était pas la peine de tenter de les faire changer d’avis. C’était peine perdue. Soupirant, Alex n’insista pas d’avantage.

« Très bien … j’ai rien dit … fais comme tu veux. Après tout, je suis pas ton père. »

Mila toussota, manquant de s’étrangler avec le soda qu’elle venait de porter à ses lèvres. Son souffle repris, elle afficha de nouveau un sourire radieux à l’encontre des deux jeunes hommes.

« Aucune raison que je sois toute seule à m’amuser. Vegas nous voilàààààààà !!!! »

Devant le regard interrogateur du français, la jeune fille commença à fouiller dans le sac d’achats qu’elle tenait à la main jusqu’à maintenant. La recherche dura quelques minutes, parfois ponctuée d’un « mais ça a été se fourrer où ? » ou d’autres « trop de conneries là dedans ». Finalement, radieuse, elle se redressa, regardant attentivement Chris, les yeux bleus pétillants de complicité.

« Pour toi Chris, j’ai ça. »

Pour accompagner sa voix, Mila sortit du sac un t-shirt en écartant bien les bras, afin de tendre un maximum le vêtement vert pomme avec inscrit dessus « Gamer, lover, f…er ! Vegas is mine ! ».

« Sérieux ! Il déchire pas trop celui là ?! Dés que je l’ai vu, j’ai pensé à toi ! Tiens, mets le vite qu’on voit ce que ça donne. »

Lançant le vêtement à Chris sans regarder, Mila avait déjà replongé dans son sac, de nouveau en quête d’un autre achat tout aussi improbable. Devant tant de frénésie, Alex sentit le coup venir, de plus en plus mal à l’aise.

« Ah ah ! Je l’ai ! »

Cette fois-ci, Mila brandit un t-shirt rouge vif sur lequel figurait « Beware, orgasmic material ! ».

« Ooooh non ! hors de question !

- S’il te plait.

- Non, inutile d’insister, je ne mettrai pas ça.

- Allez, fais pas ton rabat joie.

- Moi vivant, il est hors de question que je porte cette … cette chose !

- S’il te plaaaait. », acheva Mila avec un regard d’enfant qui supplie un adulte pour obtenir une confiserie.

Une nouvelle fois, Alex soupira. Regardant tour à tour Mila, Chris et les gens autour d’eux dans l’aéroport.

« Mais c’est ridicule Mila. On est sensé trouver de l’aide là bas, pas faire les clowns. C’est sérieux. Chris et moi attendons énormément de ce voyage … et toi, tu sembles juste prendre ça pour une partie de shopping.

- Très bien ! Tu n’as qu’à pas le mettre si ça t’est si insupportable ! , acheva Mila en jetant furieusement le t-shirt sur l’un des fauteuils. Moi, je voulais juste qu’on passe un bon moment ensemble avant de se lancer dans ce cauchemar, mais visiblement, c’était trop te demander. Sérieux, toujours sérieux, encore sérieux ! La barbe ! L’embarquement est dans trente minutes, je vais faire un tour en attendant. Et non, ne t’inquiète pas, je serai là dans une demi-heure pour monter dans ce foutu avion. »

Déjà Mila tournait les talons, retournant flâner parmi les magasins d’un pas pressé par la colère. Un peu penaud, Alex la regarda s’éloigner, pas certain d’avoir compris ce qu’il venait de se passer. Se tournant vers Chris, il tenta de retrouver un peu consistance.

« Euh … désolé … je pensais pas qu’elle réagirait comme ça. J’arrive pas bien à la comprendre. Elle passe d’une humeur à une autre sans prévenir. Une chose est sûre, ça promet pour le reste du voyage. »

Regardant le t-shirt que Chris tenait dans les mains, il tenta un sourire peu convaincu.

« Content de ton cadeau Chris ? »

Chris étant venu à l'appartement de Peter avec ses bagages, il n'avait plus rien à préparer avant de partir pour Vegas. Il accompagna donc Alex chez lui et attendit sagement que ce dernier ait fini d'emballer ses affaires dans son sac de voyage avant de prendre la route pour l'aéroport. Angela avait déjà tout prévu et leur avait réserver des billets d'avion pour le jour-même. Cela avait rassuré Chris, qui craignait devoir faire face à l'embarras d'exposer sa pauvreté de jeune ermite pas même apte à se payer un trajet en bus. Depuis le décès d'Asami, ses revenus s'étaient montrés relativement faible, et son dernier job s'était soldé par un désastre, suivi d'un renvoi immédiat. Il était bien sûr hors de question qu'il fasse tourner la boutique de la Japonaise sans cette dernière. Il vivait donc au jour le jour, comme lorsqu'il était arrivé à New-York, seul et paumé.

La zone d'embarquement dans laquelle ils patientaient n'était pas fort peuplée. Chris regardait par les grandes baies vitrées, attendant patiemment que la passerelle ouvre le chemin vers le monstre de métal qui allait parcourir le pays pour les emmener dans la ville aux mille et une machines à sous. Il ne pouvait s'ôter son objectif de l'esprit. Ce fut Alex qui le tira de ses pensées en venant s'asseoir à côté de lui. Un peu maladroit pour ce qui est de sympathiser, il tenta de lancer la conversation d'une manière qui amusa beaucoup l'Anglais.

« Pour sûr, j’aurai préféré aller là bas pour faire comme tout le monde : jouer, gagner quelques cacahouètes, prendre une bonne cuite, jouer de nouveau pour tout perdre cette fois-ci. Mais visiblement, le sort en a décidé autrement. »

Chris sourit d'un air innocent, qui aurait pu rappeler à Alex son amie aux cheveux roses disparue, et répondit d'un air absent.

- Je suis sûr qu'on va s'amuser comme des fous ! Ce n'est pas tous les jours qu'on sauve le monde, bien que ça ne semble pas être la première fois pour v...

