Une nouvelle chance?[ terminé]

Invité

Une jeune fille marchait pieds nus dans les rues de New York, sans affaires et ne portant sur elle qu'un jean étrangement à la mode, contrastant avec son t-shirt complètement froissé. Ses longs cheveux chatains étaient défaits, lui cachant une partie du visage. Elle ne portait aucun artifice, pas de bijoux, rien. Les gens se retournaient sur son passage et changeaient de trottoir, de peur de croiser son regard. On pouvait voir à son visage qu'elle était épuisée et que ça devait faire longtemps qu'elle marchait.
Elle marchait vite, sans savoir réellement ce qu'elle faisait ni où elle allait. Elle y allait, c'est tout.

Mais que faisait cette femme ici dans cette tenue? Pour le savoir, il fallait remonter loin, très loin. Si loin, qu'elle l'avait probablement oublié. Tout ce qu'elle savait c'est qu'elle n'était pas normale et qu'elle devait se faire soigner. Dans un monde ou les animaux ne sont que marchandises, une empathie envers eux ne pouvait que la détruire. Elle ne voulait pas inhiber son don, mais juste le réguler, c'était devenu trop compliqué à gérer.

Elle était partie sur un coup de tête, sans rien préparer, au beau milieu de la nuit. De toute façon, elle vivait essentiellement la nuit. Elle avait quand même prit le temps de voler un jean et un t-shrit dans le premier magasin, prenant la première chose plus ou moins à sa taille qu'elle trouvait. L'apparence n'était pas son fort. Elle savait juste qu'il lui fallait d'autres habits que ses espèces de haillons trop petits pour elle.
Après avoir pas mal marché, elle était arrivée presque par hasard dans les rues de Nex York. Cette ville était immense et elle était complètement perdue. Aucun point de repère, que des immeubles. Elle se rendait compte qu'elle ne savait absolument pas où aller ni comment faire pour rencontrer des gens. Y avait il seulement des gens dans son cas? A qui pouvait elle en parler, n'allait on pas la prendre pour un monstre? Après tout depuis toujours on l'avait considérée comme telle, alors pourquoi changer?

Mais elle marchait, elle ne s'arrétait pas. Elle ne savait pas pourquoi d'ailleur. Que cherchait elle? Un coin de verdure? Le soleil commençait à être haut dans le ciel et le sol chauffait doucement sous ses pieds nus. Mais soudain, un crissement de pneus la sortit de ses pensées. Elle se retourna et aperçut le chat qui se jetait sous les roues de la voiture. Elle n'eut pas le temps de réagir, trop tard. La voiture allait trop vite et le chat fut rapidement projeté de l'autre côté de la route.

"- Non!"

Elle avait crié, là au mileu de son trotoir à regarder la voiture foncer sur l'animal. Aussitôt, la douleur de cette pauvre bête l'envahie. Elle traversa la route en courant, déclenchant une symphonie de Klaxon et s'agenouilla à côté de l'animal. Elle pouvait sentir sa douleur, son incompréhension, puis sa résiliation. Il n'y avait aucune rencoeur, ni tristesse en lui, juste une constatation. Il avait mal, il allait mourir, point.
Elle le regardait sans rien pouvoir faire, se contentant de le caresser, espérant naïvement pouvoir le réconforter par sa présence. Mais le chat était déjà bien loin. Il laissa pendre sa langue et ferma les yeux. Tout était finis pour lui, mais tout commençait pour elle. Son corps et son coeur souffraient encore de sa mort. Une fois de plus, elle se sentait inutile et restait bêtement agenouillée sur le côté, sans écouter les conducteurs qui lui disaient de se pousser de la route.
Pourquoi le monde était il toujours aussi cruel où qu'elle aille?

Alors qu’Alex s’apprêtait à traverser la rue pour se rendre dans le café d’en face, Une jeune fille s’engagea sur la route en courant. Elle avait l’air désespérée, son cri parvenant à couvrir le raffut de la circulation new yorkaise. Elle semblait jeune et perdue. D’apparence négligée, elle était vêtue d’un jean légèrement trop grand, d’un t-shirt souillé et elle se déplaçait pieds nus.

*Après tout, les Etats-Unis aussi ont leur lot de pauvreté ...*

Il semblait qu’elle s’était précipitée devant les voitures pour un chat, sans doute le sien. Mais, elle n’avait pas été assez rapide. Au moment où la bête passait de vie à trépas, Alex avait eu l’impression que la jeune fille allait faire de même puis elle se reprit, tenant la pauvre bête dans ses bras et ne cessant de la caresser.

La circulation autour d’elle était bloquée, elle restait au milieu de la chaussée, obsédée par la dépouille animale, sous les klaxons et les injures des conducteurs. Soudain, Alex vit un livreur de pizzas sur une mobylette. Ceux-là se croyaient toujours plus malins que les autres, Alex le savait. Il slaloma entre les divers véhicules, progressant rapidement, trop rapidement. Il n’avait pas vu la jeune fille agenouillée sur le sol.

*Ah non ! Un chat encore ça n’est pas trop grave, mais là, il s’agit d’une jeune fille !!!*

Alex se précipita vers elle. A présent, il avait l’impression d’être cette jeune fille tentant de sauver son chat.

*J’espère avoir plus de chance qu’elle.*

De justesse, il parvint à attraper la jeune fille et à l’emporter jusque sur le trottoir. Tous deux roulèrent sur le bitume, échappant de justesse au deux roues. Lorsqu’Alex releva la tête, il relâcha son étreinte. Sa protégée tenait encore le chat contre sa poitrine. Réfléchissant à une traduction rapide, Alex trouva les mots qui lui semblèrent les plus logiques dans une telle situation :

« Est-ce que vous allez bien Mademoiselle ? »

Invité

Occupée à accuser le choc de l'émotion, Timidy n'entendit pas vraiment la moto arriver. Les voitures faisaient un boucan infernale, mais tout paraissait bien loin. Au moment où elle leva la tête, elle aperçut une roue et au dessus un type casqué. Elle ferma les yeux, se préparant à encaisser le choc, puis se sentit projeter, mais pas du bon côté. Le choc venait de son côté gauche.
Elle fit un roulé boulé, tenant le chat contre sa poitrine, sans trop savoir pourquoi, peut être pour le protéger.

