[Eclipse] La noble cause [PV Asami]

Il s'y attendait un peu. La jeune femme ne semblait avoir de la peine à saisir sa phrase. Pas de chace, Chris était un grand bavard, transformant la moindre petite assertion en un long discours décousu. Il se racla la gorge, un peu gêné, lorsque la fille aux cheveux roses le regarda, un peu perdue, tentant vainement de reconstituer le flot d'informations qui venait de la submerger. Il pencha ensuite la tête dans ce signe d'excuse propre aux Japonais.

« Gomene...Je ne connais pas... »

Outre le mot sorti tout droit de sa langue natale, on distinguait encore un très fort accent japonais. Le revers de la médaille : il avait trouvé quelqu'un qui l'écoutait, quelqu'un de serviable., mais cette personne aurait du mal à l'aider ou le comprendre.

- Mince, t'es pas du coin toi. Désolé pour mon accent. Moi aussi je viens, genre, de très loin.

L'asiatique semblait un peu contrariée de ne pas pouvoir l'aider. Elle rassembla tous ses efforts avec un optimisme que Chris n'avait pas eu l'occasion de voir depuis longtemps.

« Il y a une université pas très loin »

Cela fit énormément plaisir au garçon, et il n'hésita pas à le montrer.

- Ah ouais ?

Même si elle ne connaissait pas son oncle, peut-être que des professeurs enseignant à cette université pourraient l'aider. Puis l'oncle Jimmy avait sûrement écrit quelques ouvrages qui figureraient dans la bibliothèque facultaire. Il y trouverait son adresse sans peine.

« Tu veux que je t'y accompagne ? »

Cette question n'était pas simplement une proposition polie, la jeune femme semblait réellement vouloir l'aider. Elle inclina sa tête pour appuyer ses mots, se montrant insisistante et on ne peut plus sincère. Chris ne put s'empêcher de rire, vraiment content de trouver enfin quelqu'un d'aimable. Il avait abordé tant d'inconnus qui l'avaient ignoré, insulté ou repoussé froidement. Il n'avait pu loger que chez deux ou trois d'entre eux le temps d'une nuit, souvent des jeunes en appartement. Mais ce n'était qu'un logement, un service qui ne coûtait rien. Cette charmante asiatique proposait carrément de lui accorder son temps, de lui prêter de l'attention. C'était un sentiment qu'il avait un peu oublier, et qui refleurit en lui avec douceur.
Cependant, ses manières d'Occidental reprirent le dessus, et il fut un peu gêné.

- Heu tu sais, je ne voudrais pas te faire perdre ton temps. Je ne connais pas le coin, mais je peux me débrouiller, je ne veux surtout pas te déranger dans tes occupations.

Mais ce regard insistant, cette charmante tête penchée sur le côté eurent finalement raison de lui. Il baissa les yeux en souriant, vaincu par le charme.

- Très bien, je te suis princesse. C'est vraiment sympa de ta part ! Ici, les gens sont pas vraiment cool avec les inconnus.

Alors qu'ils se mettaient lentement en route, serpentant entre les passants pressés, suspendus à leur téléphone portable en vociférant des ordres ou consultant frénétiquement leur montre. Chris jeta un regard vers la Japonaise à ses côtés. Il était troublé par ce look si particulier, puis la délicatesse et la gentillesse qu'elle dégageait. Il aimait l'originalité ; lui-même portait souvent des vêtements fluos, comme en ce moment. Une veste orange, un pull vert pomme et une écharpe violette, ce n'est pas ce qu'il y a de plus courant. Surtout assortis à un pantalon jaune très large et un gros béret kaki. Il remarqua tout à coup ce qu'elle portait en mains.

- Tiens, tu dessines ? C'est ce qui t'a amenée ici, à New-York ?

Il fouilla machinalement dans sa poche et en sortit une petite boîte de laquelle il fit tomber une pillule bleue. Il ne lui en restait plus que trois désormais. Sans pillule, les choses risqueraient d'être moins faciles. Plus angoissantes. Il lui en fallait de nouvelles, ça ne devait pas manquer dans ce pays. N'importe lesquelles, pourvu qu'il en ait. Il rangea la boîte au fond de sa poche et lança un bref sourire à l'inconnue.

« Yokoso...Heu...Bienvenu ici... »

Chris était sous le charme. La jeune Japonaise semblait avoir bien intégré le style de vie à l'Américaine tout en conservant cette part de tradition et d'authenticité nippones qui faisaient tout son charme. Elle avait beau être habillée de la manière la plus excentrique et provocatrice qui soit, il voyait bien en elle une demoiselle timide, discrète et peu sûre d'elle.

D'après ses dires, l'université ne se trouvait pas loin de là, à quelques rues à peine. Il n'avait pas osé refuser qu'elle l'accompagne, non seulement parce qu'elle insistait vraiment mais aussi parce qu'il avait peur de transgresser quelque coutume propre à la mentalité japonaise. Peut-être que s'il avait refusé qu'elle l'aide, elle aurait été offensée. Et puis de toute façon, il ne refusait jamais un peu de compagnie, surtout au cours de ce voyage où sa plus fidèle compagne était la solitude.
Le courant passait bien entre les deux jeunes gens et Chris en était ravi. Il avait enfin trouvé quelqu'un avec qui il partageait un réel contact humain, et elle semblait vraiment attachante.