Il s'interrompit en remarquant un changement d'expression sur le visage d'Alex. Suivant son regard, il tomba sur une petite bombasse qu'il eut beaucoup de peine à reconnaître : il s'agissait bel et bien de Mila. Vêtue d'un t-shirt moulan noir des plus provocants et arborant une paire de lunettes qui lui bouffaient la moitié du visage, elle s'avança vers les deux garçons en véritable touriste. Lorsqu'elle pencha la tête vers eux, l'étiquette du prix de ses lunettes balança au rythme de ses boucles d'oreille, dans une petite danse très rigolote. Chris se leva d'un bond et s'appuya sur le siège à côté de lui, faisant sursauter le pauvre quinquagénaire qui tentait d'y faire un somme.

- Délire ! s'écria-t-il d'une voix qui n'avait pas tout à fait fini de muer. T'as grave la classe, ma grande !

Mais Alex ne le vit pas de cet oeil. Exaspéré par le look qu'affichait la rouquine, il tenta vainement de la sermonner d'une autorité paternelle qu'il maîtrisait encore très mal. En ce moment-même, il devait maudire Angela de l'avoir obligé à jouer les baby-sitter pour partir à la recherche du plus grand psychopathe actuel aux Etats-Unis. Pauvre Alex...
Mila rétorqua aux réprimandes en prétendant qu'à Vegas, tout le monde était ainsi vêtu, et que -en désignant Chris du menton- elle n'était pas la seule à porter des fringues extravagantes. L'Anglais mit du temps à comprendre, lui qui était tellement habitué à son look et ne le trouvait pas anormal. Alex finit par battre en retraite, affirmant que de toute façon, ils n'était pas son père, et Mila manqua de s'étrangler avec sa boisson. Etrange réaction, se dit Chris pour lui-même. Tout à coup, la jeune femme se mit à fouiller dans son sac d'emplètes en ronchonnant et en sortit finalement un t-shirt vert flash aux inscriptions tape-à-l'oeil.

« Pour toi Chris, j’ai ça. Sérieux ! Il déchire pas trop celui là ?! Dés que je l’ai vu, j’ai pensé à toi ! Tiens, mets le vite qu’on voit ce que ça donne. »

Nouveau bond du garçon qui, sans hésiter, et le prit au vol en affichant un sourire jusqu'aux oreilles.

- Waouw, trop cool ! C'est géant !

Chris recevait rarement des cadeaux, et pour ainsi dire jamais avant d'avoir rencontré Asami. Sous le regard pétillant de Mila, il dévora son nouveau t-shirt des yeux comme s'il venait de voir la Vierge Marie en personne.
La rousse sortit alors un second t-shirt qu'elle tendit à Alex, mais la réaction de celui-ci fut bien moins enthousiaste. Il refusa catégoriquement, rouge de honte et jetant des regards embarrassés autour de lui. S'il avait pu utiliser le pouvori de Chris pour fondre sur place, il n'autait sans doute pas hésité une seconde. Malgré l'insistance enfantine de Mila, le Français ne céda pas. Il sembla chercher des excuses en prenant le jeune Miles pour témoin, mais celui-ci était trop occupé à sourire niaisement devant le « Gamer, lover, f…er ! Vegas is mine ! » inscrit sur son t-shirt vert pomme, ruinant toute la crédibilité de l'aîné du groupe.
La protégée d'Angela fut profondément vexée par ce refus et retourna vers les boutiques après avoir engueulé Alex sans aucun scrupule. Les garçons se retrouvèrent à nouveau à deux. Après un long soupir, le Français tenta de reprendre la conversation, encore secoué par la furie qui venait de tourner les talons (aguilles, bien entendu).

« Euh … désolé … je pensais pas qu’elle réagirait comme ça. J’arrive pas bien à la comprendre. Elle passe d’une humeur à une autre sans prévenir. Une chose est sûre, ça promet pour le reste du voyage. »

- C'est ça les gonzesses, mon vieux. On a beau faire de notre mieux, elles seront jamais satisfaites !

Il sourit en regardant pensivement dans le vide, comme s'il s'était parlé à lui même. Puis tout à coup, il redescendit sur terre et regarda Alex. Ce dernier désigna le t-shirt qu'il tenait toujours entre les mains.

« Content de ton cadeau Chris ? »

- Ouais ! répondit-il on ne peut plus franchement. D'ailleurs, ce serait bête de ne pas l'essayer !

Joignant le geste à la parole, il se releva et retira son t-shirt actuel, ignorant les regards outrés des dames et des petites filles des environs sur son torse nu. Il enfila son nouveau t-shirt et renifla l'ancien, ce qui eut pour effet de le faire grimacer.

- En plus, celui-ci commençait à devenir sale et tout collant ! Faut dire que j'ai fait un sacré bout de chemin avec ce truc sur le dos. Mais je ne t'abandonnerai pas, Monkeyman !

S'adressant à son ancien t-shirt flashy de l'homme-singe comme à un vieil ami, il le fourra dans son sac de voyage et se rassit à côté d'Alex désormais plombé d'une mine dépitée. N'y prêtant guère attention, Chris reprit la conversation.

- Alors, il est comment ce Peter ? Asami m'a beaucoup parlé de vous deux, vous savez. Vous, vous êtes plus ou moins comme je l'avais imaginé. Peut-être un peu plus simplet, ou niais, je sais pas. Mais l'autre là, Petrelli, parait que c'est un sacré numéro. Il collectionne les pouvoirs, c'est vraiment trop dément ! Il doit être sacrément puissant, le gars. J'comprends pas pourquoi il traîne avec un rebus de la société comme Sylar. Vous savez déjà comment vous allez vous y prendre, une fois en face d'eux ?

Décidément trop intéressé par le sujet, Chris ne remarqua même pas leur avion qui se gara face à l'ouverture, où des employés attendaient patiemment de pouvoir placer la passerelle correctement.

Devant l’air stupéfait du français, Chris ôta son t-shirt sans la moindre pudeur, afin d’enfiler celui qu’il venait de recevoir des mains de Mila. Reniflant l’ancien, il grimaça au regard de l’odeur quelque peu incommodante qu’il commençait à dégager, avant de le fourrer dans son sac. Les explications qu’il fournit quant au niveau de son hygiène, achevèrent de faire comprendre à Alex qu’il était bel et bien accompagné de deux adolescents. Puis, tout naturellement, l’anglais reprit le cours de la conversation, demandant d’avantage de détails sur Peter. L’espace d’un instant, Alex crut avoir une hallucination auditive. Ne venait-il pas de se faire traiter de niais et de simplet dans une même phrase ? Devant la spontanéité juvénile de Chris, le jeune homme préféra ne pas relever. Visiblement, Asami lui avait parlé d’eux et le français correspondait relativement bien à la description que Chris s’était faite de lui. Pour ce qui était de Peter, le pouvoir de ce dernier semblait particulièrement intriguer le britannique.