Elle se retourna violement, prète à se défendre contre son attaquant et se retrouva nez à nez avec un... homme. Elle fut surprise, s'attendant au premier abrord à un animal, mais se reprit. Bien sur qu'il s'agissait d'un homme. Elle se voyait mal trouver un ours à New York.

« Est-ce que vous allez bien Mademoiselle ? »

Elle le regarda plus attentivement, toujours assise sur le trottoir. Il n'avait pas l'air bien méchant et son but avait probablement été de la sauver. Elle tourna la tête un moment observant la circulation reprendre son cours sans se soucier d'eux. Ce monde là n'était pas vraiment différent du sien. Chacun pour soi.
Elle refixa son attention sur lui et ses mots prirent enfin une signification dans sa tête. Si elle allait bien? Elle ne s'était jamais posé la question. Probablement que oui.

"- Oui, ça va. Je vous remercie."

Elle avait crut bon d'ajouter ce remerciement, se rappelant de l'éducation de son père. Elle reporta son attention sur ce chat sans trop savoir quoi en faire. Elle finit par le poser sur le trotoir devant elle et se releva doucement.

« De rien, c’est normal. »

Elle semblait surprise, comme si elle ne s’attendait pas à être sauvée. Mais Alex se dit que c’était simplement le choc qui la mettait dans cet état. Se rendant compte qu’il était affalé sur le sol, Alex se releva rapidement, comme s’il était gêné ... Mais gêné de quoi d’ailleurs, les gens autour de lui ne leurs prêtaient aucune attention, ils prenaient tout juste soin de ne pas leur marcher dessus.

*Il pourrait y avoir une bombe en pleine rue, que les gens continueraient de suivre leur train-train quotidien ici ... »

La jeune fille déposa le chat à terre puis se releva à son tour.

« Je suis désolé pour votre chat, mais vous ne devriez pas le laisser là. »

*Si moi je ne sais pas vraiment ce que je fais ici, il semblerait bien qu’elle aussi n’en ait absolument aucune idée.*

Alex lui tendit la main tout en ajoutant :

« Je m’appelle Alex Dumont. J’allais prendre un café avant de vous ... croiser, voulez-vous venir avec moi ? Je ne suis pas certain que vous soyez en état de rester seule pour le moment, non ? »

Invité

Pas le laisser là? Oui, mais le mettre où? Son chat? Elle le regarda un moment perplexe. Il pensait que c'était le sien? Elle secoua la tête tristement en regardant le cadavre.

"- Non, ce n'est pas le mien. Je ne l'avais jamais vu avant et je ne pense pas qu'il appartienne à quelqu'un, ce doit être un chat de gouttière."

Elle en était même sure, il ne portait aucun collier, ni rien qui puisse lui faire penser qu'il appartenait à quelqu'un. Il n'avait juste pas eu de chance lui non plus.

Elle l'observa un moment alors qu'il lui tendait la main. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas parlé à quelqu'un et même si elle ne se l'admettait pas, ça lui faisait du bien. Le serrage de main étant une sorte de rituel accueillant parmis les hommes, elle y répondit, mais en oubliant de lui sourire. Normalement elle savait que dans ces cas là, un sourire était le bienvenue,mais n'avait plus l'habitude de communiquer facialement. Elle n'avait plus l'habitude de communiquer tout cour à vrai dire. Elle le regarda donc avec ses traits figés avant de réfléchir à sa proposition. Elle était fatiguée et l'idée de se poser pour se ressourcer ne lui déplaisait pas.

"- Timidy Shy. Ok pour le café."

Elle fut surprise de l'aisance avec laquelle elle balança son nom et son prénom. Ainsi elle s'en souvenait, c'était une bonne chose.

Alex fut surpris d’apprendre que la pauvre bête n’était pas son chat. Elle semblait tellement peinée par le sort du félin que le jeune homme en avait tiré la conclusion qu’il lui appartenait.

*C’est sans doute quelqu’un de très émotif et qui adore les animaux.*

Lorsqu’il lui tendit la main, elle hésita, puis, la lui serra d’une manière délicate. En revanche, son visage resta figé dans la peine. Elle se présenta puis accepta l’invitation d’Alex. Sa réponse fut comme une épreuve, mais elle fut soulagée lorsqu’elle parvint à la surmonter. Alex lui sourit.

« Je vous propose le café juste devant nous. C’était ma destination initiale avant que je ne fasse un détour pour vous rencontrer. »

Jetant un regard au cadavre du chat, Alex fut saisi de pitié.

*Même s’il n’est à personne, on ne va tout de même pas le laisser là, au milieu du trottoir.*

Alex se baissa pour saisir le chat, mais en se relevant, il fut pris de vertiges, l’obligeant à mettre un genou à terre.

*Oula, j’ai dû me relever trop vite.*

Mais même à genou, la sensation désagréable ne se dissipa pas, au contraire, elle s’intensifia. Elle se coupla de nausées. Alex s’assit, posa une main au sol pour ne pas s’écrouler. Le teint pâle, il regarda Timidy et tentant veinement de la rassurer lui dit :

« Excusez moi, je ne sais pas ce qu’il m’arrive, mais ça va passer. »

Alex reposa le chat qui sans se faire prier parti dans une ruelle voisine le pas léger. A moins qu’il ait une hallucination, ce chat était bien vivant.

Invité

Elle le regarda avec méfiance lorsqu'il prit le chat et s'aperçut qu'il n'était pas très bien. Il était carrément en train de faire un malaise. Elle ne savait pas trop quoi faire et se pencha vers lui pour le soutenir.
Puis il se passa quelque chose d'étrange, elle ressentit une énergie qui émanait de lui, queque chose de puissant, la vie. La vie sortait de lui et allait dans le chat?