Lorsqu'ils se dirigèrent vers l'université, l'asiatique se fit bousculer à plusieurs reprises, plus encore que lui avec son gros sac à dos. Elle était toute frêle et il lui était parfois laborieux de se frayer un chemin dans la foule pressée et sans pitié de la Grosse Pomme. Mais elle ne semblait pas en vouloir à ces gens, elle voyait vraiment du positif en chacun d'eux. Chris était à la fois surpris et admiratif devant une telle foi en la bonté humaine. Lui, il ne pensait pas vraiment comme elle. Il avait perdu la seule personne qui comptait vraiment pour lui, et les autres l'avaient abandonné ou ne le comprenaient pas vraiment. Ils pensaient plus souvent à leur bonheur qu'à celui des autres.
Mais que faisait-elle donc dans une ville pareille, si loin de son pays natal, de ses repères, ses traditions ?

« Ce sont des amis important qui m'ont amené ici... »

Le brittanique décela une certaine tristesse dans sa voix et son regard. Elle commençait à évoquer des souvenirs qui lui paraissaient lourds et pénibles. Il se rendit bien compte que s'ouvrir de cette manière à un inconnu pour lui parler d'elle ne lui était pas aisé.

« Je suis...Mangaka...Je dessine un manga... »

- Cool ! J'adore les mangas.

A vrai dire, il n'en lisait jamais et ça ne l'intéressait pas. Il disait juste cela pour la mettre en confiance, pour la remercier de se confier à lui. Cette jeune femme l'intéressait, le captivait et il était reconnaissant de sa franchise ainsi que de sa gentillesse. Il en oubliait presque la raison de sa présence à New-York et leur destination. Désormais il se promenait, et c'était tout.

« J'ai décidé de venir ici suite à l'explosion pour aider des amis...Et j'ai ouvert deux boutiques pour pouvoir subvenir à mes besoins en plus de l'écriture et du dessin de mon manga »

Aider des amis... Comment se faisait-il qu'elle avait des amis ici, à New York, alors qu'elle semblait tant ancrée dans sa culture d'origine ? Elle s'est même installée dans cette ville, donc la raison de sa présence devait vraiment être important pour elle. Il n'était visiblement même pas question qu'elle retourne au Japon. Cependant, il ne voulait pas insister ni la mettre mal à l'aise, alors il se contenta de hocher la tête pour ne pas l'obliger à en révéler trop. Il voyait bien que son passé pesait sur elle. Elle avait dû traverser beaucoup d'épreuves difficiles...

- T'as vraiment du courage de rester ici après tout ce qui s'est passé dans cette ville. Je ne regarde jamais la télé, je déteste ça. Mais j'ai entendu dire que des terroristes avaient semé la panique ici. Ils auraient même monopolisé les médias pour faire croire aux gens qu'un nouveau type de criminels était né. Y a eu beaucoup de rumeurs tordues, que des foutaises moi j'dis ! Ce sont juste des meurtriers comme les autres, mais qui veulent de l'attention, qui veulent rester dans les mémoires et se sentir importants. Mais tu verras, bientôt on les aura oubliés. Ce sont les gens bien qu'on n'oublie pas.

Il lui sourit avec candeur lorsqu'ils traversèrent un immense portail donnant sur un vaste parc plus ou moins épargné par les récents dégâts. La nature y était restée maitresse, puissante et imperturbable gardienne de l'harmonie des lieux. Seuls quelques bâtiments un peu plus loin avaient cédé à la brutalité des secousses, mais des grues et autres véhicules de reconstruction s'affairaient à redonner vie aux monuments. « Pourvu que la bibliothèque ait été épargnée » pensa Chris.

« Nous y sommes... » conclut la jeune femme au moment où ils entrèrent dans le domaine.
L'Anglais s'arrêta brutalement.

- Tiens, je ne t'ai même pas demandé ton nom ! Quel c... rétin je fais. Moi c'est Chris.

Il lui tendit la main. C'était plus un geste d'affection que de politesse, il espérait qu'elle jouât le jeu.

- Nous allons devoir trouver un professeur, le doyen d'une faculté ou quelque chose du genre. S'il ne peut pas nous aider, il reste la bibliothèque...

Après quelques mètres de chemin pavé, ils tombèrent devant une multitude de pancartes partant dans tous les sens. Chris les inspecta une par une. Salle de sport, secrétatiat général, locaux de conférences, bâtiment D1, D2, labo H3-R035,...

- On n'est pas sortis de l'auberge...

Alors qu'ils discutaient en marchant, Chris remarqua le regard d'Asami, habituellement attentif, se perdre dans le paysage avant de se poser sur un homme et son vieux chien, posés près d'un mur. L'hiver ne serait pas des plus agréables pour eux. Un peu distrait, l'Anglais faucha de son pied droit un gros tas de feuilles mortes soigneusement empilées par un jardinier du domaine universitaire. Il ne s'arrêta pas et regarda les feuilles virevolter au gré du vent. Il aimerait bien être aussi léger, échapper au problème et juste se laisser porter dans une danse sans but, juste profiter de son état d'être vivant.

A chacune des paroles échangées, Chris avait l'impression de plus en plus ferme que la Japonaise était rongée par la culpabilité. Il aurait aimé l'aider, mais elle n'accepterait jamais de se confier à un illustre inconnu, et ce même si elle semblait avoir une immense foi en l'être humain. Il se contenterait de partager avec elle un moment agréable, pour tenter de la sortir provisoirement de ses pensées sombres.