« Peter est quelqu’un qui a la tête sur les épaules, et ceci, malgré son pouvoir. Je crois que seul Asami le surpasse en matière d’humanisme. Il a vraiment le cœur sur la main. Quant à son association avec l’autre timbré de psychopathe … disons que l’on a des tous des choix à faire à un moment ou un autre. Lui, il a été capable de faire cette concession pour aider Claire. Personnellement, je ne crois pas que j’aurai pu en faire autant … quoi que, pour quelqu’un d’autre … peut-être. »

Alex garda le silence quelques secondes en réfléchissant à la dernière question du jeune homme. Que ferait-il une fois qu’il aurait retrouvé Peter et Sylar. Petrelli n’était pas un problème. Au contraire, le retrouver serait un réel plaisir. Mais Sylar, c’était une autre histoire. Lui coller son poing en pleine figure, ce serait surement le premier choix d’Alex, mais il fallait bien l’avouer, ce ne serait certainement pas le plus diplomatique.

« Qu’est-ce que je ferai une fois qu’on les aura retrouvés ? Excellente question. Avec Peter, les choses se feront naturellement j’imagine. Et puis, de toute manière, il sera surtout accaparé par tes explications. Quant à l’autre … il vaut mieux ne pas trop y penser. Espérer qu’il ne soit pas là au moment des retrouvailles est certainement la meilleure chose que l’on puisse nous souhaiter. Ce type est totalement imprévisible … qui plus est, il apprécie particulièrement jouer avec moi … si l’on peut appeler ça comme ça. Aucun doute qu’il jubilera de me retrouver. »

L’avion venant de se mettre en place, le couloir articulé reliant la zone d’embarquement à l’appareil s’installait tranquillement. Alex se relevant en soupirant, tout en regardant autour d’eux. Finalement, il ramassa le t-shirt que Mila avait laissé sur le siège à côté de lui.

« Je crois que ça va être l’heure, et Mila-

- Est là comme elle l’avait promis », termina la jeune femme en arrivant tranquillement.

Son visage s’illumina lorsqu’elle aperçut Chris dans son nouveau t-shirt. S’approchant de lui, elle attrapa le cadeau par le bas afin de bien le tendre sur le jeune homme, révélant ainsi l’intégralité du message sur le fond vert pomme.

« Oh my God ! J’avais raison, ce truc est fatal ! Il te va comme un gant. Sans déc’, je suis vraiment une tueuse pour trouver des trucs pareils ! Normal, je suis - »

La mine fière d’elle, elle acheva sa phrase en désignant du bout des doigts son propre t-shirt. Adoptant un regard moins enjoué, elle tourna ensuite son attention sur le français, constatant que lui n’avait pas changé sa tenue vestimentaire.

« Et Grincheux, il veut toujours pas participer au délire ? Oh … mais j’y suis. En fait, tu es peut-être Timide, plutôt que Grincheux. »

Soupirant, Alex préféra une nouvelle fois capituler. Regardant rapidement autour de lui, il ôta à son tour son haut afin d’enfiler le t-shirt rouge à la place. Mila poussa alors un hurlement strident de joie et victoire qui raisonna dans tout le hall d’embarquement en le voyant faire, tout en sautant sur place et en applaudissant frénétiquement. Pour le coup, à présent, tous les autres voyageurs les regardaient.

« Contente ?

- Tu es parfait Toy Boy ! Merciiiiiii. Bon alors les garçons, vous allez embarquer oui ou non ! Si vous continuez de lambiner comme ça, on va le rater cet avion ! Allez ! Hop ! Hop ! Hop ! »

Une fois dans la file d’attente pour rentrer dans l’appareil, Mila, billet et carte d'identité en main, tapota sur l’épaule de Chris, placé juste devant elle. A présent, elle avait un visage sérieux, contrastant totalement avec l’apparence teenager qu’elle avait quelques minutes auparavant.

« Eh ! Chris ! Tu peux nous en dire plus au sujet de ton histoire avec Angela ? Si tu trouves ça trop personnel, t’es pas obligé de répondre … ou de t’enflammer, ça serait dommage de flinguer ton nouveau t-shirt. »

Comment était-il possible de garder la tête sur les épaules lorsqu'on possède le don le pluis puissant qui puisse exister au monde ? Lorsque chaque rencontre donnait lieu à de nouvelles sensations, à une capacité dépassant encore davantage les limites que l'on s'était fixé ? Une force sans limites, qui peut parfois se retourner contre nous, jusqu'à nous faire commettre des actes terribles, sans que l'on aie la volonté de les contrôler. Qui peut détruire une ville toute entière en un seul instant... Comment ce Peter Petrelli arrivait-il à vivre avec une telle responsabilité, qui constituait à vrai dire un véritable fardeau ? Il fallait une force morale inégalable. S'il n'avait pas eu le coeur sur la main, s'il avait été égoïste et malintentionné, le monde aurait très certainement couru à sa perte bien plus vite que prévu. A moins que son impitoyable mère ne l'aie éliminé quand elle en avait encore l'occasion. Lorsqu'il n'était qu'un petit enfant... Chris préféra réprimée ces pensées morbides. Ceci dit, les paroles d'Alex ne vinrent pas arranger les choses. Il se mit à parler de Sylar. Le Français semblait lui vouer une haine profonde, et avoua qu'il n'aurait jamais pu s'associer avec un tel psychopathe, même pour sauver un être cher. Il allait pourtant devoir le revoir très bientôt, et ce pour sauver Asami.
Il sembla assez perdu lorsque Chris lui demanda ce qu'il allait faire une fois qu'il se retrouverait devant son pire ennemi. Après un long silence de réflexion, il répondit qu'avec Peter il n'y aurait aucun problème, mais qu'en ce qui concerne Sylar, le mieux qu'ils puissent espérer est qu'il ne soit pas présent lors des retrouvailles. Deux hommes imprévisibles à gérer, dont la puissance était ravageuse. *Ca promet* pensa l'Anglais.