Soudain, il reposa le chat qui partit. Elle se rendit compte que l'animal n'avait rien compris et ne se souvenait même pas de son accident. Son esprit était de nouveaux occupé par ce qu'il allait manger plus tard. Elle le regarda partir en trotinant, sans parvenir à trouver une explication. Elle l'avait vu mourir, elle l'avait sentit mourir, comme était ce possible?

Elle s'écarta quelque peu d'Alex pour le regarder attentivement. Etait ce lui qui avait fait ça? Lui aussi avait un contact étroit avec les animaux? Ce chat était bel et bien mort et il venait de le ressuciter devant ses yeux. Est ce que lui aussi il souffrait dans ces cas là? Elle finit par arréter de le fixer, se disant qu'il allait se sentir mal à l'aise. Elle avait trop souvent été regardé comme elle le regardait à ce moment. Elle fit donc un effort pour adoucir ses traits et lui fit même un sourire.

"- ça va mieux?"

Une infinité de questions lui venaient à l'esprit : comment fait il ça, comment le contrôle t'il? Est ce la permière fois? Y en a t'il d'autres comme eux, etc. Mais elle préférait ne pas le brusquer. Il n'avait pas l'air de maitriser spécialement la situation.

Vu l’expression de stupeur sur le visage de Timidy, ça n’était pas une hallucination. Ce chat venait bel et bien de revenir à la vie. Quant à savoir comment, c’était une autre histoire. La jeune fille dissipa rapidement le malaise qui venait de s’installer entre les deux individus : elle sourit et demanda si ça allait mieux.

*Alex, mon gars, elle flippe autant que toi : dédramatise à la situation et vite.*

« Laissez-moi deux minutes que je demande à Dieu de me faire mourir sur le champs. Ensuite, je serai à vous.»

Alex accompagna sa phrase ironique d’un sourire, même si en réalité, il avait l’impression qu’un bus venait de lui passer dessus.

Après quelques minutes, il put se relever. Le monde chancelé encore sous ses pieds, mais au moins, il pouvait reprendre une position un peu plus digne.

*Et bien, elle doit avoir autant de questions que moi sur ce qu’il vient de se passer. Quant au fait de fournir des réponses, ça c’est une autre histoire.*

« Je vais mieux, pas encore aussi bien que le chat, mais je vais mieux quand même. Et si on allait se le prendre ce café. J’avoue que c’est plus dans l’objectif de m’asseoir que de boire une boisson chaude à présent. »

Invité

Il voulait mourir? C'était une plaisanterie? Elle avait du mal à comprendre, mais laissa bien vite tomber, après tout, tant qu'il tenait debout, tout allait bien... Enfin, pas tant que ça vu qu'elle le sentait chancelant. Elle était soudain très excitée. Ce type était surement comme elle... Elle avait bien fait de venir en ville, elle allait trouver des réponses, enfin.

Elle ne répondit pas à sa question, mais l'aida à marcher en direction du café droit devant eux. Elle repéra une table en terasse et le dirigea droit vers elle. Elle se retourna alors et plongea ses yeux noirs dans les siens. Elle s'aperçut qu'ils étaient bleus. D'un joli bleu, comme ceux de sa louve. Ce devait être quelqu'un de bon.

"- C'est toi qui l'a sauvé, n'est ce pas?"

Dans ses yeux, on pouvait lire de la reconnaissance, mais aussi de l'espoir. L'espoir de trouver quelqu'un qui comprenne ce qui lui arrive.

« C’est moi qui l’ait sauvé ! Pfff ... c’est impossible. Il devait juste être sonné et il est revenu à lui quand je l’ai attrapé. Enfin, je crois. »

Alex n’avait aucune conviction dans ce qu’il venait de dire. Mais, il n’allait tout de même pas dire haut et fort à une inconnue « oui oui, en effet, je crois que je viens de ressuscité ce chat de gouttière et durant mes temps libres, je tords les petites cuillères avec le pouvoir de mon esprit ». C’était ridicule. Lui-même n’était pas certain d’avoir réellement sauvé ce chat.

Pourtant, une chose était sûre, le chat était mort, et il avait repris vie lorsqu’il l’avait touché. Plus précisément, Alex avait la sensation qu'il avait pris un peu, voire beaucoup de la « vie » d’Alex. Après tout, le jeune homme avait déjà été témoin de ce genre de phénomène, avec le passant qui avait eu un malaise dans la rue, ça s’était passé juste avant qu’il ne quitte la France.

Le regard intense de Timidy plongeait dans les yeux d’Alex. Il eu l’impression qu’elle disséquait son âme.

*Elle sait que tu mens, elle le sent.*

« Qu’est ce qui vous fait dire que je l’ai sauvé ? »

Invité

Pourquoi refusait il de le dire? Il le savait, c'était obligé. Au fond de lui, il devait sentir qu'il n'était pas comme les autres, alors pourquoi? Est ce qu'il avait peur d'elle lui aussi? Ou avait il tout simplement peur de sa réaction? Peut être venait il lui aussi de le découvrir.

Elle ne le quittait pas des yeux, sans même s'en apercevoir. Elle avait prit l'habitude de fixer toujours dans les yeux et de ne pas lacher sa proie. Il était un peu comme une proie pour elle. Elle n'allait pas le lacher. Elle savait qu'il était comme elle, elle l'avait vu, elle l'avait sentit même.

"- Je sais que ce chat était mort, car je l'ai sentit. Comme j'ai sentit que vous lui avez redonné la vie, d'ailleur. Pourquoi mentir?"

Elle était restée debout à le fixer et les gens commençaient à se demander ce qu'il se passait. Ils étaient arrivés comme des amis et là elle semblait le fixer comme s'il s'agissait d'un affrontement. Le barman était resté à l'écart, n'osant pas les déranger.