« Ce ne sont pas juste...Des meurtriers... Ce sont des personnes, comme toi et moi, avant d'être des meurtriers... »

Elle lui lança un regard respirant l'innocence et la bonté. Il aurait aimé penser comme elle, pouvoir croire en la bonté qui réside en chacun d'entre nous. L'homme est-il bon par essence, est-ce la société qui le pervertit ? Ou alors est-ce cette dernière qui le maintient en dehors de son statut d'animal sauvage, cruel et égoïste ? Les terroristes, les criminels, seraient alors ceux qui échapperaient à ces règles morales, à ces normes. Existe-t-il un moyen de les ramener sur le droit chemin ? Peut-être ont-ils besoin de croire en quelque chose. Ou que quelqu'un croie en eux.

- Oui justement, ils sont comme toi et moi... En moins gentils. Mais ils ne sont pas supérieurs à nous comme ils le prétendent. Et ce ne sont pas leurs actions, mais celles des gens bien qui doivent être prises comme exemple.

Il avait pris conscience que quelque chose sonnait faux dans ce qu'il disait, mais il tenta de ne rien en laisser transparaître. Il avait entendu parler quelques semaines auparavant de rumeurs comme quoi certains individus étaient dotés de pouvoirs exceptionnels. A ce moment-là, il n'avait pas encore découvert de quoi il était capable et cela le faisait bien rire. Mais tout avait été remis en question ce soir pluvieux où ce don avait changé le cours de son existence. Cependant, il n'avait jamais vu de ses propres yeux quelqu'un capable de telles prouesses. Il se croyait donc pour l'instant le seul à être ... différent. De plus, il était désormais incapable de réutiliser cette aptitude, et il ignorait pourquoi. Il s'était donc décidé à ne rien révéler à qui que ce fût.

Devant les panneaux, elle se présenta également. Elle s'appelait Asami. Un prénom doux, candide et poétique. Tout à son image. Un peu hésitante, elle tendit elle aussi sa main et une poignée douce et amicale accompagna ces présentations tardives.
Face à l'ébahissement de Chris devant l'immense plan du domaine, l'asiatique lacha un petit rire, comme les enfants qui s'esclaffent discrètement en entendant une blague cocasse.

« On a tout notre temps non ? »

- Pas faux. Moi je ne suis pas pressé en tout cas. J'espère que toi non plus !

Asami se rapprocha du plan et le parcourut, laissant glisser son doigt sur la surface vitrée. Celui-ci s'arrêta à un endroit bien précis sur la carte.

« Là »

Elle l'avait presque crié, comme une exclamation de victoire qui fit sursauter Chris. Ce dernier se rapprocha et lut dans sa tête : "Administration"

« On devrait commencer par là... »

Il hocha plusieurs fois la tête, satisfait du choix opéré par la jeune femme. Il tourna la tête vers elle, plongeant son regard dans le sien, et acquesca naïvement.

- Très bien, allons-y alors ! C'est par là.

Ils se remirent à marcher, croisant de plus en plus d'étudiants qui circulaient d'un bâtiment à l'autre, lisaient un livre ou fumaient des joints par petits groupes. Chris mourait d'envie d'aller leur en demander un, mais il se retint devant Asami. La demoiselle passait désormais inaperçue au milieu de ces jeunes désirant s'affirmer à travers leur look ou leur attitude.

Quelques instants plus tard, ils se retrouvèrent devant un imposant bâtiment de brique rouge partiellement délabré. Il s'élevait, strict et imposant, comme pour dire "ici les jeunes, ça rigole pas". Tout dans cet édifice portait au respect, malgré ses quelques pans de murs écroulés et ses vitres brisées, auxquelles on avait substitué des plaques en carton. Asami et Chris entrèrent en silence, impressionnés par l'infrastructure des lieux. Les fenêtres bouchées rendait l'endroit encore plus lugubre qu'il ne devait l'être à l'origine. Heureusement, quelques lampes puissantes permettaient aux visiteurs de ne pas s'enfuir en courant. Une secrétaire se tenait au milieu d'un bureau en demi-cercle bien trop grand et trop haut pour elle. La jeune femme leva les yeux et considéra les deux jeunes personnes par dessus ses lunettes cadrées de noir. Au lieu de les accueillir chaleureusement, elle attendit en les regardant qu'ils donnent la raison de leur présence, sans leur gratifier d'aucune forme de respect.

- Heu, salut... Je cherche un doyen, ou un professeur de génétique, quelque chose comme ça.

Elle le regarda, étonnée par le ton un tantinet trop décrontracté de l'Anglais.

- J'ai besoin de quelques renseignements. C'est important.

- Un moment je vous prie.

Elle fouilla dans ses tiroirs et en sortit une farde qu'elle feuilleta avec nonchalance. Elle inscrivit ensuite quelques noms et numéros de locaux sur un Post-it qu'elle tendit à Chris. Celui-ci s'en empara et lut les quelques noms qui y figuraient. Il lança un regard satisfait à Asami, lui souriant avec reconnaissance. Puis ses yeux retournèrent à la secrétaire.

- Cool, merci !

Elle ne prit même pas la peine de répondre, rangea la farde et retourna à ses occupations.

- Bon, on n'a plus qu'à les trouver maintenant. Bien joué, Asami !

Il lui tendit le bout de papier, pour qu'elle puisse voir si l'un des noms lui évoquaient quelque chose.