Ce fut lorsqu'Alex ramassa son charmant t-shirt offert par Mila que Chris comprit que l'avion s'était mis en place, prêt à ouvrir ses portes pour accueillir ses nouveaux passagers. La rouquine arriva alors qu'ils s'apprêtaient à se lever, pile à l'heure.
Une expression ébahie s'afficha sur son visage lorsqu'elle vit que Chris avait déjà enfilé son nouveau t-shirt. Elle le lui ajusta et venta ses goûts en matière vestimentaire, alors que le britannique, pris au jeu, s'amusait à prendre les poses les plus ridicules comme s'il se trouvait dans un défilé de mode de show télévisé pour décérébrés. Mila se remit ensuite à narguer Alex, qui finit par céder et retirer son t-shirt, on ne peut plus embarassé de se dévêtir partiellement en public. Il tenta désespérément d'être discret, mais en vain : la jeune femme se mit à crier de joie, attirant l'attention des autres voyageurs sur eux. Le Français en fut rouge de honte et fonça comme une flèche vers la file qui se formait à l'entrée du tunnel mobile, tête baissée. Les deux cadets le suivirent. Une fois dans la file, Mila s'approcha discrètement de Chris. Son air était redevenu sérieux, comme si la gamine foldingue au cri strident s'était métamorphosée en une autre personne.

« Eh ! Chris ! Tu peux nous en dire plus au sujet de ton histoire avec Angela ? Si tu trouves ça trop personnel, t’es pas obligé de répondre … ou de t’enflammer, ça serait dommage de flinguer ton nouveau t-shirt. »

Chris eut envie de rire, mais il avala cette question de travers et, pris au dépourvu, détourna le regard.

- Je... commença-t-il avec peine.

Il déglutit non sans difficulté et prit une grande inspiration. La seule pensée de ces cauchemars le mettait mal à l'aise, alors en parler n'était pas une mince affaire.

- Je fais des cauchemars depuis ma rencontre avec Asami. Au début, c'était très flou mais déjà terrriblement flippant. Puis c'est devenu de plus en plus précis, mais je ne comprends toujours pas ce que tout cela signifie. C'est tellement réel qu'on dirait un souvenir, seulement je n'ai jamais vécu une telle scène. C'est... c'est un truc affreux, genre qu'on ne voudrait même pas imaginer. Mes parents... tout ce sang. Pourant, ils ne sont pas morts ! Et puis ces deux hommes, un black chauve et un type à lunettes d'écailles. Puis cette femme, Angela Petrelli. Je ne comprends pas. Tout cela ne s'est jamais produit, mais chaque nuit ça me hante.

Le récit quelque peu décousu de Chris était sorti à un débit tellement élevé qu'il en avait perdu son souffle, complètement confus. Il tenta de reprendre ses esprits et de donner un peu plus de cohérence à ses propos.

- Le jour où j'ai rencontré Asami, elle m'a fait découvrir mon don, et m'a partagé le sien. Elle m'a appris à contrôler mes molécules, à devenir la matière avec laquelle j'entrais en contact. Pour l'instant, je n'y arrive qu'avec l'eau et le feu, et il m'est arrivé de fusionner avec du béton ou de la brique, mais plus difficilement. En redevenant moi-même, je réorganise ma structure moléculaire. Et j'ai l'impression que...

Il lacha un petit rire embarrassé et se gratta la nuque.

- Tu vas trouver ça ridicule... Mais j'ai l'impression que certains trucs se remettent en place dans mon cerveau, genre, des pièces du puzzle qui ont été cachées et qui refont surface. Comme si j'arrivais à reconstruire ma mémoire. Seulement, je n'ai jamais été amnésique ou quoi, donc je n'y comprends rien ! En plus, à ce que je sache, mes parents sont toujours en vie, même s'ils m'ont tous les deux abandonné lâchement. J'sais pas, j'y comprends rien...

Tous ces mystères le fatiguaient. Il essayait de comprendre ce qui se passait dans sa tête, mais n'y parvenait pas. Il avait l'air complètement blasé. Mais tout au fond de ce regard fatigué, se cachait une petite étincelle d'espoir.

- Tout cela n'a plus d'importance, de toute façon. J'me dis que je dois bien vivre avec, tu vois. La vieille Petrelli refuse de me dire ce qu'elle sait, mais je finirai bien par le savoir, un de ces jours. J'aimerais retrouver mon oncle aux Etats-Unis, mais il reste introuv...

Il s'interrompit, comme traversé par une idée qui ne s'exprima qu'à moitié. Et s'il n'était pas tombé sur Angela par le fruit du hasard ? Une pensée certes saugrenue, mais ce n'était pas une possibilité à exclure. Il la conserva dans un coin de sa tête, il était encore trop tôt pour en parler à Mila. Ni à qui que ce soit d'autre, d'ailleurs. Il bifurqua discrètement dans son monologue improvisé.

- De toute façon, ce n'est pas grave. L'important maintenant, c'est que je retrouve Asami. Je dois la sauver, au nom de tout ce qu'elle a fait pour moi. Tu sais, j'me serais marré il y a quelques mois si je m'étais entendu dire ça aujourd'hui, mais elle est ce qui m'est arrivé de mieux. C'est la personne la plus précieuse à mes yeux, elle est exceptionnelle. C'est la seule qui me comprend... Je crois qu'Alex doit savoir de quoi je parle.

Il eut un petit sourire en coin, signe de complicité.

- ...N'est-ce pas, monsieur qui écoute les conversations d'une oreille ?

L'air de rien, Chris était déjà parti de la boutique d'Asami depuis un sacré bout de temps. Mais la grande aventure ne faisait que commencer. Une longue quête qui l'emmènerait à travers le pays, voire plus loin encore. Une quête pour retrouver celle qui l'aimait. Lorsqu'il lisait ce genre de trucs dans les bouquins, dans les romans d'aventure ou d'amour, cela le faisait beaucoup rire. Mais maintenant, il comprenait enfin le sens réel du mot "but". Il avait trouvé sa voie, sa destinée. Pour la première fois de son existence, il se sentait utile, il était déterminé. Il devait la retrouver, même s'il devait fouiller chaque recoin du monde ou contacter tous les manipulateurs du temps qui existent, afin d'éviter l'incident fatal...
Si seulement il savait qu'Asami se trouvait à cet instant précis dans le même aéroport qu'eux, à moins de 500 mètres...