Les regards commençaient à se tourner vers l’étrange couple : le frenchy et son amie sortie des bois.

« Euh ... je ne voulais pas vous offenser, désolé. En fait, je ne suis pas certain de ce qui se passe moi-même. Je pense que si vous vous asseyez et que l’on commande quelque chose, nous passerons déjà plus inaperçus. »

Alex demanda un café au serveur. Puis, il réfléchit à la manière d’aborder la chose. Il décida finalement de faire les choses le plus simplement possible.

« Je viens de Paris. Il y a quinze jours, un type est venu me voir pour me dire de me rendre à New York, car là bas, je devais participer au sauvetage du monde. Je sais c’est complètement délirant, mais me voilà ici. »

*Bravo, maintenant, elle va te prendre pour un malade.*

« Pourquoi est ce que je serai utile dans ce plan, je l’ignore. A dire vrai, je pensais trouver la réponse ici. »

Elle continuait de le fixer du regard, examinant chacune de ses paroles. Alex avait l’impression d’être branché à un détecteur de mensonges comme dans les films.

« Quant à savoir si j’ai effectivement sauvé ce chat, je ne pourrai vous l’affirmer même si intérieurement, je pense que oui. En revanche, je ne sais absolument pas comment je suis parvenu à cet exploit. »

Les yeux noirs de Timidy n’avaient pas lâché Alex une seconde.

*A mon tour de jouer au Trivial Poursuite maintenant.*

Alex fixa à son tour la jeune fille, lui aussi avait des questions à lui poser.

« Et vous, comment savez-vous de manière affirmative que j’ai sauvé ce chat ? Comment avez-vous senti la vie revenir en lui ? »

Alex se rendit trop tard qu’il avait été un peu brutal en posant cette question. Après tout, elle n’y était pour rien s’il n’était pas normal.

« Je me suis emporté, je vous prie de m’excuser. » dit-t-il l’air un peu penaud.

Invité

Elle finit par s'assoir, s'apercevant enfin des regards qui se tournaient vers eux et jeta un regard clair au barman signifiant -qu'est-ce-que-t'as-à-me-mater-comme-ça?-Dégage-de-là!- qui disparut sans demander son reste.
Elle reconcentra son attention sur Alex. Ainsi il devait sauver le monde, rien que ça. Elle se demanda s'il n'était pas fou, mais s'interdit de le juger.

*Tu t'es vue ma fille? Celle qui ressemble le plus à une aliénée ici, c'est toi!*

Puis il lui expliqua qu'il avait probablement sauvé ce chat. Elle en était sure, il était bien comme elle. Puis son regard se fit plus dur et il soutint le sien. Sa question était légitime, mais elle ne répondit pas. Elle le fixa encore un petit moment, puis détourna la tête et regarda une vieille femme se faire traiter de tous les noms parce qu'elle ne traversait pas assez vite et que le feux était vert.

"- Regardez-les. Regardez ce qu'il en ont fait de ce monde! C'est ça que vous voulez sauver? C'est trop tard pour eux, ils se détruisent tous, tout le monde le sait, mais personne ne fait rien. Vous avez quitté Paris pour venir les sauver? Cette décision vous honore, mais c'est bien utopique. Cela fait déjà bien longtemps que le monde est mort!"

Elle avait plutôt pensé tout haut que vraiment parlé, mais ça sortait du coeur. Cet homme était effectivement bon, mais la bonté ne fait pas tout. Elle réfléchit un moment à ce qu'il venait de dire. Et si ils étaient justement là pour les détruire et reconstruire un monde meilleur sur de nouvelles bases? Non, impossible!
Elle allait ajouter quelque chose lorsque le barman revint avec le café. Il lui jeta un petit regard en coin, pret à lui demander ce qu'elle buvait, mais se ravisa en voyant que son regard n'avait pas changé. Il repartit doucement à l'intérieur et elle le suivit du regard.

Sa réponse fut cinglante mais pleine de vérité. Le monde agonisait d’une certaine façon, du moins, le monde des hommes. Elle avait lancé son pamphlet contre la société telle une guerrière antique, gardienne de la Nature.

« Je pense que la Nature trouvera une solution, elle a toujours su rétablir l’équilibre afin de préserver la vie, même si pour cela, elle doit avant tout engendrer la destruction. J’espère juste ne pas être l’un de ses instruments qui va accomplir sa macabre entreprise. »

Le Serveur apporta le café et partit ou plutôt fuit, devant le regard menaçant de Timidy.

« Il faut garder l’espoir, il y a tant de choses merveilleuses à préserver, et certaines ont été conçues par l’Homme. Il est imparfait et fait des erreurs, mais j’aime à croire qu’il peut se corriger et qu’il faut lui accorder une seconde chance. Tout le monde a le droit à une seconde chance, comme notre ami le chat. »

Alex sourit. Il but une gorgée de son café puis porta son regard sur les pieds de la jeune fille.

« C’est une nouvelle mode à New York d’être pieds nus ? » dit-il avec humour, tentant de détendre l’atmosphère.

« Je plaisante, je vous taquine. »

Alex fit une pose puis, tout en la regardant tendrement, reprit.

« Bien, je vous ai raconté la raison de ma présence ici. A votre tour de me dire qui vous êtes Timidy Shy. »

Invité

Elle ne comprit pas tout de suite ou il voulait en venir avec sa nouvelle mode, puis elle se rappela qu'à la base les gens portaient des chaussures en ville. Ce n'était pas faute d'avoir essayé, mais elle les avait jeté dès le premier km...

"- Ah oui, mes chaussures... Euh je n'aime pas me sentir opresser. En plus ça ne sert à rien!"

Elle fit la moue quand il lui demanda qui elle était. Elle n'en savait rien elle même. Etait elle une femme ou un animal? Elle avait envie de partir en courant, mais se sentait bien avec cet homme. Il avait l'air de respecter la vie et la nature, comme son père...

"- Qui je suis? C'est une bonne question. Tout dépend de ce que vous entendez par qui je suis et de ce que vous voulez vraiment savoir."