Il y avait des rencontres comme celle-ci, qui ne prévenait pas mais qui aurait très certainement un impact sur la vie. Il y avait de ses rencontres bénigne, qui n'avait pas d'influence et qui dans le meilleur des cas pouvait laisser un vague souvenir dans l'esprit et de l'autre côté, il y avait les rencontres de choc, celle-ci qui pouvait être discrète et celle qui en était de véritable coup en plein visage. Chris faisait partie des rencontres qui laisseraient une trace important dans l'esprit d'Asami, il y avait longtemps qu'elle n'avait pas fait de nouvelle rencontre aussi sympathique que celle-ci et leur échange de point de vue rendait tout cela passionnant.

- Oui justement, ils sont comme toi et moi... En moins gentils. Mais ils ne sont pas supérieurs à nous comme ils le prétendent. Et ce ne sont pas leurs actions, mais celles des gens bien qui doivent être prises comme exemple.

Esquissant un petit sourire, elle l'écoutait, il ne s'agissait pas d'un sourire moqueur mais elle était intéressée par son point de vue, même si elle ne le partageait et qu'elle le trouvait un peu contradictoire elle savait que ce genre de chose allait de toute façon en évoluant. Elle était plutôt bien placé pour le savoir. La vie ne lui avait pas vraiment de cadeau jusqu'à maintenant et les remises en questions était régulière parfois.

« Je crois que personne n'est à blâmer, on ne fait jamais rien sans raison...Même les personnes les plus altruistes... »

Un aveu ? Peut-être...Asami savait que chacun de ses gestes n'étaient pas purement désintéressée, c'est parce qu'elle avait besoin de croire en cette humanité, c'est parce qu'elle culpabilisait de ne pas avoir pu sauver certaine personne, il y avait selon elle des tas de raisons valable pour qu'elle soit si gentille et incapable de véritablement faire de mal à quelqu'un. Déposant ses yeux dans le regard de Chris, elle s'attachait au jeune homme. C'était un garçon d'agréable compagnie et haut en couleur selon elle. Plein d'énergie à revendre et son dynamisme était très contagieux...

Face au tableau vitré, les deux personnes cherchaient après où commencer, la logique selon la japonaise voulait qu'elle commence par l'administration, partageant son idée à ce sujet en montrant du doigt l'emplacement du dit lieu

- Très bien, allons-y alors ! C'est par là.

Son visage se tourna vers l'endroit où il se dirigeait, ne prenant pas la route tout de suite. Elle se mit à courir très légèrement pour le rattraper. Elle regardait les étudiants, leur style, le façon d'être...Cette jeunesse, elle ne l'avait pas eu, même si Asami n'en avait pas vraiment l'air, elle n'avait jamais terminé ses études. Elle c'était entièrement consacré au dessin et en autodidacte. Pouvant faire du manga au paysage, en passant par le portrait, l'abstrait, le réalisme, le surréalisme...L'art du dessin et de la peinture était quelque chose qu'elle adorait plus que tout, un exutoire parfait pour la demoiselle. Elle pouvait y exprimer chaque sentiment qui pouvait la traverser, l'atteindre, la toucher, chaque instant de trouble, de peine, de joie, de colère...

Ce fut en quelque minute que les deux personnes se trouvaient face à un bâtiment imposant de fierté. Ses lignes strictes donnaient directement le ton malgré la vision des dégats qu'avait laisser l'explosion de New york derrière elle. C'est les yeux légèrement exorbité que la demoiselle regardait le bâtiment, bouché bé d'une certaine admiration et frayeur. Cela donnait un peu l'impression de décort de nouveau film d'horreur.

« Ca fait froid dans le dos... »»

Dit-elle sur un ton amusé avant de reprendre la route avec Chris, ouvrant les énormes portes des lieux, ils pénétrèrent dans le hall d'acceuil. Le bureau en demi-cercle ne venant absolument pas juré avec l'air stricte des lieux...

« Wow... »

Laissa-t-elle échappé de ses lèvres avant de poser ses mains sur sa bouche, s'excusant d'un regard désolé pour son exclamation sortie toute seule de sa gorge.

Elle approchait du bureau en demi-cercle et plus elle approchait, plus elle avait l'impression d'être vraiment petite à côté de se bureau. Regardant Chris et la secrétaire ensuite, elle resta muette durant tout l'échange de discussion, si on peut appeler cela ainsi.

Regardant les lieux, la demoiselle se faisait curieuse, elle ne faisait qu'observer, son crayon encore sur son oreille et son cahier à dessin dans sa main. La nipponne quitta sa rêverie lorsqu'elle entendi un « cool merci » de la part de son nouvel ami. Se retournant vers celui-ci, sourire aux lèvres, elle était vraiment contente d'avoir pu l'aider malgré tout...Et cela n'était encore que le début.

- Bon, on n'a plus qu'à les trouver maintenant. Bien joué, Asami !

Il lui tendait le bout de papier, le prenant dans ses mains, elle observait chacun des noms...Peut-être en reconnaitrait un mais cela n'en fut pas le cas sans grand étonnement pour elle. Reposant ses yeux sur Chris, elle lui lança un petit sourire désolé.

« Retournons voir le plan »

Reprenant alors la route vers le plan, les noms et le numéro du bureau sur la petite feuille de papier. Asami avait toujours en tête d'aider le jeune homme. Elle ne le laisserait pas sans avoir pu lui donner une quelconque piste ou alors retrouver la personne qu'il recherchait. Trouvant le premier de la liste sur le panneau, il reprenait la route vers la salle de classe en question. C'est en arrivant sur les lieux qu'elle remarqua plusieurs étudiant qui patientait devant la porte.

