Qui es-tu? [libre]

Invité

Le vent comme un ruisseau s'écoule à travers les rues, il court insaisissable.

Gavin marchait lentement, il sentait l'air lui caresser la main puis s'enfuir en un instant éphémère. Des sensations simples, dont on oublie même l'existence. Le soleil descendait vers la ligne d'horizon, allongeant les ombres jusqu'à les rendre inquiétantes. L'heure tournait et l'Irlandais flânait dans un petit passage où s'entassaient les ordures de quelques restaurants dont les odeurs attiraient la vermine.
Il arrivait au croisement avec une avenue et leva les yeux vers le ciel. Qui serait le prochain que lui enverrait la providence? Machinalement sa main se porta à la crosse de son arme cachée dans les plis de sa veste. Un cercle de mort sans fin, telle était sa destinée.

"-Montre le moi, montre moi le sang sur ses mains. Je le châtierais, lui qui s'élèvent contre ta volonté. Je le punirais, qu'il pleure et réclame ton pardon. Que dans son dernier souffle il renie les voies du mal et que ton nom reste à jamais imprimé sur ses lèvres."

Les murmures s'envolent et s'éteignent. Les yeux s'ouvrent et s'allument d'une lueur malveillante, le chasseur guette le moindre signe, il attend patiemment que le prochain d'entre eux se dévoile. La proie qu'il traquera, son partenaire dans cette danse mortelle. L'attente était parfois longue mais toujours excitante.

*Qui es-tu?*

Le regard volant d'un passant à un autre, Gavin cherchait sans relâche, immobile au coin de la rue. Il y en aurait un, il y en avait toujours un.

Au final, tout tombait en place. Il était écrit dans le destin de Rick que les grandioses évènements auxquels il était sur le point de prendre part allaient se produire, et nul ne pouvait altérer cette réalité. Le Bostonien était convaincu que la grande révolution mondiale qu’il allait dont il allait être la source était quelque chose d’inévitable, et qu’il faudrait pour ceux qui n’adhéraient pas à ce futur s’y plier ou y laisser sa peau. Rick voyait très clairement l’avenir : un monde où les êtres spéciaux pourraient faire librement étalage de leur puissance, où la survie de chacun dépendrait de sa capacité ou, comme certains préféraient le nommer, son pouvoir. Alexis Kane et Edmond Van Buren était partit en chasse, une chasse à la cheerleader blondasse indestructible. La pêche ne pouvait qu’être bonne, et une fois la prise au bercail, Rick pourrait alors entrer en scène. Ce n’était qu’une question de temps…

Le Fléaux avait toujours été un bon catholique. Ses parents étaient descendant d’immigrants irlandais en Amérique, et lui avait inculqué très jeune les valeurs chrétiennes. Malgré la folie qui lui noircissait les idées, Rick n’avait cessé de prier, et devant l’immense chamboulement qu’il s’apprêtait à perpétuer à l’humanité, il se disait qu’avant toute chose, il ferait bien d’aller se recueillir devant un homme de foi. Il avait justement entendu parler d’un pasteur irlandais, Gavin Shayne. Certes, les pasteurs ne prônaient pas exactement le même message que les prêtres catholiques, mais Rick ne cherchait qu’un homme près du Seigneur pour faire entendre se qu’il avait à dire. Il enfila une légère chemise noire et un jean relativement usé avant de quitter l’appartement qu’il squattait sans remord.

Le Bostonien se dirigea lentement vers la petite chapelle où le pasteur Shayne prônait les voies de Dieu, naviguant avec une aisance relative dans la foule de piétons new yorkais. Il en profita pour fumer une cigarette, sachant très bien qu’une fois au saint lieu, il n’aurait pas la possibilité de satisfaire son besoin de nicotine. Il arriva enfin à la chapelle, un petit endroit pittoresque au sein de la métropole Américaine. Il y entra et ne fut pas trop surpris d’y trouver l’endroit presque totalement désert, si ce n’était que d’une vieille dame qui priait, le regard tourné vers une statue du Christ crucifié. Faisant preuve d’une politesse que seule la religion pouvait lui inspirer, Rick attendit que la dame termine ses louanges au Seigneur et qu’elle se lève pour quitter la chapelle avant de l’interpeller.

« Pardonnez moi madame, je n’ai pas l’habitude de fréquenter cet endroit, mais j’ai à me confesser. Savez-vous où je pourrais trouver le pasteur Gavin Shayne? »

Un regard relativement suspicieux fut la première réponse que Rick obtint de la vieille dame. Après quelques secondes à analyser son interlocuteur, elle fini par répondre.

« M. Shayne doit être à l’extérieur, il a l’habitude de marcher lorsqu’il n’est pas en service. »

Sans autre information, elle quitta rapidement la chapelle. Rick était maintenant seul, seul avec le Christ, seul avec tous ces saints qui avaient endurés tant. À l’époque, leurs messages était vu comme diffamatoire, dangereux pour l’ordre établie. Le Fléaux était donc tout simplement un saint moderne…

En quittant la chapelle, Rick remarqua une photo encadrée, accrochée au mur. Rien de bien spécial, probablement une photo de la cohorte des pasteurs new yorkais, avec leurs noms écrits sur le coté. Rapidement, le Bostonien chercha un visage à assigner au nom de Gavin Shayne. Il trouva finalement le jeune pasteur, et décida de l’attendre un peu plus loin. Il se dirigea vers un coin de rue près de la chapelle, et après seulement une dizaine de minutes d’attente, l’homme de foi se présenta. Sans plus attendre, Rick se dirigea vers lui, et l’aborda et posant sa main sur l’épaule du pasteur.

« Bonjour M. Shayne. Heureux de vous rencontrer! J’ai entendu dire entre les branches que vous êtes, tout comme mes grands-parents, un fier descendant d’Irlande! Je suis content de l’entendre. Mais j’imagine que vous vous doutez que je ne vous aborde pas simplement pour vous parler de ma généalogie! Non, voyez-vous, le cœur de l’homme moderne se remplis de ses nombreuses noires pensées et il semblerait que la confession demeure la seule vraie façon de retrouver la légèreté nécessaire pour vivre. Je vous demande donc, avec grand respect, de bien vouloir écouter mon récit, si cela ne vous coûte pas trop de votre temps. »