Elle se rassit dans sa chaise et chassa une mèche rebelle de son visage.

"- Vous êtes quelqu'un d'étrange. Vous me sauvez la vie sans raison et vous discuttez avec moi sans avoir peur? Vous ne me prenez pas pour une folle?"

Elle lui fit un petit sourire, qui contrastait étrangement avec ses yeux qui ne souraient jamais.

"- Mais moi, si je suis ici, c'est pour une raison beaucoup moins louable que vous. En fait, mon père est mort il y a 5 ans et je viens récupérer mon héritage, c'est tout."

Elle fut satisfaite de sa réponse. Elle n'avait pas mentit. Même si elle n'en avait pas grand chose à faire de son argent, ça lui permettrait de vivre en attendant de comprendre ce qui lui arrivait. Bon, d'accord ce n'était pas la seule raison, mais c'était déjà pas mal!

« Oh ... je ... je suis désolé ... pour votre père. »

Alex était vraiment confus. Il avait mis les pieds dans le plat. Il ne voulut pas s’éterniser sur cet épisode et revint rapidement au sujet principal de la conversation. Apparemment, elle était étonnée qu’il n’ait pas peur d’elle.

« Quant à vous prendre pour une folle ... je ne me le permettrai pas. Je serai vraiment mal placé si je vous jugeais. Après tout, c’est moi la personne qui ait traversé l’océan Atlantique dans l’hypothèse de sauver le monde, et ce, sur la demande d’un touriste japonais équipé d’un sabre. »

*Alex !!! Tu vas lui faire peur ! Tu n’avais pas précisé l’histoire du japonais et du sabre. Réfléchis la prochaine fois avant de parler.*

« Bon, j’avoue, vous n’avez pas un look très courant, mais chacun fait ce qu’il veut. Au passage, les tongs seraient peut être moins oppressantes tout en vous isolant du goudron qui risque de vous infecter. »

Alex sentait que la jeune fille lui cachait encore certaines choses. Il ne voulait pas la brusquer ou lui faire peur. Tout en continuant de sourire, il lui demanda :

« Devrais-je avoir des raisons de vous prendre pour une folle ou pour quelqu’un d’anormal en dehors de ça ? Après tout, depuis qu’on se connaît, les seules choses inhabituelles que vous avez faites sont de vous être attristée sur le sort d’un chat qui n’était pas le votre, de ne pas aimer ce malheureux barman et finalement, de sembler tout aussi peu à l’aise dans cette ville que moi. Ici, le plus anormal pour le moment, c'est moi : je vous rappelle qu'il semblerait que j'ai ressuscité un chat. »

Il but une nouvelle gorgée de café en attendant la réponse de la jeune fille, tout en continuant de l’observer par-dessus la tasse, ne voulant pas manquer une seule des réactions de son visage, réactions qui, il fallait l’avouer, restaient assez rares jusqu’à maintenant.

Invité

Un japonais équipé d'un sabre? Elle faillit exploser de rire à cette phrase. Décidemment, peut être qu'ils étaient tout les deux fous. Mais ça lui faisait du bien de savoir qu'elle n'était pas toute seule à être un peu bizarre.

"- Vous avez vraiment tout quitté parce qu'un japonais vous a dit de sauver le monde?"

Elle bascula légèrement la tête sur le côté quand il lui parla de ce chat. Le monde n'avait donc pas changé. S'attrister sur la mort d'un animal était signe de folie. C'est vrai, c'était bien connut que les animaux ne ressentaient rien et étaient bêtes, alors pourquoi s'en faire si l'un d'eux mourrait?
Mais elle, elle savait que c'était faux. La seule différence entre les hommes et eux c'était la méchanceté. L'animal ne fait rien par méchanceté, il est incapable de ressentir des émotions telles que la rancoeur, que la haine ou que l'intolérence. Ils acceptent tout sans trop se poser de questions. En ça, peut être qu'ils sont moins intelligent, ou au contraire, beaucoup plus. Tout dépend de quel point de vue on se place.

"- La vie est sacrée, même si ce n'est que celle d'un animal parmis d'autres. Une mort comme la sienne ne servait à rien. Alors, effectivement, j'étais triste de voir à quel point la vie a peu de valeur aux yeux de certains."

Elle jeta un coup d'oeil au barman qui la surveillait de loin et fit un petit sourire.

"- Ce n'est pas que je ne l'aime pas... Enfin, disons plutôt que je n'aime pas grand monde."

Elle le regardait, ne voyant que la moitié supérieure de son visage, le reste étant caché par sa tasse.

"- Je n'aime pas les villes, c'est pour ça."

Puis elle reprit une mine et un ton très sérieux et se pencha un peu vers lui.

"- Ce que vous avez fait est extraordinaire. Vous tenez en vous quelque chose de fabuleux! Mais cela a l'air de vous faire soufrir. Est ce que ça vous le fait tout le temps? Est ce que vous le contrôlez? Est ce qu'il y en a d'autres?"

Elle se tut soudain, se rendant compte qu'elle était en train de le noyer de questions. Elle était très concentrée, ne voulant pas perdre une seule miette de sa réaction et de ce qu'il allait dire.

Alex se doutait que l’anecdote sur le japonais la ferait sourire, lui-même en riait parfois en y repensant ... mais à d’autres moments, elle le faisait douter, voire, elle l’inquiétait. Si l’asiatique disait vrai, alors le monde serait prochainement menacé de destruction.

Comme, il l’avait deviné, la jeune fille était très respectueuse de la nature et très critique envers les agissements de la société. Sa philosophie expliquait sans doute le fait qu’elle se baladait pieds nus, pour être plus proche de la nature. Elle avoua ouvertement ne pas aimer grand monde, et encore moins les villes. Soudain, Alex repensa avec nostalgie à Paris : sa ville, celle qui l’avait vu naitre, qui l’avait nourri, qui lui avait donné un travail, qui avait été le premier témoin de ses capacités extraordinaires. Il espéra très fort que d’avoir quitté ce lieu en vaille vraiment la peine, que cette histoire se règle le plus rapidement possible, afin qu’il rentre chez lui, auprès de sa famille et de ses amis.