Se tournant vers Chris, elle murmura:

« Ils vont avoir cours... »

Un sourire malicieux se dessina sur le visage de la demoiselle, une idée lui avait traverser l'esprit, juste pour le fun et quitte à être ici...Autant s'amuser un peu. Alors que les élèves entraient dans la salle de classe, Asami attrapa la main de Chris et elle l'attira à l'intérieur. Se fondant dans la masse d'élève. La classe était grande, ressemblant à un mini amphithéâtre.
Grimpant les marches qui avait entre deux rangées de petit bureau, elle fini par s'installer, invitant Chris à s'asseoir a côté d'elle.

« Bonjour tout le monde... »

Le professeur venait d'entrer, un sourire enfantin et les yeux pétillants de malice, elle regardait Chris...Cela serait intéressant...Elle en était sur.

« Je crois que personne n'est à blâmer, on ne fait jamais rien sans raison...Même les personnes les plus altruistes... »

En prononçant ces mots, Asami évita le regard de Chris pendant quelques instants. Quelque chose incitait le jeune homme à penser qu'elle ne s'était pas exclue de cette affirmation. Il était même prêt à parier que c'était un moyen détourné de reconnaître les fautes qu'elle avait commises dans le passé. Mais il était d'accord avec elle sur ce point : quoique l'être humain fasse, ce n'est jamais dénué de toute forme d'intérêt personnel. Qu'il s'agisse d'auto-satisfaction pour avoir aidé quelqu'un, d'un moyen d'avoir la conscience tranquille ou de parvenir à nos buts, chaque action que nous réalisons a également pour but de nous réaliser, de nous sentir consistants, voire importants aux yeux des autres. Parfois même, d'acquérir du pouvoir.
Après tout, ceci est une évidence aux yeux de tous. Mais ce qui importe le plus est le moyen d'arriver à nos fins, quelles qu'elles soient. Les êtres bons le font dans une perspective bénéfique aux yeux des autres, alors que les mauvais, les Traîtres, eux, ne prêtent guère attention au mal qu'ils pourraient causer volontairement ou accidentellement. Le tout est d'arriver à creuser sa route sans abîmer celle du voisin. Et parfois unir plusieurs chemins pour avancer plus vite.
Asami reposa ses yeux sur Chris et un peu plus de confiance pouvait se lire dans son regard. Il y avait une certaine alchimie entre les deux personnes, comme s'ils étaient de vieux amis, qui se connaissaient sans le savoir depuis très longtemps. Pourtant, si l'Anglais avait connu une demoiselle aussi originale et intéressante par le passé, il s'en souviendrait ! Comme son visage était beau, encadré par cette chevelure rose flottant au vent. Comme sa présence inspirait le réconfort et l'allégresse. Elle ne marchait pas, elle flottait. Elle ne parlait pas, elle chantait. Cette jeune nipponne était la poésie incarnée, la candeur dans son état le plus pur. Chris se prit soudainement à penser qu'il ne voulait pas la perdre de vue. Une personne aussi précieuse avait très rarement croisé son chemin, et c'est à cet instant même, lors de ce regard échangé, qu'il s'en rendit compte. Il n'avait plus personne, ni famille, ni amis. Il n'avait même plus de logement. Il devrait se raccrocher à ce qu'il pouvait.

Même en entrant dans le bâtiment austère, il se sentait mieux à ses côtés. Mais la jeune femme, elle, ne semblait pas complètement rassurée, même si elle tentait de le dissimuler derrière une moue amusée.

« Ca fait froid dans le dos... »»

Sans réfléchir, il avait posé sa main sur l'épaule d'Asami. D'abord tendue, il la sentit se relâcher un peu à son contact qui se voulait apaisant.
Elle se mit un peu en retrait lors de la conversation peu banale entre Chris et la secrétaire. Lorsqu'il lui tendit le bout de papier, elle l'examina en fronçant les sourcils. Aucun des noms n'avait l'air de lui évoquer quelque chose. Cependant, elle ne baissa pas les bras et proposa de retourner voir le plan. Le jeune homme la suivit sans hésiter. Elle n'eut aucun mal à situer le local où se trouvait le premier professeur, il fut même étonné de la vitesse à laquelle elle arrivait à se localiser. Peut-être était-ce son habitude du dessin qui l'aidait à transposer ce plan dans la réalité, à adapter le dessin au domaine tel qu'il se dressait, vaste, étendu devant eux.

Quelques minutes plus tard, ils arrivaient devant le local en question. Plusieurs étudiants y entraient, ceux au bout du couloir commençant à courir pour ne pas être en retard. Asami se retourna et s'adressa à Chris à mi-voix.

« Ils vont avoir cours... »

Le garçon allait sortir un "Oh..." désappointé lorsqu'il remarqua le petit sourire espiègle qui se dessinait sur le visage de la Japonaise. Sans qu'il n'eût le temps d'y réfléchir, elle lui saisit la main et l'entraîna dans la salle de classe. Il s'agissait presque d'un amphi, à vrai dire. Le genre de pièce qui montrait que même les plus petites classes avaient droit à un environnement prestigieux. Chris avait les yeux ébahis et la bouche entrouverte, émerveillé par cet environnement qui lui était si peu familier. Il n'aurait jamais pu se permettre des études universitaires, c'était un cancre et un bon à rien. Ce fut la raison pour laquelle il avait été renvoyé de son école.