La question sembla quelque peu troubler le jeune anglais. Détournant le regard, il sembla chercher un instant ses mots. Mila n’avait aucun doute, elle venait de mettre le doigt sur quelque chose de sensible. Ceci dit, vu la réaction qu’il avait eu dans l’appartement de Peter, ce n’était pas bien difficile à deviner. Suite à sa rencontre avec Asami, il s’était mis à faire de terribles cauchemars. Ces derniers mettaient en scènes ses parents assassinés, Angela, ainsi que deux hommes : un homme de couleur chauve, et un autre aux lunettes à écailles. Mila avait beau y réfléchir, elle ne se souvenait pas avoir vu de tels individus en compagnie d’Angela, ni même entendu cette dernière mentionner l’existence de telles personnes. A priori, ces cauchemars n’avaient rien de fondé, la vérité étant, d’après Chris, totalement différente.

Devant le comportement nerveux du jeune homme, Alex tendit discrètement l’oreille à la conversation. Si Chris venait à soudainement perdre le contrôle comme il l’avait fait face à Angela, mieux valait être prudent et prêt à intervenir à tout moment.

Avec le concours d’Asami, Chris avait appris à maitriser son pouvoir. Progressivement, il s’était approprié son don, une forme de remodelage moléculaire. Toutes ces réorganisations semblaient rendre petit à petit les cauchemars moins confus. Chris en avait déduit que d’une certaine manière, il reconstruisait progressivement sa mémoire, débloquant certaines réponses.

A ce moment là, Alex repensa à la réponse d’Angela face aux menaces du britannique. Selon elle, le jeune homme détenait toutes les réponses, et Alex était en mesure de l’aider à les trouver. Dans un premier temps, le français n’avait pas souhaité tenir compte de ces propos, voyant clairement derrière ces paroles un subterfuge pour s’assurer que les deux garçons iraient bien ensemble à Vegas.

Cependant, Chris ne perdait pas de vu son objectif principal : aider Asami. Le reste était secondaire tant il attachait d’importance à la nipponne. Mila sourit doucement, attendrie par la passion de l’anglais.

De son côté, Alex devint rouge pivoine lorsqu’il comprit que Chris savait qu’il les écoutait. Se retournant, il ne parvint qu’un faire un bref signe de tête affirmatif. Puis, reprenant des couleurs un peu plus naturelles, le français se recentra sur sa réflexion précédente. Même si Chris prétendait ne jamais avoir eu de souci de mémoire, comment pouvait-il en avoir la certitude. Après tout, si l’on a oublié une partie de sa vie, comment s’en rendre compte, étant donné que l’on n’a même pas conscience qu’elle manque. La curiosité montait, se faisant de plus en plus pressante dans l’esprit d’Alex. Ça ne prendrait que quelques secondes, Chris n’était même pas obligé d’être au courant. Et ainsi, le français en aurait le cœur net. Alors qu’il fixait intensément l’anglais, Mila remarqua le comportement de son père, l’observant avec insistance à son tour.

Cette fois, Alex n’y tenait plus : il devait savoir si ce gamin qu’il se trimbalait avait une mémoire déficiente ou pas. Se concentrant sur Chris, il tenta de capter l’essence vitale de ce dernier, de la repérer parmi la foule environnante. Depuis qu’il avait récupérer ses pouvoirs, il n’avait jamais retenté ce genre d’expérience. A présent, il restait à espérer qu’il n’ait pas perdu la main. Puisant d’avantage dans sa concentration, il chercha la trace du jeune homme, afin d’en sonder l’intégrité.

Il commença alors à sentir quelque chose. C’était Chris, pas de doute. Une essence jeune et vive. Pourtant, certaines choses vibraient étrangement. Alex ne pouvait clairement exprimer ce que ces choses anomalies étaient, mais s’il avait dû mettre un mot dessus, il les aurait qualifiées de traces de pollution, un peu comme si quelque chose venait entacher l’énergie de Chris, des substances étrangères à son organisme, provoquant des déséquilibres mineurs.

Soudain, des parasites interférèrent dans la concentration d’Alex. D’autres forces vitales venaient s’imposer à lui alors qu’il étudiait Chris. Ces énergies, le français les connaissaient bien, c’était d’ailleurs certainement pour cette raison qu’elles lui sautaient ainsi au visage. Le premier flash qu’il ressentit, ce fut la présence de Kerry. Certes, elle était faible et légèrement différente, mais Alex en aurait mis sa main à couper, il s’agissait bien de la signature de la journaliste. Pourquoi la sentait-il ici ? Il n’en avait aucune idée. Puis, d’autres flashs vinrent brouiller la capacité du français, s’abattant sur lui par rafales. Cette fois-ci, il s’agissait de la trace d’Asami. Pourquoi ? Alex ne pouvait pas plus l’expliquer que pour Kerry. A moins que Chris porte en lui une part de l’essence de la japonaise ? Non, c’était impossible.

« N’insiste pas trop … ça va revenir progressivement. Ne t’inquiète pas. »

Alex regarda alors Mila droit dans les yeux. Elle avait deviné ce qu’il avait tenté de faire. Contrarié par cet échec, mais également perturbé par ce qu’il avait ressenti, le français préféra en rester là dans ses investigations. Mila avait sans doute raison, il en voulait trop et trop rapidement. Se laisser du temps ne serait surement pas une mauvaise chose.

« Je vais tenter de dormir durant le vol … j’en ai besoin. Ça s’affole un peu là dans ma tête. Je ressens des choses qui n’ont pas lieu d’être. Après quelques heures de sommeil, ça devrait aller mieux.

- Sans doute. Au fait Chris … pourquoi chercher ton oncle ? Tu penses qu’il pourrait t’apporter des réponses sur cette histoire ? Tu le dis introuvable … à mon avis, personne ne peut être introuvable bien longtemps. Quand on sait chercher on trouve. »

- Alex ?