L’attention de Timidy se reporta une nouvelle fois sur les compétences d’Alex, elle lui posa une multitude de questions, puis s’arrêta brusquement. Alex se demanda ce qui lui valait tant de curiosité.

*Réfléchis imbécile ! Tu ferais quoi à sa place si un type avait des pouvoirs étranges : tu le questionnerais.*

Ne voulant pas la laisser sans réponse, il prit la parole, s’assurant auparavant que personne ne les écoutait.

« C’est un don ou une malédiction que je ne m’explique pas. Tout ceci a commencé à se manifester il y a environ quinze jours. Il semblerait que je n’ai aucun contrôle dessus. Lorsque j’entre en contact avec des gens, et apparemment des animaux aussi, qui sont souffrants ou blessés, je leur transmets une partie de ma vie, ou plutôt de mon essence vitale, si toute fois cela existe, afin de les guérir. Mais en retour, je m’en retrouve affaibli. Je ne savais pas que cela pouvait aller jusqu’à la résurrection. Mais honnêtement, je n’ai pas envie de recommencer. Ce qu’il a fallu que je cède pour ramener un chat à la vie était si important, que j’ai bien cru y laisser ma peau, alors pour quelque chose de plus gros, je n’ose pas imaginer. »

Lorsqu’il s’entendit parler, Alex se dit qu’elle allait le faire interner en asile psychiatrique. Toutes ces conclusions, il les avait tirés des divers situations rencontrées ces derniers temps. Mais, la dernière partie de ses explications l’effrayait tant qu’il hésita à les divulguer.

« Je crois être capable de sauver les autres en sacrifiant une part de moi, mais j’ai bien peur que ça ne soit que la facette lumineuse de ce que vous avez appelé un fait extraordinaire et fabuleux ... »

Alex baissa la tête, ne voulant regarder Timidy, craignant qu’elle prenne peur en étudiant les réactions du jeune homme.

Invité

Elle vit en lui ce qu'elle pensait être du doute. Peut être même un peu de tristesse, mais comment savoir? Elle avait un peu de mal à vraiment communiquer avec les humains. Son "don" paraissait aussi prenant que le sien, aussi difficile à porter. Peut être était ce de son devoir de lui parler du sien? Après tout, elle avait été rassurée de trouver quelqu'un comme elle, il le serait certainement.

"- Ce chat a eu de la chance de vous rencontrer, même s'il ne sait pas ce que vous avez fait pour lui."

Elle hésita un peu, ouvrit plusieurs fois la bouche, puis se ravisa. Elle regarda à son tour la table, semblant être captivée par la tâche de café se trouvant là. Elle releva finalement les yeux, se mordillant la lèvre. Qu'avait elle à perdre à lui en parler?

"- Tu n'es pas seul à avoir ce genre de pouvoir. En fait, moi aussi j'ai quelque chose dans le genre. Disons que je fais une sorte de télépathie ou d'empathie animale. Je ressens toutes leurs émotions, les comprends et je peux communiquer avec eux. Je pense même être capable de les commander, mais j'avoue ne jamais avoir trop essayé. ça me mets mal à l'aise."

Le tutoiement était venu tout seul. Elle trouvait ça plus facile de se confier à quelqu'un qu'elle tutoyait, comme s'ils étaient amis. Bien qu'elle ne sache pas grand chose de l'amitié.

"- En fait, je ne suis pas venue ici uniquement pour l'héritage. Je voulais essayer de trouver des réponses et apprendre à contrôler ces choses que je ressens. D'où je viens, je ne pouvais plus dormir, car j'étais tout le temps en contact avec des animaux."

Elle ne voulait pas en dire autant, mais c'était sortis tout seul. Elle regarda ces immenses immeubles tous aussi laid les uns que les autres et se dit que sa meute était bien loin maintenant. Elle soupira. Leur contact lui manquait déjà.

Ainsi il n’était plus seul. Cette simple idée le réconforta. Il y avait d’autres personnes comme lui qui étaient dotées de capacités surnaturelles. Il était parvenu à en trouver une, à partager ses doutes, ses angoisses. Il espérait pouvoir apprendre à maîtriser son pouvoir, si toutefois, cela était possible.

Elle était donc douée d’empathie animale. Tout s’expliquait à présent. Pourquoi elle avait réagit ainsi avec la mort du chat, comment elle avait senti la vie retourner dans le cadavre, pourquoi elle évitait autant la présence des hommes. De nombreuses questions trouvaient leur réponse.

Alex releva la tête, regardant de nouveau le visage de Timidy. Il hésita à sourire de nouveau, toujours rongé par les angoisses que lui procurait son pouvoir. Il but une nouvelle gorgée de son café, tentant de chasser ses craintes.

« Je pense être ici pour trouver d’autres gens comme nous, et ensemble, nous provoquerons certains des évènements qui changeront la face du monde, empêchant par la même, sa destruction. »

*Mais ça n’empêche que je ne sais toujours pas comment m’y prendre, ni par où commencer.*

« Si seulement le japonais m’avait donné plus d’informations, nous saurions quoi faire. »

Soudain, Alex se rendit compte qu’il s’était emballé au contact de toutes ces nouvelles réponses, si bien qu’il en avait oublié de réconforter Timidy qui semblait comme lui, être en difficulté avec son pouvoir.

« Mais comment ça se passe quand votre ... ton pouvoir se manifeste ? Tu comprends ce qu’ils vivent ou alors tu ressens dans ta chair leurs expériences ? »

A cette idée, Alex frissonna, repensant à ce qu’elle avait dû endurer avec le chat de tout à l’heure.