« Bonjour tout le monde... »

Le professer, plein d'entrain, venait de pénétrer dans l'amphithéâtre. Il portait des lunettes argentées et une barbe courte soigneusement dessinée. Il était encore assez jeune et pétillant, malgré son costume sobre. Chris réalisa qu'il était toujours debout. Asami le regardait d'un air amusé, elle s'était déjà assise à l'un des bancs. Il retira son sac et la rejoignit. Elle avec ses cheveux roses et sa grande robe, lui avec ses vêtements multicolores, voilà un duo qui attirait bien des regards.
Le professeur n'y prêta pas attention et lança une animation sur l'écran géant de la salle de cours.

« Cette vidéo illustre l'extraordinaire capacité du triton à faire repousser un membre parfaitement opéationnel. Mais le triton n'est pas la seule créature à disposer de cette aptitude. En effet, grâce à des millions d'années de mutations et de combinaisons génétiques, le lézard à lui aussi la possibilité de régénérer ses cellules. »

- Se pourrait-il que certaines personnes puissent, genre... adapter leurs cellules à l'environnement dans lequel ils vivent ?

La question avait échappé de la bouche de Chris, trop rongé par la curiosité. Ca faisait longtemps qu'il n'avait pas été confronté à son aptitude, mais il se posait encore mille et une questions qui étaient jusque là restées sans réponses. Le professeur fut un peu déstabilisé, mais répondit à la question de l'Anglais.

« Ah, on ne parle pas ici d'humains. Il s'agit de lézards. Et levez la main pour que je vous voie. »

Chris hésita quelques instants, puis fini par lever la main, amusé par cette situation inattendue. Les autres élèves se retournèrent vers lui, certains ricanant en se demandant ce que cet énergumène venait faire dans un cours de génétique.

- Là.

« Je vous écoute. »

- Mais c'est possible non, que l'être humain puisse faire ça aussi ? Je veux dire... enfin en théorie.

« Oui, malgré la controverse, la recherche sur les cellules souches est très prometteuses. Darwin proposait, dans sa très célèbre théorie de l'évolution, un point de vue selon lequel les êtres vivants, humains ou non, seraient capables d'adapter leur métabolisme à l'environnement. Ceux qui n'y arrivaient pas, par contre, disparaissaient de la surface de notre planète. Mais cela prenait bien sûr des siècles, voire même des millénaires. A mon avis, la prochaine étape en ce qui nous concerne sera la disparition des organes superflus : notre appendice ne nous sert plus à rien, ni nos dents de sagesse qui nous servaient à broyer les os, et même le petit orteil n'a plus d'utilité. Tout cela ne sont plus que des scories dans notre ADN. Mais j'ai bien peur qu'il vous faille un diplôme supérieur de génétique pour aborder ce genre de questions. Et n'oubliez pas de me remercier à la fin de votre mémoire ! »

Chris sourit en guise de remerciement, puis tourna la tête vers Asami. Il était gêné et son visage s'empourprait. Sa curiosité l'avait emporté, et il ne se doutait pas que ses questions allait susciter une quelconque suspicion de la part d'autrio. Malheureusement, c'était loupé : la Japonaise semblait comprendre que, bien que ce fût la raison principale, Chris n'était pas seulement venu à New-York pour retrouver son oncle. Il cherchait aussi des réponses.

( j'étais censé aller dormir mais en lisant ton post juste avant...J'ai pas pu m'empêcher d'y répondre XD )

« Cette vidéo illustre l'extraordinaire capacité du triton à faire repousser un membre parfaitement opéationnel. Mais le triton n'est pas la seule créature à disposer de cette aptitude. En effet, grâce à des millions d'années de mutations et de combinaisons génétiques, le lézard à lui aussi la possibilité de régénérer ses cellules. »

La jeune fille observait la vidéo, c'était réellement intéressant. Plongeant dans le cours comme une étudiante, elle se fondait dans la masse alors que, même s'il n'y paraissait rien, la demoiselle avait après tout 26 ans maintenant...En y pensant, la situation l'amusait un peu plus encore. Observant la vidéo, écoutant les explications, elle se surpris même à jouer le jeu jusqu'au bout en sortant une feuille de croquis et prenant des notes comme tout élève normal qui se trouvait en ses lieux. Elle aurait aimer connaître des études normal, sa situation familial ne lui ayant pas permis de connaître cela. Quand elle y pensait, elle avait eu une période où aucun de ses ami(e)s d'aujourd'hui aurait pu la reconnaitre sans aucune hésitation.

- Se pourrait-il que certaines personnes puissent, genre... adapter leurs cellules à l'environnement dans lequel ils vivent ?

La question était intéressante, assez pour que la japonaise quitte ses notes pour relever la tête vers la source. Il s'agissait de Chris, juste à côté d'elle. Elle le fixait à présent, de ses yeux noisettes et pétillant de curiosité et de joie, la demoiselle l'observait sans le quitter des yeux. Cela pouvait rendre Chris particulièrement nerveux en y pensant mais la question l'avait tellement surprise sur l'instant qu'elle...N'arrivait plus à regarder ailleurs...C'était comme si...Il savait...
Rougissant légèrement en se rendant compte de son impolitesse qu'était de le fixer ainsi, elle baissa les yeux, attendant quelque seconde. Les regards, le professeur c'était retourné et cherchait dans la classe la source de cette voix, apparemment...Sans succès...