Les joues rouge pivoine du Français étaient peu à peu redevenues normales alors que celui-ci s'était immobilisé, comme s'il venait de voir un fantôme. Il entra alors dans un état second, comme s'il avait complètement décroché de notre planète. Cela dura plusieurs secondes, voire même des minutes entières, laissant les gens les dépasser dans la file pour embarquer.

- Alex ?

C'était comme s'il était absent, comme un animal qui avait entendu un ultrason inaudible pour nous pauvres humains, et qui captait toute son attention. Il tourna d'ailleurs la tête à plusieurs reprises, comme attiré par plusieurs sources de... de quelque chose. Il regarda autour de lui, quand Mila parvint enfin à le ramener sur Terre d'une voix assurée.

« N’insiste pas trop … ça va revenir progressivement. Ne t’inquiète pas. »

Elle avait visiblement compris ce qu'il traffiquait. Essayait-il d'utiliser son pouvoir ? Pourtant, Chris pensait que la spécialité de celui-ci était le transfert d'énergies vitales. A quel type de sixième sens venait-il donc de recourir ?
Alex fixa la rouquine droit dans les yeux, avec une expression mêlant contrariété et confusion. Il décida d'abandonner.

« Je vais tenter de dormir durant le vol … j’en ai besoin. Ça s’affole un peu là dans ma tête. Je ressens des choses qui n’ont pas lieu d’être. Après quelques heures de sommeil, ça devrait aller mieux.

Alors c'était vrai, il ressentait des choses imperceptibles au commun des mortels. Ce qui était sûr et certain, c'est qu'il aurait en effet besoin d'un peu de sommeil, car un long périple semé d'embûches les attendait probablement. Mila se tourna vers Chris, reprenant la conversation délaissée quelques instants plus tôt.

- Sans doute. Au fait Chris … pourquoi chercher ton oncle ? Tu penses qu’il pourrait t’apporter des réponses sur cette histoire ? Tu le dis introuvable … à mon avis, personne ne peut être introuvable bien longtemps. Quand on sait chercher on trouve. »

La question était délicate. A force d'avoir cherché son oncle sans succès pendant plusieurs semaine, cette quête avait peu à peu perdu de son sens, le but de l'Anglais étant devenu de rester auprès de sa bien aimée afin qu'ensemble, ils trouvent des réponses à leurs questions.

- Mon oncle Jimmy est la seule famille qui me reste. Mes vieux m'ont abandonné, alors je me disais que lui, peut-être... Mais impossible de le trouver. C'est un brillant généticien, c'est pourquoi oui, il aurait pu éventuellement avoir des réponses à toutes mes questions. Mais cela n'a plus d'importance maintenant, car il s'est envolé. Evaporé ! Comme s'il n'avait jamais existé. Il me semblait pourtant qu'il avait écrit plusieurs ouvrages, puis un professeur de génétique est facilement trouvable en principe. J'en ai visité, des universités, avec Asami...

Il eut un nouveau pincement au coeur, comme à chaque fois qu'il parlait d'elle. Il devait toujours fournir un effort considérable pour prononcer son nom sans que sa voix ne tremble, preuve que la blessure était encore à vif. Il décida de dévier le sujet de conversation afin de ne pas trop remuer le couteau dans la plaie.

- Tiens, au fait Mila... Pourquoi tu te donnes tant de mal, toi ? Je veux dire, Angela, elle a un but, elle y trouve son intérêt et apparemment elle a de bonnes raisons de vouloir sauver le monde. Mais toi, on dirait que tu organises pas mal de trucs dans cette affaire, mais on ne sait même pas d'où tu viens. Comment t'as connu la vieille ?

Ils approchaient enfin du guichet. Chris sortit sa carte d'embarquement et ses papiers d'indentité, prêt à les présenter à l'hôtesse. Il avait conscience que sa question était assez délicate, mais elle titillait sa curiosité depuis un petit moment déjà. Après tout, il avait entendu la raison de la venue de chacune des personnes présentes à l'appartement de Peter Petrelli, sauf celle de cette fille, qui malgré son air cool et décontracté, avait quelque chose de mystérieux. Comme si elle savait beaucoup de choses et ne disait pas tout. Même Angela lui avait parue moins intriguante.

A priori, Chris jouait la carte de la sincérité avec Mila. Il était à la recherche de son oncle, visiblement la seule famille qu’il lui restait, ses parents l’ayant abandonné. Pourtant cet oncle en question, un généticien renommé, restait introuvable, comme s’il n’avait jamais existé. Toutes les recherche du britannique s’étaient montrées infructueuse. Lorsqu’il mentionna le prénom d’Asami, un voile de tristesse se posa l’espace de quelques secondes sur son visage. Une chose était certaine, Chris tenait énormément à la japonaise. Ce regard mélancolique, Mila ne le connaissait que trop bien. Longtemps elle avait eu le même suite à l’assassina de ses parents. Pourtant, le temps avait fait son œuvre, refermant les plaies. Certes les cicatrices restaient visibles, mais la peine était devenue moins insoutenable avec le temps.

Asami … Une véritable légende pour Mila. Son père lui en avait souvent parlé lorsqu’elle était petite. Pourtant, elle n’avait jamais eu l’occasion de la rencontrer. Etrangement, elle avait l’impression de la connaitre à force d’avoir écouté son père en faire le portrait.

La jeune rousse fut sortie de sa réflexion lorsque Chris s’adressa de nouveau à elle. Il voulait savoir quelles étaient les raisons qui la poussaient à se battre, d’où elle venait et comment elle avait rencontré Angela. Mila aurait voulu pouvoir jouer la même carte de la franchise. Pourtant, elle savait pertinemment que ce n’était pas une bonne idée, surtout avec Alex juste à côté d’elle. Souriante, elle prit une profonde inspiration, affichant un air convainquant.