Invité

Provoquer des évènements pour sauver le monde? Elle était loin d'être sure de vouloir le sauver ce monde. Elle voyait plutôt l'humanité comme un fardeau dont il fallait se débarasser, mais elle ne dit rien, ne voulant pas faire peur à sa nouvelle connaissance.

Il lui posa une question qu'elle ne s'était jamais posée. Comment ça se passait? Elle n'en savait trop rien, tout était si confus.

"- Je ne sais pas trop, en fait. Je ressens leurs souffrance dans mon corps, mais c'est loin, comme si c'était pas vraiment mon corps, alors qu'en fait si. Et en même temps, je les comprends. Je veux dire, je sais à quoi ils pensent, ce qu'ils ressentent dans leur coeur. Je ressens leur souffrance physique, mais aussi mentale. Je peux communiquer avec eux : savoir ce qu'ils veulent dire et même leur parler, en quelque sorte. Enfin, je ne sais pas trop comment l'expliquer, c'est assez confus comme phénomène. Le seul problème est qu'il est toujours actif. Je ne peux pas le désactiver."

Elle avait dit ça sur un ton monotone, comme si elle récitait ses tables de multiplications. En parler la touchait et elle ne voulait pas paraître affectée. Sa devise était d'éviter au maximum de montrer ses émotions.
Elle décida donc de changer de conversation et se concentra sur le pouvoir d'Alex.

"- Mais parlons de toi! Tu m'as dit que c'était le bon côté de ton pouvoir que j'avais vu? Est ce que tu es capable d'absorber la vie des autres? Ou alors de transmettre la vie de l'un à quelqu'un d'autre?"

Timidy avait répondu comme un automate, effaçant le plus possible la présence de sentiments dans ses propos. Alex en conclut qu’elle souhaitait éviter de s’impliquer dans une relation avec les humains, créant une sorte de barrage. Etait-ce volontaire ? Il n’aurait su le dire, mais il préféra respecter le choix de la jeune fille.

Après avoir expliqué succinctement la manière dont son pouvoir se manifestait, elle revint sur celui du jeune homme, mettant le doigt sur l’autre facette du pouvoir d’Alex. Même s’il était particulièrement gêné de répondre, il lui devait d’être honnête. Elle s’était confiée à lui et il semblait que c’était un fait rare pour elle que de se confier à un être humain. Il ne pouvait pas la trahir.

« Je crois qu’en effet je suis aussi dans la capacité d’absorber l’énergie vitale des êtres vivants autour de moi. Cela m’est arrivé une seule fois : j’ai eu une migraine chez un fleuriste et en quelques secondes elle est passée. Etrange pour une migraine. Mais le pire, c’est que la plante que je tenais dans les mains était morte, comme si elle avait dû subir la rigueur de tout un hiver. »

*C’est fait, je l’ai dit.*

Il marqua une pause, le regard fuyant.

« On peut donc aussi en conclure que je peux utiliser l’énergie vitale contenue dans les végétaux. Quant à savoir si je peux transférer cette énergie entre deux créatures vivantes, je ne saurai le dire, mais c’est fort possible. Mais, je ne sais pas contrôler ce pouvoir et le prix est si lourd ... et d’abord qui suis-je pour juger qui peut vivre ou mourir, qui doit sacrifier son existence pour permettre à un autre de vivre. C’est un choix trop important pour que je puisse en être le seul juge. »

Alex voulut boire de nouveau, mais à présent la tasse était vide. Il resta à fixer le fond du récipient, recouvert en partie par du sucre imbibé de café. Il ne savait pas si quelqu’un le comprendrait un jour et encore moins si quelqu’un pouvait l’aider.

Invité

Elle n'aurait pas du lui parler de cette partie de son pouvoir, ça avait l'air de le toucher pas mal. Et il y avait de quoi! Son pouvoir était extrèmement puissant. S'il pouvait ainsi se servir de l'énergie des autres, il vallait mieux que ce soit lui qui l'ai plutôt que d'autres personnes.
Elle ne dit rien. De toute façon que pouvait elle dire? Que ce n'était pas grave? Elle savait que c'était faux. Cet homme avait vraiment un don encore plus horrible que le sien et à la fois beaucoup plus merveilleux.

Mais quel fardeau à porter. Devoir décider de la vie d'autruie est nettement plus dur que de ressentir les émotions des animaux. Elle au moins, elle n'avait pas à se poser de questions, elle subissait c'est tout, mais lui... Oui, il avait raison. Il devait essayer de maîtriser son pouvoir, car si dès qu'il se sent mal il absorbe la vie des autres. Ou même si il sauve tout les chats du quartier, il finira vite comme eux.

Elle fut légèrement interrompue dans sa réflexion par un pigeon qui passait par là. Il avait très faim et lui demandait s'il n'avait rien à manger. Elle sursauta sur le coup. C'était toujours pareil, ça lui faisait toujours le même effet. Il ne lui parlait pas vraiment, mais elle comprenait ce qu'il lui disait et elle aurait presque pu se mettre à taper la discutte avec. Elle lui sourit et l'oiseau se rappocha plus pres d'elle. Il n'avait pas peur d'elle. Il finit par venir au milieu de la table et sautilla devant elle en hochant la tête.

Elle était consciente que les gens la regardaient et alors? Elle avait l'habitude de passer pour folle communiquant avec les animaux. Et puis alors s'intéresser à un pigeon devait être un comble. Elle aperçut la moue du serveur qui serait bien venue chasser l'animal, mais qui n'osa pas vraiment. Elle fouilla un peu dans sa poche et sortit un bout de viande séchée. Elle était devenue incapable de manger de la viande, alors autant que ça serve à quelqu'un. Le pigeon prit le bout de viande dans sa main et partit. Elle aurait presque put comprendre une sorte de remerciement de la part du pigeon.

Elle sourit et le regarda partir dans le ciel. Elle aurait bien aimé elle aussi pouvoir voler comme ça. Partir loin de tout quand elle le voulait. Mais elle se contenta de reporter son attention sur Alex et sans le savoir réellement, le regardait beaucoup plus tendrement. Peut être l'oiseau avait il détendu ses traits?