« Ah, on ne parle pas ici d'humains. Il s'agit de lézards. Et levez la main pour que je vous voie. »

Un petit regard en coin, elle pu voir la main se lever timidement. Elle esquissa un sourire pour Chris, souhaitant lui donner du courage. Les yeux étaient à présent tous tourner vers eux. Des rires c'étaient même fait entendre dans la classe. Observant l'assemblée, elle se tourna légèrement de côté sur sa chaise, comme si elle souhaitait faire face à Chris, qu'il ne voit qu'elle et qu'il ne se braque pas en entendant les quelques murmures. Sourire aux lèvres, elle souhaitait l'inciter à continuer son raisonnement, à ce qu'il prenne la parole sans crainte. Elle était là et elle allait le soutenir quoi qu'il arrivait.

« Je vous écoute. »

- Mais c'est possible non, que l'être humain puisse faire ça aussi ? Je veux dire... enfin en théorie.

Se tournant vers le professeur, elle s'accouda sur sa petite tablette, attendant la réponse avec une impatience que l'on pouvait deviner. Son crayon sur sa feuille, elle ne pu s'empêcher de griffoner bien malgré elle la classe tout en écoutant ce qui se disait...Une faculté qu'Asami pouvait se permettre de s'en venter, même si elle ne le faisait pas...

« Oui, malgré la controverse, la recherche sur les cellules souches est très prometteuses. Darwin proposait, dans sa très célèbre théorie de l'évolution, un point de vue selon lequel les êtres vivants, humains ou non, seraient capables d'adapter leur métabolisme à l'environnement. Ceux qui n'y arrivaient pas, par contre, disparaissaient de la surface de notre planète. Mais cela prenait bien sûr des siècles, voire même des millénaires. A mon avis, la prochaine étape en ce qui nous concerne sera la disparition des organes superflus : notre appendice ne nous sert plus à rien, ni nos dents de sagesse qui nous servaient à broyer les os, et même le petit orteil n'a plus d'utilité. Tout cela ne sont plus que des scories dans notre ADN. Mais j'ai bien peur qu'il vous faille un diplôme supérieur de génétique pour aborder ce genre de questions. Et n'oubliez pas de me remercier à la fin de votre mémoire ! »

Souriant à Chris, elle leva à son tour sa main suite à tout cela...

« Ma... »

Le professeur s'arrêta en regardant la demoiselle...Replaçant ses lunettes un peu plus sur son nez, la japonaise inclina légèrement la tête, sa main toujours levée et un sourire aux lèvres dont rare était les personnes qui pouvait se venter de pouvoir y résister.

« Mademoiselle... »

Elle inclina la tête et par réflexe se leva de sa chaise...Il s'agissait là de ses habitudes d'étudiante japonaise. L'élève ne posait jamais de question assis, lorsque l'on s'adresse directement au professeur, il était de bon ton de se lever en inclinant la tête pour le remercier d'accepter de l'écouter.

« En partant du principe que cela est possible...Serions-nous capable de l'expliquer scientifiquement ? »

Asami avait toujours été curieuse de savoir le phénomène biologique, chimique et physique qui se passait lorsqu'elle...

« Vous pouvez précisez ? »

Inclinant à nouveau la tête, elle continua dans son explication...

« Imaginons...Une personne qui peut devenir de l'air...Pourrions-nous l'expliquer ? »

Le professeur observait la jeune fille, il suffisait de voir son regard pour savoir qu'il savait pertinemment que ni l'anglais, ni la japonaise n'était des étudiants de l'université...Pendant un instant, Asami s'en effraya...

« En toute sincérité je ne pourrai pas vous répondre...On peut émettre des théories mais il faudrait déjà que tout cela existe... »

« Mais elles existent... »

Cette phrase lui avait échappé, tout les regards posées sur elle, Asami s'empourprait a vue d'oeil...Mais le professeur, peut-être par bonté ou par désintérêt, ne prêta pas attention à cette remarque de la part de la japonaise, appelant les élèves aux calmes, il continua son cours qui se poursuivit alors que la japonaise n'osait plus relevé le nez de son bureau. Les murmures qu'elle pouvait entendre lui rappelait...Des souvenirs...

La sonnerie retenti, les élèves reprirent leur sac et quittèrent un à un la salle de classe...Encore assise sur sa chaise, elle patientait, invitant Chris à en faire autant. Elle assumerait ses paroles. Son nez toujours pointé vers son bureau. Elle attendait que la classe se vide.

« Arigato Sensei... »

Il s'agissait des seuls mots qui s'échappèrent de la bouche d'Asami au moment où Chris et le professeur attendaient sa réaction. La jeune femme ne pouvait cacher sa nervosité et en perdait même son anglais. Le généticien en fut attendrit et lui sourit aimablement. Il la salua conformément à sa coutume et prix congé des deux faux étudiants. La Japonaise quitta la salle de classe avec empressement, suivie de près par Chris. Ce dernier n'arrivait plus à sourire, encore trop intrigué par l'intervention de son amie. Il préférait garder le silence, attendant qu'elle arrive à se confier, car il voyait que ce n'était pas évident pour elle.