« Mes objectifs … sujets très intéressants. J’aspire à offrir aux futures générations ce que je n’ai malheureusement pas pu avoir : une famille sereine, un foyer stable, qui ne change pas tous les quatre matins, un genre de sanctuaire sécuritaire. Vivre dans la crainte du moment suivant n’est pas vraiment l’idéal pour grandir. Heureusement mes parents étaient aimants à un point que je n’aurai pu souhaiter … oui, je dis bien étaient … car à présent, ils ne sont plus. »

Sa phrase s’acheva alors que Mila portait son regard sur le dos d’Alex, situé juste devant Chris et elle dans la file d’attente. A ce moment très précis, elle aurait souhaité tout lui révéler, le prendre dans ses bras, et le serrer comme quand elle était gamine. Puis, de nouveau, elle porta son attention sur le jeune anglais.

« Voilà, c’est ce genre de situation que je souhaite empêcher de se reproduire pour d’autres. Quant à Angela, c’était une connaissance de mes parents. Nos objectifs étaient complémentaires, c’est ce qui nous a conduites à travailler ensemble. Je sais bien ce que tu te dis à son sujet. C’est d’ailleurs ce que beaucoup de gens pensent. Mais je me ferai l’avocat du Diable. L’attitude que se donne Angela n’est qu’une façade, un masque pour se protéger, tu peux me croire. Derrière tout ça, elle est comme toi et moi, un être humain avec son cœur, ses doutes et ses craintes. Ses actions peuvent sembler obscures, malhonnêtes et purement intéressées. Pourtant, je peux t’assurer que lorsque l’intégralité d’un de ses plans se révèle au grand jour, lorsque tout est en place et qu’elle abat ses cartes, alors les plus objectifs de ses juges ne peuvent admettre qu’une seule chose : au final, ses machinations n’étaient là que pour mieux servir la communauté. Je ne dis pas qu’elle ne parvient pas à trouver un intérêt dans ce qu’elle entreprend, bien au contraire. Mais c’est une juste récompense au regard de tout ce qu’elle est obligée de supporter en endossant ce rôle de mégère … et puis, honnêtement, qui ne profiterait d’un petit bonus dans de telles circonstances. »

Alex ayant déjà passé le poste d’embarquement, et Chris étant en train de montrer ses papiers pour pouvoir monter à bord de l’appareil, Mila prépara les siens. Une fois ce détail réglé, les deux jeunes adultes allaient pour rejoindre Alex qui les attendait un peu plus loin. Mila en profita pour se rapprocher de Chris et lui chuchoter à l’oreille.

« Ne t’inquiète pas pour Asami. Ils réussiront à arranger les choses, tu peux me croire. S’il y a des personnes sur cette planète qui tiennent au moins autant que toi à cette jeune fille, ce sont Peter et Alex. En attendant, cesse de te tourmente et garde la foi. »

S’insinuant dans l’esprit du jeune homme, Mila tenta d’apaiser son trouble intérieur. Curieusement, même si elle le connaissait depuis peu et qu’il était un peu étrange et décalé, la jeune fille appréciait beaucoup l’anglais. Involontairement, il la faisait rire, lui rappelant un peu les raisons qui l’avaient conduite à entreprendre un tel voyage.

* Tout se passera bien, le temps fera son œuvre et tout rentrera dans l’ordre.*

Arrivant au niveau d’Alex, la jeune fille remit ses extravagantes lunettes de soleil en place sur son nez et afficha son sourire le plus radieux.

« Bon, espérons que la bouffe sera pas trop dégueu et le film pas trop minable. Une fois, j’ai du me taper l’Arme Fatale 11 … vu le navet que c’est … je vous explique pas la torture. »

Se plaçant entre le français et l’anglais, Mila les prit par les épaules afin de les encourager à avancer dans le couloir qui les conduiraient tous les trois dans l’avion. Durant quelques secondes, elle en oublia presque ce qu’elle faisait là, ayant simplement la sensation d’être une jeune adulte partant en vacances pour Vegas avec un groupe d’amis, encore une chose qu’elle ne connaitrait jamais. A cette idée bien sordide, son franc sourire sembla s’ébrécher un instant, le malaise allant jusqu’à lui faire retirer ses mains des épaules des deux garçons. Car oui, Mila n’aurait jamais l’occasion de faire un tel voyage avec des gens qu’elle pourrait appeler « Amis ». Elle n’en aurait pas le temps, ou plutôt, elle n’aurait pas sa place dans le temps pour vivre une telle expérience. Portant une main à son front, elle tenta de se reprendre, cherchant par ce geste à se raccrocher à quelque chose de plus palpable. La seule chose qu’elle parvint à saisir furent ses lunettes, qu’elle ôta alors. Une légère pression sur son bras la fit frissonner. C’était la main d’Alex qui venait de se poser sur elle. Sans réfléchir, elle se précipita silencieuse dans ses bras et refusa de la lâcher.

« Mila … ça va aller ? Si tu as peur de l’avion, on peut aller te chercher un truc pour te détendre, ou je sais pas.

- Non … je n’ai pas peur de l’avion, c’est maman qui en a peur. Moi, j’ai peur tout court. »

Déconcerté, et ne comprenant pas vraiment ce que lui racontait la jeune rousse, Alex lança un regard perplexe à Chris. La prenant dans ses bras pour tenter de la rassurer, malgré son embarra flagrant, le français tenta de lui apporter quelques paroles réconfortantes.

« Ça n’est pas grave Mila. Nous en sommes tous là. Nous avons tous peur. Ce serait stupide de ne pas avoir peur. C’est un sentiment naturel lorsque l’on vit une situation comme la notre. »

Silencieuse, Mila continuait de s’agripper à Alex. De plus en plus mal à l’aise, le français se racla la gorge, ne sachant plus vraiment quoi dire de plus.

« Ok. Mila, s’il te plait, on va aller dans l’avion et aller à Vegas comme on l’a prévu depuis le début. Il ne t’arrivera rien, je … je te le promets. Et puis, ce serait dommage de ne pas aller là bas, maintenant que tu nous as trouvé ces supers t-shirts. »

Mila se détacha de son père tout en lâchant un rire étouffé. Les doutes dissipés pour un moment, la jeune fille parvint à se ressaisir à l’aide d’une profonde inspiration.

« Merci.

- De rien. »

Bras dessus, bras dessous, Mila saisit Chris et Alex, et tous les trois, ils traversèrent le tunnel qui les conduisait à l’intérieur de l’appareil.