"- tu as raison, il dois y avoir quelqu'un dans cette ville qui peut nous aider. Il va effectivement se passer un truc, sinon pourquoi serions nous là? Tu es venus de Paris sous la demande d'un japonais et moi je débarque ici alors que je n'y était jamais venue et que ça faisait bien 5 ans que je n'avais pas mis les pieds dans une ville."

*Oups. Méga aveux. Non, après tout, ne pas être venue dans une ville ne veut pas dire avoir été hermite! Juste que j'étais resté dans la campagne.*

Elle l'observa afin de guetter ses réactions. Allait il finir par comprendre qu'elle était folle? Et après, il fuyera vite fait.

*Et alors, qu'est ce que ça peut bien te faire? Un de plus un de moins! L'homme est comme ça, c'est tout!*

Un pigeon se posa sur la table, s’approchant de Timidy. Dans un premier temps, Alex fut surpris. Il savait que ces oiseaux n’étaient pas farouches, il avait l’habitude de les voir agir à Paris, mais jamais encore il n’en avait vu oser s’approcher de si prêt. Puis, il fit le rapprochement avec le pouvoir de la jeune fille. Elle sortit un morceau de viande qu’elle donna à l’animal, ce dernier le prenant dans son bec puis partant comme il était venu. Le visage de Timidy semblait plus détendu à présent, comme apaisé.

*Baisserait-elle sa garde ? En tout cas, il est certain que la présence des animaux la rend bien plus sereine que celle des humains.*

En tout cas, il semblait qu’elle était d’accord avec Alex sur le fait qu’ils étaient là pour provoquer un changement. Et une chose était certaine, ça n’était pas en se lamentant sur son propre sort, qu’Alex parviendrait à faire quoique ce soit. Il avait un pouvoir délicat à utiliser, et bien, il n’avait qu’à apprendre à s’en servir.

« Finalement, le Destin existe peut être réellement : ce serait la Force qui nous réunirait tous en ce lieu. »

Alex avait cru percevoir un moment de panique chez son interlocutrice au moment où elle lui avait annoncé qu’elle n’était pas revenue dans une ville depuis 5 ans. Avait-elle peur qu’il la prenne pour une bouseuse ? Une bonne partie de la population française ne vivant pas en ville, pourquoi en serait-il différent aux USA.

« Une question me trotte dans la tête, qui t’as recueilli après le décès de ton père ? »

Alex craignait que la question ne soit trop embarrassante, mais certains détails de la vie de la jeune fille était étrange : elle n’avait plus mis les pieds dans une ville suite à la mort de son père, il y a de cela cinq ans.

*Qui peut bien priver une ado de se rendre en ville durant si longtemps ?*

Invité

Le destin? Peut être. Elle n'y croyait pas trop. Pour elle il n'y avait pas de dieu, donc pas de destin. Quel dieu aurait pu faire ça? Quel dieu pourrait laisser mourir des tas de gens juste pour le pouvoir d'un seul homme? Quel dieu laisserait les hommes détruire tout ce qu'il a construit? Non cette idée lui était impossible à croire. Et pour croire au destin, il fallait croire en divité supérieur. Cette idée la dérangeait et elle était sure que le destin n'existait pas. Ce serait trop facile!

« Une question me trotte dans la tête, qui t’as recueilli après le décès de ton père ? »

Elle se renferma sur le coup. ça y est, il se posait des questions.

* En même temps, tu t'es vu ma fille? Qui ne se poserait pas de question sur toi?*

Bon, plusieurs choix s'offraient à elle : partir en courant, rester et mentir ou rester et dire la vérité. Ne pas répondre paraîtrait encore plus suspect. Partir? Bonne idée, mais pour aller où? Elle ne saurait même pas comment retourner dans sa forêt.
Rester? Mais pour dire quoi? Elle réfléchit un moment à ce qu'elle pourait bien raconter et s'en voulu de ne pas avoir prévu quoi répondre à ce type de question.

Elle plongea ses yeux dans les siens et se mordit un peu la lèvre. Elle aimait ses yeux, ils la mettaient en confiance. Peut être qu'une partie d'elle était venue en lui en mourrant? Elle baissa les yeux et regarda la table un moment. Devait elle tout lui dire? Après tout, qu'avait elle à perdre? Elle voulait reprendre contact avec les humains? C'en était un non?

"- Personne. Ce n'était pas vraiment mon vrai père, il m'avait adopté. Et je n'avais que lui comme famille... à part une louve. Je l'aimais comme une mère."

ça y est, c'était dit. Comment pouvait on aimer un animal autant voir plus qu'un humain?
Elle marqua une pause afin de lui laisser le temps d'assimiler cette phrase. Si elle l'avait dit petite, les gens de son village l'auraient probablement linchée immédiatement ou fait exorciser. Peut être qu'ils auraient recommencé la chasse aux sorcières... Cette idée la fit sourire, puis elle reporta son attention sur le principal sujet.

"- En fait, à la mort de mon père, je suis partie dans la forêt et je n'en suis plus sortie avant aujourd'hui. Pour tout te dire, je vivais avec les loups, c'est eux qui m'ont recueillis."

Elle releva les yeux afin d'observer ses réactions.

"- Voila, tu sais tout. Je suis plus animale que femme. Je chasse à mains nues sans problème, je mange de la viande crue... Enfin mangeais!
Tu comprends maintenant pourquoi je ne supporte pas les chaussures. ça faisait longtemps que je n'en mettais plus. Mes pieds sont habitués..."

Et voila, maintenant il ne lui restait plus qu'à attendre qu'Alex crie à la folle et que des petits hommes blancs viennent la chercher pour analyser ce phénomène. Elle était déjà en train de se demander si elle se laisserait faire ou si elle se débatterait. C'était peut être mieux de l'enfermer? Elle ne pouvait plus chasser et arriverait elle à s'intégrer dans ce monde qui n'était pas le sien?