Ils sortirent du bâtiment en silence. Une courte averse avait parsemé le domaine de flaques, lui offrant une odeur d'herbe mouillée absolument délicieuse. Plus petit, Chris adorait sauter dans les flaques d'eau avec son frère. Ils rentraient toujours trempés et crasseux, ce qui leur valait une bonne réprimande de la part de leur mère. Désormais, le ciel était redevenu bleu et le soleil brillait de pleins feux. Asami s'arrêta brusquement et fit face à l'Anglais. Elle semblait prête à décharger ce qui lui pesait sur la conscience. Elle commença par s'excuser sincèrement, mais Chris ne comprit pas pourquoi. Il avait été surpris, mais s'attendait plutôt à des explications, pas à des excuses. Il ne lui en voulait pas, il n'avait d'ailleurs aucune raison de lui en vouloir. Un peu plus loin, plusieurs étudiants se regroupèrent en criant de surprise, mais le garçon n'y prêta pas attention et tenta de rester attentif à ce que lui disait son amie.

« Je sais que mes questions et mes dires ont pu être...Etrange mais...Enfin... »

Il la saisit par les bras et se pencha vers elle, geste qui se voulait rassurant afin de l'apaiser un peu.

" Tu n'as pas à t'excuser Asami. Cool, 'y a pas de malaise tu sais. Allez, détends-toi et explique-moi ce qui te tourmente depuis t't'à l'heure en classe. "

C'est probablement ce geste amical, cette proximité soudaine qui sembla mettre la demoiselle en confiance. Même s'il déconnait souvent, Chris n'était pas quelqu'un de mal intentionné. Il avait lui aussi un passé lourd et pouvait comprendre que ce soit difficile à vivre.

« J'avais...une capacité...Que... »

Elle s'interrompit soudainement et se retourna, levant son regard vers le ciel. Chris le suivit et s'aperçut enfin que le ciel s'était assombri, mais pas comme s'il y avait seulement des nuages. C'était autre chose. Ses yeux se posèrent sur le soleil, se plissant à cause de l'éblouissement, et il comprit. Une éclipse venait de commencer et masquait déjà à moitié l'astre suprême.
Asami reposa son regard sur lui et le gronda :

« Ne regarde pas ça comme »

Elle leva le bras pour cacher sa vue avec sa main, mais Chris voyait toujours le ciel, très légèrement déformé. Intrigué, il observa la jeune femme et découvrit avec stupeur que sa main et une partie de son bras étaient devenus... comme transparents. Dans un geste de frayeur, elle ramena sa main et la serra contre elle. Bouche bée, elle ne savait plus quoi dire, ses mots se perdaient en hoquets silencieux. L'anglais réalisa alors que le corps tout entier d'Asami devenait translucide, puis à nouveau visible, et ainsi de suite.
Elle ne put prononcer que trois mots. Elle s'excusa avant de prendre la fuite en courant. Pas vraiment en courant en fait, mais plutôt en filant avec l'air telle une bourrasque. Sans hésiter, Chris se lança à sa poursuite.

" Attends ! Asami, ne pars pas ! "

Il courut aussi vite qu'il put mais elle était trop rapide. Ses pieds battaient les flaques d'eau à chaque pas, éclaboussant son pantalon. Tout à coup, il glissa sur l'une d'entre elles mais ne s'écrasa pas au sol. Non, au contraire, il continuait à foncer, et même plus vite qu'auparavant. Il était au ras du sol, serpentant de flaque en flaque. Pas de doute, il était redevenu liquide, enfin ! Et c'était apparu en même temps que la disparition partielle d'Asami. Peut-être était-ce elle qui lui avait permis de retrouver son don étrange. Il finit par la rattrapper, mais elle ne le vit pas. Il n'était toujours qu'une flaque d'eau tout à fait ordinaire, à la seule exception qu'il se déplaçait. Cachée entre deux bâtiments, la jeune femme avait l'air terrorisée, mais il n'avait pas le choix. Il se concentra de toutes ses forces, et la flaque s'éleva, grandit jusqu'à reprendre la forme du garçon, une sorte de silhouette aquatique à travers laquelle on pouvait passer sa main. Il finit par reprendre une forme solide et fit face à son amie. Cette dernière était encore un peu transparente, puis redevint tout à fait visible. Sa respiration était haletante, non pas parce qu'elle était essoufllée mais parce qu'elle avait peur. Elle avait relevé la tête juste au moment où il se "relevait" et avait assisté à son changement d'état liquide à solide. Ils restèrent l'un en face de l'autre, silencieux, se regardant dans les yeux, complètement ahuris. L'éclipse était à présent totale et il faisait presque nuit. L'impasse où ils s'étaient cachés renforçait l'ambiance intime des lieux, comme si leur environnement tout entier les aidait à conserver leur précieux secret.
Alors c'était vrai, elle était comme lui... Ses soupçons dans l'amphithéâtre se voyaient désormais confirmés. En réalité, dès leur premier regard dans la rue, il s'était aperçu qu'elle était un peu comme lui, qu'ils partageaient quelque chose. Mais il ne parvenait pas à expliquer cette sensation. Là, tout devenait clair... comme de l'eau de source.

" Alors... on est pareils toi et moi ? " prononça-t-il doucement.

Il était venu à New-York pour retrouver son oncle et trouver des réponses à ses questions, et voilà que le destin lui tendait les bras, le posant sur la route de cette femme qui était comme lui. Ses yeux plongés dans les siens, il s'approcha d'elle et put presque sentir son souffle irrégulier. Doucement, il la prit dans ses bras et la serra très fort. Il s'était senti tellement seul pendant toutes ces années, depuis la mort de son frère. Il avait enfin trouvé quelqu'un d'important à ses yeux.

" Allez calme-toi Princesse. Tu vois, je peux te comprendre. Tu n'as plus à avoir peur maintenant. " lui murmura-t-il doucement dans l'oreille.

Une larme s'échappa de son oeil. Mais il souriait.