A la question un peu indiscrète de Chris, Mila prit une profonde inspiration, comme une fillette s'apprêtant à débiter un poème appris par coeur. A priori, ses objectifs semblaient étonnamment nobles pour une jeune femme de son âge, et surtout de son tempérament. Offrir à son prochain ce à quoi on n'a jamais eu droit, voilà une bien belle cause. Trop belle pour être vraie ? Privée de foyer et de famille, voilà comment se peignait le passé de Mila. A première vue, on ne pourrait croire que sa vie fut à ce point pénible, mais à bien y réfléchir, Chris avait repéré à plusieurs reprises des comportements un peu étranges chez la rouquine, et une certaine inquiétude dans son regard. Ces tourments avaient d'ailleurs souvent l'air adressés à Alex. L'attitude de Mila contrastait considérablement avec son numéro de fashion victim en folie quelques instants plus tôt. Dans un sens, elle était un peu comme l'Anglais. Lui aussi avait perdu ses parents, même si de toute évidence ceux-ci n'étaient pas morts, malgré les cauchemars incessants qui lui présentaient le contraire. Une fois de plus, elle dirigea son regard vers Alex, patientant devant eux dans la file d'attente. Il avait bien compris qu'elle ne lui avait pas tout dit, et qu'elle portait un intérêt tout particulier au Français, relation encore difficile à interpréter.

Quoiqu'il en fût, Chris eut du mal à constater le lien entre des enfants privés de foyers et l'enlèvement de Claire. Mila donnait l'air d'en savoir davantage sur les conséquences qu'entraînerait l'exploitation de la cheerleader à des fins machiavéliques. L'Anglais espérait qu'Angela, cette soi-disant amie de ses parents, ne la mène pas en bateau également. Seul l'avenir le leur dirait. Ceci dit, d'après les dires de la rouquine, celle-ci connaissait assez bien la mère Petrelli. Cette dernière ne serait pas aussi vicieuse qu'elle en avait l'air, se donnant des airs de dure afin de masques sa vulnérabilité. Cliché on ne peut plus classique, mais ce n'était pas une possibilité à écarter. Restait à voir si son plan se solderait par un succès, où s'ils s'étaient fait rouler en toute beauté. A vrai dire, tout ce qui importait pour Chris était de ramener Asami et de veiller sur elle, afin qu'elle ne soit plus jamais malheureuse.
Le jeune homme présenta ses papiers à la suite d'Alex et passa le poste d'embarquement. Avant de rejoindre le Français, Mila s'approcha du britannique et lui chuchota à l'oreille de ne pas s'inquiéter pour Asami, qu'ils réussiraient à arranger les choses, comme si elle en avait la certitude. Il ignorait à quoi cela tenait, mais elle fut étrangement convaincante, et ses paroles eurent le don de le recharger à bloc. Elle marcha ensuite en directoin d'Alex et se remit à le charrier, amusée par le malaise de ce dernier.

Durant se bref échange, Chris se tint un peu à l'écart, remarquant quelque chose d'étrange. Il ne savait pas vraiment d'où cette impression étrange venait, mais il fut persuadé de sentir une légère brise à l'odeur... de rose. Un parfum trop familier pour être le fruit du hasard. Ses sens lui jouaient-ils des tours ? Etait-ce parce qu'il venait de parler d'elle avec Mila ? Il se retourna, comme s'il s'attendait à ce que, dans une vision surréaliste, elle apparût au milieu de l'aéroport. Mais il tomba juste nez à nez avec un groupe de touristes hollandais qui le regardèrent avec curiosité. Reprenant son air niais et plaisantain, il lança à l'un d'entre eux :

- Chouette, le chapeau de paille.

Bien entendu, le trentenaire moustachu en question ne comprit pas un mot à ce que Chris lui dit, et ce dernier retourna auprès de ses deux camarades de voyage. Mila se plaça entre eux, ses bras autour de leurs épaules, prête à embarquer pour le grand voyage. Son sourire s'effaca brutalement et elle se rétracta, comme frappée d'une pensée sordide. Ses doigts se promenèrent sur son visage avant de tomber sur une des branches de ses lunettes, qu'elle retira aussitôt. Ses yeux trahissaient une certaine mélancolie.

- Hey Mila, t'inquiète pas. Tout va bien se passer, tu sais.

Alex posa une main sur son épaule et, comme frappée par la foudre, elle se jeta dans ses bras, le serrant de toutes ses forces. Un peu surpris, Alex tenta de la réconforter. Par pur réfléxe, Chris fouilla dans sa poche et sortit un chewing gum qu'il enfourna sans réfléchir. C'était tout ce qu'il avait à disposition, à défaut de petites pillules, interdites en avion, à moins d'avoir une ordonnance médicale. Mila semblait vraiment avoir peur, au point qu'elle transmit presque cette sensation à l'Anglais. Il mâchait d'un air indolent, mais ne put réprimer un frisson qui parcourut son corps tout entier. Son regard croisa celui d'Alex, perplexe. En guise de réponse, il haussa les épaules en lui lançant un sourire nerveux.

- Tu sais, Mila, je connais bien cette sensation. Un jour, à l'école, j'avais un contrôle de psycho et j'y connaissais quedalle ! En plus, je craquais grave sur la prof, Angie, et j'avais trop les boules de la décevoir. Mais finalement, j'ai fumé un pèt' et tout s'est bien passé. Bon, je t'avoue que je la soupçonne de m'avoir donné des bons points parce que je lui plaisais aussi, mais...

Grand moment de solitude. Il s'arrêta en constatant que ses paroles n'arrangeaient rien et laissa Alex miser sur sa présence paternelle. Etant donné que la rouquine ne le lâchait pas, il se fit plus insistant et l'invita à le suivre dans l'avion, en lui assurant que tout se passerait comme ils l'avaient prévu. Lui promettant qu'il ne lui arriverait rien. Il fit même l'effort de sortir une petite plaisanterie sur les t-shirts. Mila se força alors enfin à se détacher de lui et le trio put enfin monter à bord de l'immense oiseau de fer qui les mènerait à Vegas, où une mission de la plus haute importance les attendait.

» I have a dream ... [PV Peter, Chris, Alex D.]
» Alex au carré [PV Alex Jones]
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» °* Chris Miles *°